Surprise à la fin du voyage

  La jeune fille entendit un bruit qu'elle n'avait pas entendu depuis ce qui lui semblait une éternité. Qu'était-ce ? Le temps que son cerveau assimile le hululement à l'animal, elle comprit que c'était un hibou. Nilù préféra l'ignorer. Elle souleva ses bras et amena ses mains sur ses yeux. Juste aussitôt, elle osa ouvrir les paupières. A son étonnement, ses doigts n'avaient pas protégés ses pupilles de la lumière car en réalité il n'y avait pas de lumière, c'était la nuit. Ses paumes allèrent donc s'appuyer sur le sol pour l'aider à se relever. Avec difficulté, Nilù se retrouva debout en quelques instants. Il lui fallut un temps pour se rappeler le contexte de sa situation. Son dernier souvenir était celui où on lui arrachait son collier alors qu'elle était en état de semi-conscience. Ensuite il ne s'était plus rien passé, jusqu'à maintenant où elle venait de se réveiller. Peu à peu sa vue s'habitua à l'obscurité, et elle réussi à voir ce qui l'entourait. Ou plutôt ce qui ne l'entourait pas, puisque c'était désert. Aucun signe de Zarielle ni des voleurs, aucun bruit, aucune trace, rien. Elle décida d'ignorer cela. Elle continuerait son chemin et si par bonheur elle tombait sur l'elfe, c'est tant mieux, si elle tombait sur les voleurs ou sur personne, c'est tant pis. Nilù aligna ses pas les uns après les autres. Marcher dans la nuit était une chose qu'elle n'avait encore jamais faite. En général elle s'aventure le jour et dort la nuit pendant ses rares voyages, mais elle ne s'amuse pas à avancer dans le noir complet au risque d'avoir une mauvaise surprise. Durant son trajet la fillette repensa à ce qui lui était arrivé avant son évanouissement et un déclic se fit dans son esprit. Son collier ! Cet objet auquel elle tient temps et qu'elle s'était fait arraché il y a peu de temps. Il fallait qu'elle le retrouve, et rapidement car si les voleurs étaient partis avec, ils devraient être loin à présent. Nilù ignorait la durée de son sommeil, mais elle savait d'ores et déjà qu'elle aurait une longue course à faire pour retrouver les brigands en possession de son pendentif. Ceci à moins que ce ne soit Zarielle qui lui ait volé l'objet...La jeune humaine avait l'esprit embrouillé avec toutes ses pensées contradictoires qui y fusaient sans cesse.

  La fillette marqua une pause dans son avancée et réfléchit un instant. Si c'était les humains qui possédaient son collier, elle n'avait pas la moindre idée de la direction qu'ils auraient pu prendre. Mais si c'était Zarielle, celle-ci n'aurait certainement pas eu l'idée de se diriger vers Imladris. C'était évident ! Nilù prenait la mauvaise direction. Elle tourna les talons et se mit cette fois à courir, comme si cela devait rattraper le temps qu'elle avait perdu en s'élançant vers Imladris. Elle essaya tout de même de scruter le sol pour (pourquoi pas) repérer un reflet jaune, le reflet de son pendentif à la lumière de la lune. Mais à son grand malheur la Gondorienne ne vit au sol que la terre et les brins d'herbe. Elle continua donc sa marche vers nulle part, espérant avoir emprunté la même direction que les voleurs ou la voleuse de son objet. Nilù ne pensait pouvoir compter sur son instinct pour faire le bon choix, en réalité elle misait plus sur la chance qu'autre chose. La chance...

Le soleil venait à peine de se coucher, mais déjà, l'air était plus froid et plus humide. Kéliwë, ou de son surnom, Kira, aimait bien les voyages de nuit, du moins cela ne la dérangeait pas le moins du monde. Cela faisait un moment qu'elle vagabondait sans réel but en Terre du Milieu, en s'arrêtant dans des petits villages, toujours sans rester bien longtemps. Cette fois-ci, son voyage avait un but : Imladris. Elle avait décidé de rendre visite à un ami ( rencontré il y a deux mois de cela ) qui était partit pour la vallée cachée en disant qu'il n'en partirait plus jamais. Elle, elle aurait été incapable de dire ça et de tenir parole.

