Minas Morgul

Le capitaine gisait là,décapité,et sa tête roula au pied de Shraknag dans une gerbe de sang.Celui-ci l'écrase furieusement,comme pour passer ses nerfs,et des morceaux de cervelle se répandirent sur le sol.

D'une voix chargée de haine,il dit à l'humain : "Ecoute-moi bien,l'avorton.Je ne sais pas si tu à très bien compris qui je suis.Je suis Shraknag,chef des Orcs de Barad-Dûr et de Cirith,et je n'accepte aucun manque de respect de la part d'une raclure d'humain!Tu te rends coupable de crime de lèse-majesté,et ça va te couter cher mon gars!
Tu arrives à l'improviste,tu débarques avec des loups sortis d'on ne sait où,et tu te crois tout permis au milieu de mon armée!
Je me doutais bien que tu n'es pas motivé par des intentions charitables,et le fait que tu arrives en renforts était un peu trop beau pour être vrai.Je pourrais t'écraser ici même,t'arracher les boyaux un par un,te faire dévorer par mes Wargs,j'ai même un Troll,si ça te dit!Mais pour l'instant je n'en ferais rien.Par contre,un seul geste déplacé,une seule bravade,je te promets de lancer toute mon armée à tes trousses.Soit tu pars sur-le-champ,sois tu restes.A tes risques et périls."


Bien sûr,Shraknag ne se doutait absolument pas que l'assassin lui en voulait personnellement.Il le considérait juste comme un humain orgueilleux,et voulait lui inculquer le respect des Orcs,du moins de sa personne.

Le chef Dunedain étant mort,il restait seulement à traquer les survivants.Avant de s'élancer sur sa monture à travers les montagnes,il donna des ordres à sa garde et à un groupe d'Orcs :

"Ramenez cette raclure au camp.Vous le garderez dans une des tentes.Enchaînez-le s'il ne sait pas se tenir tranquille.A la moindre incartade,à la moindre parole de travers,tuez-le.Et ces loups,là...Vous allez les séparer de leur maître.Même consigne : s'ils grognent,s'ils attaquent,écrasez-les.Vous les attacherez à l'autre bout du camp.

Avec des ricanements rauques,les Uruks s'approchèrent d'Artélion,leurs dents tranchantes révélées par des sourires malsains.Des arbalètes se levèrent.Lui était maintenant sous bonne garde.Les loups,c'était autre chose.

"Vas-y,l'humain!Dis-leur de se tenir tranquille si tu tiens à eux!" dit Shraknag dans un grand rire.Les bêtes étaient en joue,mais leur nombre inquiétait un peu.Avec un rictus,l'Orc dit à ses séides,en montrant une grande masse noirâtre au loin,qui fracassait quelques survivants : "S'ils vous posent problème,les gars,appellez Gogdish,je crois que lui ne risque rien!"

Eperonnant sa monture,il lança un dernier regard haineux à cet humain plutôt inquiétant,et c'est avec un sentiment de malaise pourtant bien dissimulé qu'il alla chercher ses dernières victimes.En tuant les derniers Rôdeurs à l'arc,il ne pouvait s'empêcher de penser à cet homme.Bah,il importait peu : Shraknag n'aurait aucun problème à prévenir Toranur de la mauvaise conduite du soldat.

Ce que l'Orc ne savait pas,c'était que l'épée pendant à sa ceinture,cette vieille arme qu'il n'utilisait pas,aurait pu vaincer les Morts en Angmar,qu'il détenait une des lames les plus recherchées du Mordor,et que Toranur n'était peut-être pas étranger à l'envoi du mercenaire,directement ou indirectement....S'il avait été au courant,il aurait déjà assassiné Artélion.Or,il ne savait rien,et c'était là que tout basculait....

