Cette journée dans la Forêt Noire avait été, en somme, comme toute les autres : Sombre et ténébreuse.
Une brume épaisse, presque étouffante, s’était infiltrée dans les moindres recoins et rendait la visibilité incertaine dans la région. Les araignées qui peuplaient le bois avaient profités de ce moment où le soleil ne montrait pas ses rayons brûlants et corrosifs pour sortir de leurs antres recouverts de toiles gluantes et invisibles.
Ce fut bien le genre de journée qui effrayait aussi bien les Elfes que les Hommes de Rhovanion en garnison près des ruines de la forteresse. Ils n’étaient qu’une dizaine a peine, juste de quoi garder un œil sur ce lieu maudit…
Les cargaisons de réapprovisionnement venant de Dale n’arrivaient qu’au compte goutte et il manquait bien des choses à ses hommes courageux et au teint basané.
Il y a quelques jours déjà, deux hommes avaient péris d’une façon mystérieuse alors qu’ils effectuaient l’habituel tour de garde près de la large porte scellée qui menait dans les souterrains de la forteresse. Un autre garde avait disparus en allant remplir plusieurs cruches avec l’eau de la rivière. Un sentiment de peur collective commença à s’installer chez la modeste garnison et une étrange paranoïa s’éveilla en eux.
Ils ne dormaient presque plus et affirmaient voir des choses se mouvoir tout prêt d’eux et ensuite disparaître mystérieusement.
Aujourd’hui devait arriver un convoi bien étrange, composé de plusieurs personnages habillés de sombre. Ils semblaient guider par un quelconque charme ou pouvoir car aucun d’eux n’emprunta un mauvais chemin, là où se terraient les lointains descendants de l’affreuse Ungoliant.
Eclairés par une pâle aura, ils arrivèrent bientôt au lieu même où se trouvaient les anciennes portes de Dol Guldur.
Une odeur nauséabonde émanait du centre de l forteresse, et c’est avec hésitations que les inconnus s’y engouffrèrent.
Ils semblaient de toute évidence rechercher les gardes supposés surveiller les environs, mais leurs recherches furent presque infructueuses.
Un individu, le plus grand du sombre groupe, entra dans l’une des vastes tentes qui devait servir d’abris en cas d’orage et qui menait aussi aux fameux souterrains.
L’homme, car s’en était un, appela soudainement d’une voix fourbe ses compères qui le rejoignirent bientôt.
Tout le long du grand escalier menant dans les profondeurs inconnues gisaient une dizaine de corps, inertes et sans vies.
Un des personnages drapés d’obscurité étouffa un rire mauvais et dit en noir parlé :
-« Voilà ce qui coûte de fouler ainsi les territoires de Morgoth ! Le Maître va être content, nous n’avons pas eu à tirer nos épées. »
Un des larrons, plus large d’épaule que les autres, répondit d’une voix froide :
-« Je savais qu’il restait encore bien des créatures cachés dans les souterrains, mais j’étais loin de penser que ses imbéciles oseraient profaner les scellés de la porte. »
L’autre répondit aussitôt :
-« Non, regardez, il semblerait qu’ils se soient entretués ! »
-« Ainsi, leurs esprits se seraient finalement laissés emporter par leurs instincts bestiaux et la peur les aurait envahis. Immondes Sangs Mêlés ! Quand de tels hommes, si faibles, se retrouvent seul et livrer a eux-mêmes, il y a toujours des chances qu’ils s’entretuent. »
Celui qui semblait être le chef et qui n’avait dit mot depuis le début s’exclama enfin :
-« Ce qui n’est pas une caractéristique des Dunaidains que nous sommes. Mais allons, nous avons beaucoup à faire ! Les premiers ouvriers du Rhun ne devraient pas tarder à se présenter. Attendons-les avec la noblesse et la dignité de comportement qui nous caractérise tant. »
Les autres acquiescèrent et ils sortirent tous de la tente, s’installant confortablement à l’extérieur, espérant voir arriver les Orientaux d'un moment à l’autre.