À présent, il faisait totalement noir. Mais naturellement, la vue de l'elfe n'en était pas affectée. Même si elle voyait relativement bien dans le noir, elle tenait tout de même l'un des ses nombreux couteaux dans sa main, près à servir. Car oui, elle ne faisait jamais de voyages sans être armée et prête à se défendre. Il y avait les dagues qu'elle laissait à sa ceinture, mais aussi tout les couteaux plus ou moins cachés, l'un attendait dans un petit fourreau noué à sa jambe, un autre pareillement attaché à son bras, deux autres dans l'intérieur de sa veste … on ne sait jamais. Lorsqu'elle était seule, comme c'était le cas maintenant, elle laissait son esprit vagabonder comme ses pas, se remémorant des moment bons comme mauvais et des fabuleuses histoires qu'on lui avait, jadis racontées. Un bruit l'arracha de ses pensées. Elle scruta les environs et vit rapidement qu'un homme de forte carrure traînait par là. Leurs regards se croisèrent, et l’inconnu aux muscles proéminents se dirigea vers elle, armé. Ni une ni deux, Kira en fit autant. L'homme n’eut pas le temps de comprendre ce qui se passait, que déjà, une dague s'enfonça profondément dans son épaule droite, puis une autre dans la gauche. Il tomba lourdement au sol alors que l'elfe arrivait enfin devant lui. Heureusement, elle avait vu juste, cet homme était non seulement armé d'une épée, mais aussi de mauvaises intentions. Elle récupéra ses dagues et les rangea soigneusement à sa ceinture. Elle n'avait pas voulu tuer directement l'homme, mais ses blessures saignaient abondamment, à lui maintenant de trouver qu'il n'était pas aussi stupide que sa tête de laissait présager. Kira allait repartir quand quelque chose attira son regard, un reflet jaune venant de la main de l'homme. Elle s'accroupit à côté de l'homme et ouvrit sa main. Au creux de sa paume, l'elfe découvrit l'origine de ce reflet, un collier jaune. Une fine ficelle noire qui semblait avoir était arrachée à son porteur depuis peu qui avait pour pendentif, une jolie pierre jaune brillante.

Kira n'attendait pas de réponse, c'était tellement évident ! Elle prit le collier et referma la main de l'homme, puis continua de s'enfoncer dans la pénombre sans se retourner. Elle se demanda ce qu'elle allait bien pouvoir faire de ce collier, le garder ? Le vendre ? L'offrir ? Retrouver son porteur, ou sa porteuse ? Ça n'était ni le moment ni l'endroit de penser à ça. Surtout qu'a ce moment précis, elle entendit, puis vit quelqu'un courir, qui plus est tout droit vers elle. Elle serra sa dague dans une main et le collier dans l'autre. Encore un autre ??? Mais alors que la silhouette approchait, il fut vite évidement que ça n'était pas un homme comme le précédent. À bien y regarder, c'était une fille. Une fillette qui courrait en regardant le sol. Mais comme est est jamais assez prudent , Kira brandit tout de même l'une de ses armes.

La chance ! Est-ce la chance qui lui sourit à cet instant précis ? Car la jeune fille reconnut une elfe au loin. Au début elle n'avait pas reconnue une elfe mais à sa démarche, c'était forcément cela. Plus Nilù se rapprochait de l'individue, plus elle devenait sûre et certaine que c'était Zarielle. Dans l'obscurité totale, repérer une personne n'était pas évident, surtout pour l'humaine qui n'avait pas des yeux elfiques et qui ne connaissait que peu la galadhrim. Bientôt la fillette arriva devant l'inconnue mais eu un mouvement de recul lorsque celle-ci brandit son épée. Nilù fronça les sourcils pour essayer de mieux distinguer la personne en face d'elle. Avec stupéfaction elle s'avoua qu'elle s'était trompée. Ce n'était pas Zarielle, c'était une parfaite inconnue encore jusqu'à maintenant. C'est alors en observant l'elfe que la Gondorienne remarqua qu'elle renfermait quelque chose dans sa main. Son regard attiré par cela, Nilù distingua entre ses doigts une lueur brillante et reconnut aussitôt son pendentif. Toujours les yeux rivés sur l'objet qui lui appartenait, l'humaine dit d'un ton sec :