* Et m... je pensais qu'il n'allait quand même pas me faire prisonnier cet enflure, quel boulot fait à l'improviste, s'il veut me décapiter il a cas me provoquer en duel *
Tandis qu'Artelion ordonna à ses loups de les suivres sagements sans partir défendre son maître, celui-ci se laissa enchainner sans rien dire par quelques orcs rigolants en rencontrant le regard du général Shraknag, il laissa ses deux lames, son arc et ses deux carquois de flèches à un ourouk-haï plus grand et partirent au camps.

Lorsque Shraknag revient,tâché de sang,éreinté par la dernière poursuite,il s'attendait à retrouver un mercenaire écrabouillé et des loups en charpie.Quelle ne fut pas sa surprise quand en entrant dans la tente il découvrit un prisonnier,certes enchaîné,mais tout à fait calme!De par sa nature provocatrice,il aurait dû se défendre,insulter un de ses geôliers...Rien de tout ça.Si Shraknag voulait se débarasser de lui,il serait obligé de faire le sale boulot lui-même.

L'homme était donc bien plus fin que ce que l'Orc avait imaginé.Un danger supplémentaire.Un esprit aiguisé dans un corps de serpent : mince mais prompt à frapper et à tuer.

Les menaces étaient maintenant inutiles.Il ordonna que l'on détache les captif.Il fallait l'interroger.D'une voix où se mélaient à la fois mépris et crainte,Shraknag lui demanda :"Alors,humain?D'où viens-tu?Qui t'envoie?Qu'es-tu censé faire,quelle est ta mission?

L'Orc se demandait si son prisonnier allait répondre bien sagement ou tenter encore une bravade verbale,mais il ne se faisait pas d'illusions : il n'allait pas tout lui déballer comme un jeune soldat terrifié.Il se tairait peut-être,mentirait sûrement.Mais,las de se battre pour la journée,Shraknag se disait que la torture ne serait pas à l'ordre du jour...

Shraknag lâcha son arme de torture,qui tomba avec un bruit mat.Il avait pensé à s'en servir...avant qu'Artélion ne lui donne toutes les informations qu'il voulait entendre!

En temps normal,il aurait supecté un tissu de mensonges.Mais ce que venait de lui dire le captif sonnait étrangement vrai.En quelques secondes,l'entrevue qu'il avait eu avec Toranur,où il avait posé cette question sur les armes qui pouvaient vaincre les Morts,lui revint en mémoire,et Minas Morgul était bien l'endoit d'où était partie l'armée...

Le général Orc avait perdu toute contenance,et ouvrait de grands yeux,tout en ouvrant la bouche comme un poisson hors de l'eau,sans pouvoir émettre le moindre son.Une lame!Une épée pour vaincre les Morts!C'était cette vieillerie décorative qu'il portait à la ceinture,après l'avoir trouvée au milieu des cadavres Orcs de la Tour de Cirith,et qu'il gardait comme trophée et symbole de son autorité!

Tout se bousculait dans la tête de Shraknag.Pouvoir.Puissance.Autant de promesses glorieuses qui pouvaient devenir réalité.Il lui suffisait d'assassiner son prisonnier.De faire croire qu'il avait été tué par les Dunedains.Et s'approprier tout le mérite pour avoir retrouvé la lame.

Or,tout n'était pas si simple....Si Toranur était réellement le grand instigateur de cette mission de grande envergure,il ne tomberait pas dans le piège.Il le recompenserai officiellement,et se débarrasserai de lui officieusement...Or,un Orc aussi orgueuilleux et ambitieux que Shraknag tenait à la vie.

Il choisirait la voie diplomatique.Décrochant de sa ceinture l'arme tant recherchée,il la jeta aux pieds de l'assassin : "Vas-'t'-en.Emporte cette épée là où elle doit être.Si jamais tu croises le maréchal Toranur,s'il a quitté sont trône pour avoir cette épée en mains propres,dis-lui que les Rôdeurs ont été éliminés jusqu'au dernier.Enmène tes loups avec toi.Maintenant,va!

