Gobel Mirlond

Hamilkar commandait la flotte de l'Ouistrenesse en l’absence d'Alcibiade. C'était une tâche importante pour le second de l'amiral. Par le passé il avait déjà mené d'importantes missions. Mais là, c'était toute les forces navales du Gondor et de l'Arnor réunies qui avaient fait route jusqu'aux côtes de l'Harondor pour s'y réunir avant de faire voile vers Long Daer.

Le port de Gobel Mirlond était trop étroit et possédait trop peu de quais pour que la flotte s'y réunisse. Aussi, l'armée y avait seulement laissé pénétré les vaisseaux de l'intendance, plus petits, afin qu'il profitent des aménagement pour charger l'intendance nécessaire à l'expédition. Une garnison importante protégeait cependant les lieux. Barahir, un lieutenant de l'amiral avait reçu la charge de cette garde.

Aussi lorsque la flotte corsaire se présenta, elle fut quelque peu surprise de ne pas voir le moindre navire de guerre aux abords du port. Seuls de petits voiliers se présentèrent à eux. Lorsque l'impératrice fut à quaie, un visage bien connu se présenta: celui de Barahir. Il avait été prévenu de l'arrivée d'Azûul Li et devait l'envoyer vers les plages plus au Nord où les navires du Gondor mouillaient en attendant que tout fut prêt pour le départ.  Son cœur s'assombrit en songeant à leur précédente rencontre. Elle n'était pas impératrice à ce moment, et il l'avait alors violemment frappé. Mieux valait se faire discret et éviter de faire resurgir le passé. Aussi il se contenta de s'approcher raisonnablement et salua Azûul Li d'une légère révérence:

"On nous envoie pour vous conduire au lieu de rassemblement. Faites changer le cap de votre flotte et suivez nous!"


Barahir fit venir des montures et ils se mirent en selle pour partir plus au Nord. Après quelques minutes de chevauchée, ils dépassèrent un cap rocheux. Au détour de ce dernier, un spectacle impressionnant se présenta à eux: tout du long de la côte sableuse et blanche, des centaines de vaisseaux dressaient leurs mâtures. Une brise faisait serpenter les pavillons et les drapeaux. Barahir conduisit l'impératrice vers ce qui semblait le centre du camp: au dessus d'une plage de grandes tentes multicolores dressées en cercle avaient été plantées pour établir un quartier général.
À l'intérieur Hamilkar vérifiait avec les autres capitaines la route qu'ils allaient emprunter. Il leur faudrait éviter les côtes à l'Ouest du Gondor pour ne pas alerter les partisans de Thais de leur manœuvre. Un soldat se présenta pour prévenir de l'arrivée des corsaires. Le commandant sortit donc de sa tente pour recevoir comme il se devait la nouvelle impératrice de Harad. Il s'avança vers Azûul Li accompagnée de Barahir.

"Bienvenue à vous impératrice. Je suis Hamilkar, le second d'Alcibiade qui m'a chargé de vous mener vous ainsi que notre flotte vers Long Daer. Nous appareillerons demain à l'aube. En attendant, j'ai fait dresser une tente pour vous accueillir de la meilleur manière qui soit. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, Barahir se fera une joie de se rendre utile."

Alcibiade avait lui même laissé des ordres concernant ce dernier. C'était une manière raisonnable de s'excuser et d'infliger une punition au lieutenant. Barahir n'avait d'ailleurs fait que son métier, mais la diplomatie exigeait parfois de faire profil bas, et le lieutenant savait se soumettre aux ordres, surtout à ceux de l'amiral qui était le plus souvent juste et équitable. Aussi le lieutenant s'inclina vers Azûul Li en signe de soumission.