« Rends-le-moi. »

 Jusqu'à maintenant, la pensée de dégainer elle aussi son arme ne lui avait pas effleuré l'esprit, mais à présent elle se rendit compte que l'inconnue ne lui rendrait certainement pas automatiquement le collier et donc que Nilù devrait se battre pour le récupérer. Sa main droite alla alors se crisper sur la poignée de son épée et tira celle-ci de son fourreau, faisant siffler l'air. Puis elle tendit l'autre main en répétant :

« Rends-le-moi, je te dis, il m'appartient. »

 Mais comment cela se faisait-il que cette individue, parfaitement étrangère, se retrouve en possession de cet objet ? Tiraillée par sa curiosité, Nilù se dit qu'il ne valait mieux pas tuer cette elfe tout de suite, peut-être qu'elle avait croisé Zarielle ou les voleurs, ou les deux, et qu'elle avait connaissance des événements passés après que l'humaine ne se soit évanouie. Oui, cette inconnue avait certainement pleins de choses à lui apprendre, ce serait dommage qu'elle meurt tout de suite. La fillette hésita un instant à ranger sa dague mais finalement elle continua de brandir son arme tant que l'autre en faisait autant. A ce qui semblait, l'elfe avait l'air de pouvoir bien se débrouiller au combat, cependant Nilù aussi avait un coup d'épée rapide et efficace. Elle fixa son adversaire dans les yeux et attendit que celle-ci commence, ou non, le combat.

En voyant la fillette brandir son épée, l'elfe commença à se dire qu'elle avait bien fait de dégainer. Et si cette gamine n'était pas ce qu'elle paraissait ? Si sous ses traits enfantins se cachait tout autre chose ? Kira avait rencontrer tellement d'ordures que cela lui paraissait tout à fait plausible. Mais l'enfant tendit sa main, pour récupérer son collier, comme elle l'avait dit un instant auparavant. Là, toutes les pensées qu'avait eu l'elfe lui semblaient tout à coup totalement absurdes.  

Elle failli ajouter «  Je te battrais même si mes mains étaient attachées dans mon dos … ». Mais elle n'en fit rien, sans vraiment comprendre pourquoi d'ailleurs. Il ne faisait aucun doute à Kira que l'humaine ne partait pas tout à fait gagnante si elles se battaient. Elle tenait une petite épée – et c'était visiblement la seule arme qu'elle possédait, alors que l'accoutrement de Kira était truffé de lames en tout genres. De plus, même si elle était pas une elfe très grande, elle ne faisait tout de même pas la taille d'une enfant.

Mais qui était-elle pour se batte contre une fillette ? Personne, mais cela ne voulait pas dire qu'elle donnerait comme ça le collier à l'enfant, pourquoi pas lui donner aussi tout ses couteaux tant qu'a faire ? Non.
Alors, d'un grand geste, du plat de sa lame, elle désarma l'enfant. La petite épée se retrouva projetée simplement à deux pas de l'humaine.

Non, absolument pas, songeât-elle. Elle échangea l'épée qu'elle tenait contre le couteau accroché à son bras. Voilà qui est mieux. Mais un reflet jaune attira son regard, il ne venait non pas de son poing mais du manche de la petite épée. Instinctivement, elle rangea d'abord le collier dans l'une de ses nombreuses poches avant de vraiment comprendre. Oups.
Mais elle ne laissa rien transparaître, et si c'était un hasard ? C'était possible, pas vrai ?