Tandis que l'assassin le regardait d'un air indécis,Shraknag réfléchissait,encore tout retourné des évènements de la journée.Rôdeurs.Troll.Massacre.Assassin d'Isengard.Loups.Epée sacrée.Plan d'envergure.Son cerveau pourri tentait lentement d'assimiler toutes les informations....

Artelion regarda la lame magique en la rammassant
La réaction du général prit Artelion d'un grand étonnement avant que celui-ci ne lui répete de s'en aller.
* Décidement, il sait réléchir ce soidisant général *
L'ourouk-Haï redonna à l'assassin ses armes par ordre de Shraknag puis le mena aux cages prévus pour les prisonnier mais qui ne comportait que les treize loups d'Artelion.
Les loups se soulagèrent à la vue de leur maître saint et sauf, il enfourcha le plus grand des loups, Ériis puis reppartit en direction de la grande forterresse de Minas Morgul les douze autre le suivant.
* J'ai de la chance d'être en vie à cette heure là, il ne faut plus que je ne me fasse remarquer sinon c'est la mort assurée. J'espère que ma prochaine mission sera plus agréable, surtout envers le général Shraknag.*

L'Orc regarda l'ex-captif repartir,sa meute le suivant comme autant de terribles gardes du corps.

Maintenant que les Dunedains étaient vaincus,Shraknag allait sûrement recevoir une nouvelle mission.Une attaque sur l'Ithilien,par exemple,des excursions discrètes en Gondor,la rénovation de la Tour de Cirith Ungol,la réorganisation des troupes....Les tâches qui pouvaient lui être données étaient nombreuses et variées.Mais son avenir restait incertain : allait-il être récompensé,pour ses réussites martiales et son comportement,où puni pour avoir fait capturer Artélion,et surtout ne pas avoir vu une lame que tous recherchaient,alors qu'elle était à sa ceinture?

Shraknag s'inquiétait,et ruminait ces pensées continuellement.Laissant un important détachement devenir la garnison de l'avant-poste,il ordona le départ pour le reste de l'armée.Les Orcs victorieux le suivirent dans une cacophonie de rires féroces et de chants de guerre.Menant l'armée à la tête de son escouade d'élite,où Gogdish,de par ses exploits et le massacre qu'il avait perpétré,figurait maintenant en bonne place,puisque il jetait une ombre titanesque sur le général,marchant à ses côtés tel un monstrueux gardien de pierre.

Le chef Orc se dirigeait vers Minas Morgul.S'il n'était d'aucune utilité là-bas,il retournerait à Barad-Dûr,et se préparerait,peut-être,à aller combattre les Morts....

[MJ on]

Pendant quelques longs instants, Born Minguts resta sans voix. Ce moment qu'il attendait depuis tellement longtemps et après tant de travail était enfin à portée. Prenant la lame entre ses mains, il la contempla sous toutes ces coutures avant de la planter dans un corps encore frais. Sautillant d'excitation, il serra dans ses bras l'assassin en murmurant:

"Incroyable! C'est tout bonnement incroyable!"

Se reprenant, il se tourna vers l'assassin, les yeux encore pleins d'étoiles, et lui dit:

"Artélion, si tel est ton nom, je te payerais comme un prince. Tu viens de réussir une mission d'importance capitale et de manière efficace et rapide. Demande ce que tu veux et je te le donne de suite si c'est en mon pouvoir."


Pendant ce temps, alors que la lourde colonne orc rentrait à sa forteresse, un messager sur warg se présenta à Shraknag. S'inclinant devant le général, non pas par respect mais par peur de l'immense Troll derrière Shraknag, le messager tendit une missive. Sur cette dernière, il était noté:

Harceler le Harad et repérer les points faibles de la défense du Mur.