Le lendemain avant même que l'aube ne dévoile ses premières lueurs rougeaude, ils levèrent les voiles. En deux heures, le camp fut déserté par les troupes du Gondor. Ils avaient replié tentes et bagages en un rien de temps, les paquetages ayant été préparé la veille en prévision de l'embarquement matinal. Des centaines de chaloupes s'étaient relayées pour faire monter à bord prêt de trente milles hommes. Il y avait là une armée d'élite, rompue aux manœuvres d'invasion. Son équipement était plus léger que celui des troupes d'infanterie lourde traditionnelle, mais aussi plus polyvalent. Ils possédaient d'avantage de balistes à répétition, mais disposaient en plus de l'infanterie coloniale, armée d'arcs courts, de pavois et de lances. Les hommes étaient des voyageurs habitués aux patrouilles en mer où ils traquaient les corsaires. Face à un navire protégé par ce genre troupe, il était difficile aux corsaires, hormis aux plus gros et plus rapides navires, de vaincre et même d'espérer pouvoir fuir. Il y en avait prêt de deux milles, couverts de hautes cuirasses et de pourpoints de cuir.

Il y eu même une chaloupe remplie de tonneaux qui chavira. Elle répandit sa cargaison dans les vagues et l'écume mousseux. Les hommes se précipitèrent et certain emportèrent un tonneau sur le rivage. Leur déception fut grande: le cylindre de bois contenaient seulement des flèches! L'armada disposaient là de toutes les réserves nécessaires. Des vaisseaux de pêche avaient même été réquisitionnés pour suppléer les navires de commerce.
À l'exception des plus hauts gradés, tous ignoraient la destination de la flotte. C'était là une restriction nécessaire à préserver le succès de leur débarquement. Autour des navires la pénombre commençait à disparaitre. Le flot se fit plus houleux, réveillé par la brise matinale. Aussi, lorsque le dernier navire eu quitté le rivage, Hamilkar se tourna vers le timonier à la barre et ordonna:

"Cap Ouest Quart Sud Ouest."

Son second quitta le pont arrière pour gagner la proue du vaisseau. Là quatre archers se tenaient devant un baril remplie de flèches dont la pointe était garnie de longs rubans de soie noire. Ils se mirent alors en joue. Le navire virait encore de bord pour fixer le cap. Les tireurs visaient dans l'axe du vaisseau. Lentement leur axe déviait. Finalement la nef cessa sont mouvement arqué sur la vague. Le second abaissa son bras et les flèches fusèrent. Les archers délivrèrent leur tir un à un. Et les quatre rubans de soie se déployèrent en l'air, claquant sous la rafale opposée à leur course. Les tireurs se réapprovisionnèrent et renouvelèrent l'opération pendant plusieurs minutes. Et dans le ciel ils dessinaient ainsi un cap pour toute la flotte par cette trainé noire sur le ciel bleuie naissant en l'Ouest. Derrière eux, à l'Orient, le soleil dardait derrière la côte. Quelques nuages nocturnes étendaient encore leur course écarlate.
Des milliers de voiles recouvrirent l'horizon. Avec le soleil levant, les nefs tracèrent leurs sillons dans l'embrun, remuant le sel de l'océan. La Baie de Belfalas se présentait devant eux. Les vents rapides y régnaient et les pousseraient vers l'Ouest. Les vents descendant par les plaines d'Ithilien puis les deltas de l'Anduin souffleraient favorablement. Ainsi ils voguerait à bonne allure vers Long Daer.

Semblables à des oiseaux migrateur en route vers d'autres terres, les vaisseaux étirèrent leur nuées sur la mer. Les coques brisaient les flots trop impétueux en cette matinée fraiche. Ils avançaient depuis une trois bonnes heures lorsque Hamilkar sembla reconnaitre un vaisseau corsaire s'approchant de son bord. Peu à peu il distingua le capitaine. Ce n'était autre qu'Azûul Li. Elle avançait à bonne allure. Visiblement, sa réputation de bonne navigatrice n'était pas une légende. Le Second de l'Amiral fit virer légèrement la course de la nef pour se rapprocher du vaisseau impériale. Lorsqu'ils furent à quelques encablures, Hamilkar salua Azûul Li d'un large mouvement du bras. À cet distance, ils n'auraient pu échanger beaucoup de paroles, aussi un simple salut suffisait. Du bastingage, le capitaine gondorien s'était penché en se maintenant à l'aide d'un cordage. Il finit par regagner sa cabine. Il allait bientôt être midi, et il faudrait faire le point sur la passerelle. Il déballa un boite faite d'un bois exotique et en tira un compas solaire ainsi qu'un attirail de règles graduées de signes à la calligraphie originale. Le voyage commençait toujours avec le premier relevé.