À peine l'enfant eut le temps de prononcer ces mots qu'elle fut désarmée. A vrai dire elle s'y était attendue, bien sûr que l'elfe préfère avoir en face d'elle quelqu'un sans armes qu'avec, et préféra ne pas résista au geste de l'inconnue. Elle regarda son épée voltiger dans les airs avant de tomber avec un bruit plat sur la terre dure. La jeune fille ne répondit pas tout de suite à la deuxième phrase de son adversaire, laissant un silence flotter dans l'air pendant un bon moment. Nilù fut attentive à chaque mouvement produit par l'individue, chaque coup d’œil et chaque expression du visage. Puis, un sourire malicieux au coin des lèvres, elle estima le moment propice pour donner sa réponse :

Mais à présent la gondorienne commençait à se lasser de répondre à toutes les questions posées par l'elfe. Celle-ci semblait méfiante et hésitante, comme quelqu'un qui veut vérifier toutes ses hypothèses. Nilù s'agenouilla tout en ne perdant pas l'elfe du regard, craignant que celle-ci ne profite de son détournement de regard pour lui faire un mauvais coup, et ramassa son épée. Elle se releva et s'adressa poliment à l'inconnue :

Avant que ça dérive en menace, peut-être pas très menaçante car lancée par une gamine du haut de ses 1m60 :

Nilù ne se croyait pas pour autant invincible, mais elle savait qu'elle n'était pas des moins doués pour ce qui est du combat à l'épée. Depuis toute petite elle s'entraînait et possédait déjà un sens de stratégie assez élevé. À présent elle attendait la décision de l'elfe. Combat ou pas combat ? S'il y avait combat, ce serait certainement à cause de la malhonnêteté de l'inconnue qui aurait refusé d'avouer que le collier appartienne à Nilù. S'il n'y avait pas combat, alors l'enfante retrouverai son pendentif et c'est aussi que les deux pouvaient peut-être s'entendre. À voir maintenant.

Lorsque la fillette expliqua que les deux diamants étaient identiques, Kira ne put s’empêcher de sourire. Elle parlait aussi bien qu'une adulte, même si l'elfe lui trouvait un petit air de mademoiselle-je-sais-tout à cause de la formulation de sa réponse. Alors qu'elle commençait à penser qu'elle avait raison, une idée tout à fait plausible lui traversa l'esprit : l'épée n'appartenait pas forcément à la gamine. C'est alors qu'elle se surprit à imaginer le prix que vaudrait la pierre jaune. Elle continua de fixer l'humaine, en attente d'une réaction qui la trahirait, d'une quelconque faille, avant de se rendre compte que le fillette en faisait de même. Elle continua même de la regarder pendant qu'elle ramassait la petite épée.

Puis l'enfant lui demanda de ressortir le collier pour le lui rendre, avant d’enchaîner par une « menace » que Kira trouva assez peu convaincante. Elle sortit le collier en faisant rouler la pierre lisse sous ses doigts. Mouais c'est vrai qu'il irait plutôt bien à l'humaine... Elle songeât à lui rendre le collier sans faire plus d'histoire, au lieu de ça, elle se vit lancer le pendentif en direction de la fillette, assez fort. Mais il ne se brisa pas, ça n'était rien de bien méchant, elle l'avait fait exprès, elle n'était certainement pas la plus réfléchie et la plus sage des elfes, mais elle n'était pas la plus idiote, ou la plus méchante … enfin ça dépend avec qui.

Elle commença à repartir, en gardant son fidèle couteau à la main.

Pas combat !Bien sûr que la « menace » de l'humaine n'avait pas été très convaincante, mais au moins elle semblait avoir fait son effet. Les deux individues continuaient de se regarder dans les yeux, attendant une quelconque réaction l'une de l'autre. Alors que la fillette craignait une attaque de la part de l'elfe, celle-ci préféra juste lancer le pendentif droit sur Nilù. Celle-ci eut le réflexe de tendre la main et de l'attraper avant que le diamant lui atterrisse dans l’œil. Elle hésita à remercier l'elfe mais en revoyant toute la scène depuis le début, la jeune fille constata qu'elle n'avait absolument à la remercier. D'abord l'elfe longuement réfléchit avant de rendre son objet à Nilù, et de plus elle lui avait parlé sur un ton que la Gondorienne n'appréciait pas du tout. Après ce que lui lança l'inconnue, l'humaine répliqua avec un haussement de sourcils :

« Heureuse. »

Puis elle regarda l'autre partir, avant de se décider à en faire autant dans la direction opposée sans pourtant oser tourner le dos à l'elfe. Avant que Nilù n'ait le temps de faire quelques pas que l'inconnue la rappela. La jeune fille, et non pas la « gamine », se retourna et répondit froidement :