[MJ off]

Le chevaucheur s'inclina bien bas,et Shraknag confondit la peur du Troll avec le respect qui lui était dû.Il fit un sourire méprisant et arracha la missive de mains du messager.Ses yeux jaunes et injectés de sang parcoururent la missive.Quelques mots à peines la composaient :"Harceler le Harad et repérer les points faibles de la défense du Mur"

Shraknag éclata d'un grand rire.Le roi d'Angmar avait toujours la mainmise sur les affaires du Mordor,et il ne perdait pas de temps pour envoyer ses instructions!

L'affaire était en outre plutôt plaisante : affronter les Haradrims serait un changement bienvenu,le Gondor étant un ennemi lassant à force de confrontations.De plus,ce peuple des Terres du Sud était connu pour sa férocité et sa barbarie au combat.Enfin,un harcèlement impliquait des raids éclairs,des escarmouches en petit effectif,peut-être même des pillages!Shraknag se pourléchait déjà les babines à l'idée de pouvoir faire des festins de Suderons....

Repérer les point faibles du Mur serait une autre paire de manches.Shraknag élaborait des stratégies,oui,mais d'attaque,surtout sur de vastes espaces : il s'y connaissait peu en défenses et en fortifications.Bah,ce n'était qu'un mur,ce ne serait quand même pas trop difficile à analyser!

Tandis qu'une partie de l'armée rentrait à Minas Morgul,Shraknag fit réapprovisionner l'armée en matériel nécessaire pour mettre sur pied des camps et des avant-postes et en nourriture : il ne fallait pas compter sur les pillages en route,le général Orc ayant choisi de faire un détour pour ne pas passer par le Gondor,et ainsi éviter de se mettre à dos ces belliqueux Hommes qui surveillaient farouchement leurs frontières,trop près au goût de chacun du Noir Pays.

Rapidement après l'arrivée à Minas Morgul,ces détails réglés,l'armée repartit pour de nouveaux combats,ces perpetuels affrontements pour la gloire du Seigneur des Ténèbres et du Royaume du Mordor....

Le baron Born Migut avait l'air vraiment satisfait du travail d'Artelion jusqu'à même le récompenser autant qu'il le voudrait. Vraiment surpris par la réaction de son maître, Artélion pouvait devenir riche et abandonner ces terres en guerre pour aller vivre en paix dans d'autres contrées,mais sa vengeance était très loin d'être accomplie. Et dire qu'en deux jours il avait réussi à accomplir cette quête et était parvenu à devenir riche...
* Ce n'est pas dure de demander à un orc une vielle arme *, se dit-il enfin.
Certes il avait risqué sa vie et provoqué le grand général du Mordor, Shraknag,mais qu'on le traite comme un guerrier orc ne lui avait pas plu.

Gardant un oeil sur son maître,qui admirait la lame des morts de plus près, l'assassin répondit:
- Maître, je n'ai fait que mon travail et je ne puis me permettre de choisir ma récompense, c'est à vous de m'en choisir une, mon destin est désormais entre les mains de Sauron et les vôtres,pouvez-vous choisir à ma place? fit-il en s'inclinant, la main gauche derrière le dos. Je ne veux que vous servir Maître; répéta t'il. Annoncez-moi ma prochaine mission, ce sera ma récompense ; termina le jeune garçon en se serrant les poings.

Leurs regards se croisèrent avant que Born Migut, serviteur de Toranur, le Roi d'Angmar, ne s'apprête à reprendre parole.
Grands aux cheveux noirs, frisés et assez longs, le dirigeant du Minas Morgul, pareil à un homme sauvage et mystérieux, avait eu une vie à la fois remplie de chance, de bonheur et de malheur.A part quelques échos,des rumeures glanées ici et là,personne ne connaissait sa véritable histoire.

[MJ on]

Born Mingut hésita un long moment avant de reprendre la parole. Couvrir d'or ce nouveau serviteur qui était suffisamment honnête pour ne pas avoir tenté de soutirer de l'argent au baron, soit trop ignorant de la valeur de l'arme, n'était rien. Mais voir à lui confier de nouvelles missions avec encore plus de responsabilités de par les connaissances qu'on en retirait. Cet assassin méritait-il qu'on lui consacre tant de temps? Et pourquoi aurait-il eu des chances qui ne s'étaient pas présentées de suite à lui lorsqu'il était plus jeune?