« Cela ne te regarde pas. Est-ce que je te demande moi, ce que tu fais ici et au beau milieu de la nuit ? Non ? Hé ben je pourrais ! »

Au début elle aurait voulut s'arrêter à la première phrase, mais elle s'enflamma au fur et à mesure de ses paroles qui finirent pas des moins désagréables. A la limite elle s'en voulut d'avoir dit ça d'une telle manière. Comme pour s'excuser, elle soupira :

« La gamine, sache qu'elle se nomme Nilù, et elle se rend à Imladris. Et toi ? Comment t'appelles-tu et que fais-tu ici ? »

Contrairement à l'elfe qui utilisa le terme de « fiche », la Gondorienne, elle, employa le mot « fais ». Certainement une cause de politesse ou d'éducation.

L'elfe en face répondit tout aussi simplement, sans donner trop de détails, non, surtout pas trop. Elle avait aussi employé les mêmes mots que Nilù, comme du copier-coller. L'humaine ne sut comment interpréter ceci. Comme une moquerie ? Peut-être bien...En tout cas, les deux individues semblaient s'être rapprochées seulement en se disant leur nom et leur destination, c'était déjà ça.

Lorsque la dénommée Kéliwë la corrigea sur sa direction, la Gondorienne se figea un instant, réfléchissant en se fiant à la lune. Il ne lui fallut pas trois heures pour comprendre qu'effectivement, elle s'était mal orientée. Cependant elle ne voulait pas avouer son erreur à l'elfe, cette elfe qui avait pris un air supérieur en lui lança cette remarque nonchalamment. Un « c'est vrai » puis un « tu as raison » restèrent tous deux étouffés dans la gorge de Nilù. Celle-ci ne pouvait prononcer les mots, elle ne pouvait donner raison à l'autre. Cependant elle ne pouvait pas non plus lui répliquer :  «  non c'est toi qui te trompe, je prends la bonne direction » puisqu'elle savait que c'était entièrement faux !  Alors, la jeune fille était bloquée, elle ne pouvait rien dire. Donc elle ne dit rien, absolument rien, et laissa l'elfe reprendre sa route. Nilù attendit qu'une dizaine de mètres se soient installés entre elles deux avant de commencer à la suivre lentement. Ce fut à ce moment-là que Kéliwë sembla parler à elle-même, sauf que la question avait l'air de s'adressa à la fillette. Celle-ci répondit :

« Non, pas fatiguée, je crois que j'ai dormi très longtemps. »

Arrivée devant l'arbre, Nilù emboîta le pas à l'elfe en se faufilant parmi les branches. Cependant l'humaine s'arrêta avant l'elfe alors que celle-ci continuait à grimper. La jeune fille s'adossa au tronc et dit à Kéliwë qui se trouvait maintenant installée 2 ou 3 mètres plus haut :

« Tu peux dormir. Je te l'ai dit, je ne suis pas fatiguée, je ne dormirai pas. »

Mais quand elle prononça ces mots, Nilù se rendit compte que l'elfe non plus ne voudrait pas dormir de la nuit. Celle-ci plissait les yeux et semblait à l'affût du moindre bruit. Elle ne céderai pas. Après un long soupir, la fillette s'exclama :

« Je ne fermerai pas l’œil de la nuit de toute manière, je te le promet ! »

Puis elle ne bougea plus, laissant tranquillement s'installer un doux silence dans la nuit noire.

Nilù tenait ses genoux entre ses bras. Plutôt détendue, elle attendait que la nuit passe doucement, perdue dans ses pensées. De légers bruits plus haut dans l'arbre lui indiqua que l'elfe bougeait. L'humaine leva la tête pour voir ce que l'autre faisait, et apprit que Kéliwë était seulement en train d'observer le ciel. La fillette ignora cela et repartit dans son esprit. Cependant quelque chose l'en sortit rapidement. Quoi donc ? Du bruit ? Non, bien au contraire, du silence. C'était très calme, bien trop calme. A vrai dire, cela ressemblait au calme avant une tempête. Nilù commença  légèrement à paniquer quand elle se demanda ce que pouvait être cette tempête. Elle n'avait déjà pas eu de chance jusque là lorsqu'elle et Zarielle furent attaquées par des voleurs. Étaient-ce encore eux la soi-disant tempête ? Cela, la Gondorienne l'apprendrait bientôt certainement.  Nilù se releva et se mit droite sur ses deux jambes plantés sur une branche de l'arbre, en trouvant d'autres prises de ces mains. Elle  brisa l'ambiance qui régnait depuis trop longtemps quand elle dit d'une voix quelque peu tremblante :