L'esprit humain est parfois tortueux, mais celui des responsables l'est encore plus. Prenant enfin une décision, le baron répondit:

"Le Mordor est un excellent pays pour qui sait manier le couteau dans l'ombre. Mais la concurrence y est rude et la présence des orcs à proximité émousse les meilleures lames. Depuis peu, Notre Véritable Seigneur à tous à décider de réunir ses meilleurs éléments guerriers en une nouvelle place afin d'y former l'ossature de commandement de son armée de demain. Je pense pouvoir t'y avoir une place. Ce sera dur, mais très gratifiant et suis certain que tu y trouveras ta place. Prépare ton paquetage, tu m'accompagneras demain à cet endroit. Nous emporterons l'épée et tu devras veiller sur ma sécurité et la sienne. Allez, je te laisse, j'ai beaucoup de choses à préparer..."

HRP: Suite dans voyage d'Artélion.

[MJ off]

Lorsque Shraknag mit pied à terre,il ne put s'empêcher de sourire à la vue de la Tour de la Sorcellerie qui brillait de mille feux verdâtres. Plantées entre les Montagnes Noires,elle semblait une couronne hérissée aux flèches coupantes,et l'émotion qui retournait les entrailles de l'Orc était intacte - et même plus forte encore que la première fois qu'il l'avait vu,car étant donné que sa position actuelle n'était pas des plus enviables,il savait qu'il aurait pu ne jamais pouvoir poser de nouveau les yeux sur la cité morte.

S'arrachant à la contemplation de Minas Morgul,il apostropha avec mépris un des Orcs posté au garde-à-vous à l'entrée de la cité :

- Toi,là ! Dis-moi pourquoi on m'a dérangé ! Cirith Ungol réclame mon attention,j'espère que tes chefs ont une très bonne raison !
- Général,ce ne sont pas mes supérieurs qui vous ont mandé ici,dit l'Orc avec une obséquiosité ridicule. L'ordre vient de...plus haut.

La colère de Shraknag s'évanouit dans l'instant. "De plus haut"... Depuis la désertion ou les changements d'affectation des pointures du Mordor,il n'y avait plus beaucoup de monde au-dessus de lui,excepté le Grand Maître. Cela signifiait donc qu'il n'était (pour l'instant du moins) toujours pas tombé en disgrâce auprès de Sauron. Rasséréné par cette idée,il répondit au soldat sur un ton bien plus calme :

-
- Je vois. Que me demande-t'-on de faire ?
- Une simple revue de troupes,monseigneur. Une légion revient tout juste d'une campagne de pillage dans le Proche-Harad,et nous commençons à peine à comptabiliser les pertes et les gains ; c'est à vous de décider où affecter les combattants,s'il faut fractionner la légion ou lui faire monter un camp... Et quelque véhément discours ne saurait être de trop pour tous ces combattants harassés.
- Très bien. Où sont-ils stationnés ?
- Sur l'autre flanc de cette montagne,mon général,répondit l'Orc. Ils vous attendent.

Sans plus de cérémonie,Shraknag enfourcha son Warg et s'élança dans la direction indiquée par le soldat.

Lorsqu'il arriva,après quelque minutes de galop,au campement de fortune qu'avaient commencé à dresser les vétérans épuisés,Shraknag fit une grimace : comparé à ce qui avait été envoyé en Harad,les troupes survivantes étaient bien maigres,et particulièrement mal en point. Les éclopés cotoyaient les mourants,et les soldats en bonne santé se comptaient sur les doigts de la main. Quand ils virent leur général s'avancer parmi eux,peu nombreux furent ceux qui l'acclamèrent. Ils lui en voulaient très certainement de les avoir envoyé au massacre au lieu de la glorieuse campagne promise. Shraknag sentait se poser sur lui moults regards haineux à mesure qu'il progressait à travers les rangs brisés. Bien décidé à ne pas accorder à ces soldats irrespectueux la moindre sympathie,le Général demanda à un gradé qui venait l'accueillir : "Eh bien,lieutenant ? Où sont les Trolls ?". C'était là sa préoccupation majeure : les créatures manquaient au Mordor,et elles demandaient de grands moyens - de plus,elles n'étaient pas de la chair à canon comme les milliers d'Orcs qui grouillaient dans le Pays Noir. Après une rapide courbette,le gradé lui indiqua où les bêtes avaient été parquées,et Shraknag s'empressa d'aller leur rendre une petite visite. Arrivé devant le grand enclos où se bousculaient les Trolls,l'un d'entre eux attira son attention. Plus immense encore que ses énormes congénères,doté d'une musculature et semblable à un roc muni de bras et de jambes,il semblait,Shraknag n'aurait su dire pourquoi,moins abruti que les autres. Détachant son fouet barbelé de sa ceinture,il tendit une main décharnée vers la bête et lui dit en Noir Parler : "Toi,l'Olog au bras blessé ! Viens ici...".

Alors qu'il s'impatientait, un murmure parcourait les troupes, un officier serait en train de faire la revue des troupes. Il serait sans doute très en colère de voir l'état pitoyable de la légion. Mais cela n'avais aucune importance, le Mordor n'as aucun sens de la camaraderie.
Dans l'enclos des trolls, l'un d'entre eux était en train d'agoniser au sol, l'un de ses bras broyé et le flanc percé de nombreuses blessures. Pourtant le seul intérêt de ses "compagnons" était qu'il meurt rapidement pour pouvoir le manger... Le meurtre n'était pas autorisé, mais si il mourrait suite à ses blessures c'était une autre affaire. Il n'était pas assez fort, et voila tout. Les olog-hai eux même, ne vivait pas longtemps.

Un orque se rapprocha, il possédait le fouet barbelé du commandement qui était si douloureux, même contre leur cuir épais. Il possédait une véritable aura de commandement... Et si sa mémoire était bonne, il était même le général en chef en ce moment ! Non pas que ce soit une position durable, mais les ordres étaient absolu dans l'armée noir. Surtout pour les trolls qui était le plus bas échelon.

"Toi,l'Olog au bras blessé ! Viens ici..." ordonna l'orque.

L'olog-gai cruellement blessé à terre, s'anima d'une vigueur nouvelle, convaincu de son importance, et qu'on allait le soigner. Mortak, bien conscient que c'était lui qu'on venait de désigner s'avança, dominant de sa hauteur ses congénère, il avanca vers le général en prenant bien soin de marcher sur le bras blessé du misérable dont il ne savait plus le nom. Celui-ci hurla de douleur dans l'indifférence général. Mortak n'était pas particulièrement cruel, mais au bout de 5 ans, il savait parfaitement comment survivre dans l'armée.

"Mortak, à vos ordres général Shraknag" s'exprimat-il dans un noir parler impeccable, sans oublier de mentionner le nom de son général qu'il avait retenu.
Son immense poing vint frapper sa poitrine, produisant un véritable son de grosse caisse.

"Mortak, à vos ordres général Shraknag !"

L’Orc sourit en entendant ces mots sortir avec difficulté de la bouche répugnante du Troll,avec moults crachats de bave verdâtre. La bête connaissait son nom et son rang,et elle savait aussi qu’elle lui devait une obéissance aveugle. Et à voir la façon dont elle avait écrasé le bras de son congénère,elle semblait avoir une âme de chef qui serait bien utile à Shraknag. Et l'énorme poing fracassé contre la poitrine épaisse avait été la cerise sur le gâteau. Avec un grand sourire,le général s'adressa à la bête :

"Bien,Troll Mortak... Quelles ont été tes actions durant la campagne ? Qui as-tu affronté ? Es-tu sérieusement blessé ?"

Sans lui laisser le temps de répondre à ces questions,il enchaîna :

"Nous allons bientôt repartir en campagne. Mais point de grandes batailles et longs sièges ! Ce dont nous avons besoin,c'est de forces spécialisées dans les escarmouches,puissantes et polyvalentes. Troll Mortak,veux-tu en être ?"

Le Troll ne pourrait pas refuser la proposition - qui était en fait un ordre maquillé. Inutile de lui expliquer quels étaient les interêts stratégiques de telles missions,le monstre était bien trop bête pour comprendre quelque chose à la politique,songea Shraknag. Mais assurément,il saurait faire plus de dégâts que les pitoyables Orcs,tous brisés et lâches,et serait,à la tête de quelques-uns de ses congénères,un formidable atout pour des pillages en règle.

Mortak était très satisfait, le général daignait s'intéresser à lui. Et il était pratiquement impossible pour un troll d'espérer un quelconque intérêt pour une créature comme lui en temps normal. Soit il avait vraiment fait ses preuves en combat, soit le maître produisait peu de gens de sa race, et donc les effectifs était bas. Peut-être un peu des deux, mais peu importait, il ne devait pas rater cette occasion !

"Général, j'avais le rôle de troll-bélier, j'ai défoncé deux portes et tuer plus d'ennemis que deux fois les doigts de mes mains. Nos proies étaient des humains, mais je n'ai été que très légèrement blessé, quelques flèches et un javelot."

C'était un peu embellir la vérité, mais il ne pouvais dire que les flèches arrachés l'irritait encore et que le javelot lui avait transpercé le bras. Avec la vitalité de sa race, aucune blessure ne pouvais cicatriser en quelques jours, sinon celle qui sont mortelles.
Il s'empressa donc d'ajouter :

"Je suis prêt à me battre ! Nul ennemi ne peut résister à ma puissance, je vous ferais honneur !"

Pour illustrer ses propos, il se saisit d'un manche de lance qui trainait à ses pieds, le porta à sa bouche et le broya d'un coup de dent. Il cracha ensuite les échardes aux pieds du général, geste très honorable.

Le visage de Shraknag se barra d'un rictus carnassier. Mortak était prêt à se battre et à mourir pour lui,et semblait être un vétéran - la large blessure au bras que le Général avait remarqué lorsque le monstre s'était dirigé vers lui l'attestait. Qu'il ait tenté de la lui dissimuler avait fait sourire l'Orc : un Troll tentant,même maladroitement,de mentir ou de manipuler,était une perle rare. La perversité ajoutée à la cruauté et à la sauvagerie brute donnait un mélange explosif,un fabuleux potentiel qui ne demandait qu'à être utilisé. De plus,il avait l'air réellement soumis à son nouveau maître,et lorsqu'il brisa la lance d'un seul coup de sa puissante machoire avant d'en recracher des miettes aux pieds de Shraknag,celui-ci ne douta plus de sa fidélité. Il ouvrit une bouche répugnante et,faisant glisser sa langue purulente entre ses dents aiguisées,il lui dit dans un Noir Parler des plus châtiés :

"Il en sera donc ainsi,Troll Mortak. Je vais mettre sur pied un escadron d'élite composé d'Orcs spécialisés dans les pillages et les massacres et de chevaucheurs de Wargs vétérans,que je renforcerais avec une troupe de Trolls dont tu seras la pierre angulaire. Prépare-toi à la guerre,Troll Mortak,les adversaires du Mordor seront bientôt à ta merci !"

Sur ces mots,Shraknag héla un de ses serviteurs,qui s'empressa de lui amener son Warg,puis,sautant sur le dos de la bête,il s'en alla au triple galop rejoindre sa forteresse de Cirith Ungol pour mettre sur pied un plan de bataille prenant en compte sa nouvelle recrue...

"Et vous, gueuserie orcque, ne reconnaissez vous points vos seigneurs? Nous sommes numénoréens noirs et portons sur notre corps les marques de votre seigneur Sauron. Daignez nous laisser entrer en vos terres afin que nous cheminions pour rendre compte de nos missions respectives au Grand Seigneur des Ténèbres."

Le ton des nouveaux arrivants suintait l'orgueil de ceux qui savent qu'ils ne craignent rien. Pourtant la sentinelle fut cinglante :

"Pour qui te prends-tu, humain ? Il n'est pas d'autre seigneur en ces terres que Sauron le Grand. Vos marques sont aussi présentes sur les plus putrides des bras orcs - tant que vous n'aurez pas apporté de preuves plus convaincantes de votre dévouement à Sauron,la porte restera fermée."

La réponse était sans appel,mais c'était plus par bêtise que par zèle. L'orc nouvellement arrivé se sentait investi d'une mission de première importance et ignorait - paradoxalement - que l'influence de son maître ne se limitait absolument pas aux frontières du Mordor. Pour la sentinelle,un Numénoréen n'était qu'un lointain allié du Pays Noir,et non ses plus fidèles serviteurs en dehors des Orcs. Si un supérieur informé ne se montrait pas donc bientôt,les Numénoréens se verraient refuser l'entrée en Mordor,à moins qu'ils ne prouvent qu'ils étaient bien les soldats du Seigneur Noir...ou entre en force.

"À la gaaaaarde !"

Si l'Orc eut été au niveau des Numénoréens,son cri d'alarme eut été suicidaire. Mais il les surplombait du haut de son chemin de ronde - et la situation tournait alors en leur défaveur. En quelques secondes,les murailles résonnèrent du pas lourd et saccadé de dizaines d'Orcs aux dos voûtés,grimpant vers le lieu de l'alerte comme de grosses araignées tordues pour se repaître de quelque inconscient venu défier Sauron en ses terres. Mais la vue des Numénoréens les arrêta. Les têtes déconfites de ses frères surprirent la sentinelle - elle était la seule à ne pas avoir compris devant quoi elle venait de se dresser. Lentement les créatures refluèrent,peu enclines à se frotter à d'aussi imposants adversaires ; quelques cris furent lancés à un supérieur potentiellement présent. La sentinelle allait elle aussi abandonner son poste et les mercenaires rageurs lorsqu'elle fut arrêté par un choc sourd dans son dos. Quelques secondes plus tard,elle s'envolait vers les cieux noirs et retombait dans un craquement sonore aux pieds des Numénoréens,sa tête éclatant avant même que son cerveau moisi ne comprenne ce qui lui arrivait.

"Imbécile !" lança une voix sonore au cadavre désarticulé. L'injure avait été proféré par un Orc énorme,bardé de métal et au visage lacéré - c'était lui qui avait châtié l'incapable. Se tournant vers les Hommes,les épées toujours nues,il s'adressait à eux avec la déférence mielleuse des chefs soumis :

- Pardonnez la bêtise terrible de mes esclaves,mes seigneurs. Quel vent vous amène en terre de Mordor ?

Le dénommé Xantraille allait se répéter bon gré mal gré lorsqu'un snaga s'approcha du chef orc et lui chuchota quelques mots à l'oreille. La créature souleva alors du mieux qu'elle put ses paupières boursouflées :

- Un ordre de Barad-Dûr ? Mais nous sommes vos humbles serviteurs ! Bienvenue au Pays Noir,émissaires.

Une main lépreuse claqua des doigts et le mécanisme d'ouverture de la porte grinça dans l'air mort. Tandis que les Numénoréens s'avançaient d'un air suspicieux,l'Orc se retourna vers l'esclave et lui dit ceci,suffisament bas pour n'être entendu que de lui : "Fais préparer les soldats et suivre ces rôdeurs. Ils ne m'inspirent pas confiance : au moindre comportement suspect,qu'ils soient tués. Mieux vaut onze cadavres qu'onze voleurs."