« Kéliwë...Tu ne trouves pas que cela devient un peu...bizarre ? »

Point la peine de préciser de quoi elle parlait, c'était bien évident. Nilù supposa que Kéliwë l'eut répondu, seulement elle n'entendit rien à cause du vacarme qui se produit à ses pieds. Baissant les yeux, la jeune fille distingua dans la nuit ce qui semblait être un troupeau d'araignées géantes. Celles-ci étaient arrivées en un rien de temps, mais malheureusement, ne partirent pas à la même vitesse. Dès qu'elles eurent dépasser l'arbre c'était comme si quelque chose les perturbait. Certainement avaient-elles sentit l'odeur de la chair humaine ou de la chair elfique. Nilù se figea et arrêta de respirer le temps que quelques unes des créatures humaient l'air. Comme si finalement elles n'avaient rien détectées, les arachnides reprirent leur chemin. Soulagée, l'humaine fit un « ouf » qui voulait tout dire. Erreur ! Les créatures rebroussèrent chemin et entourèrent le chêne. Alors que certaines commençaient à grimper, l'humaine ne fut pas longue à se précipiter dans les cimes des arbres. Elle se réfugia au plus haut possible et s'accroupit là, plissant les yeux pour repérer Kéliwë. C'était étrange, mais cette scène ressemblait fortement à celle avec Zarielle et les wargs. Mais cette-fois, Nilù était bien décidée à se battre contre ses ennemis. Elle lança deux de ses dagues qui allèrent se ficher en pleins cœurs de leurs cibles respectives. L'humaine saisit sa troisième dague et l'envoya de la même manière. Elle cria de stupeur lorsque l'ombre de ce qui semblait être Kéliwë croisa le chemin de la lame.

L'elfe baissa ensuite les yeux vers le sol, d'où venait un vacarme assourdissant. Ses yeux faillirent sortir des leur orbites quand elle distingua la source de tout ce boucan. Des araignées, des araignées géantes ! Que diable faisaient t-elles là ? Kéliwë mit un moment à réagir, la dernière fois qu'elle était tombée sur des araignées comme celles-là, elle avait faillit y laisser sa peau, alors que ces salles bêtes n'avaient pas perdu beaucoup des leurs. Oui, elle avait pensé pouvoir se défendre contre plusieurs choses, mais jamais elle n'avait imaginé qu'elle tomberait sur des araignées géantes !

Cependant, elle garda la tête froide et partit du principe qu'il valait mieux commencer par tuer les bestioles qui grimperaient les premières. Elle en transperça plusieurs. Alors qu'elle tendait son bras en arrière pour viser l'une des arachnides qui s'approchait dangereusement d'elle, un sifflement résonna à son oreille et sa joue droite devint soudainement douloureuse. Elle se tourna et leva la tête pour apercevoir Nilù, plus haut qu'elle, elle comprit que le sifflement et la douleur qui lui brûlait la joue, elle les devait à une lame qu'avait lancé l'humaine. Sans pour autant lui en vouloir, elle lui jeta un regard avant de se rendre compte qu'elle n'avait toujours pas tué l'araignée qui lui fonçait dessus. Mais c'était déjà trop tard. Une grande patte velue accompagnée de sept autres se posa sur la branche où était restée l'elfe. En un premier réflexe, elle donna un coup de pied dans les nombreux yeux de la bête. L'arbre devait être vieux, car la branche céda. Emportant l'elfe et l'araignée dans sa chute. Mais Kéliwë, malgré la totale confusion qui régnait dans sa tête, parvint à trouver assez de lucidité pour planter son couteau dans une branche au lieu de s'écraser au sol comme un fruit pourri. Elle se redressa, péniblement et commença à remonter vers les cimes sans se retourner. Elle porta une main à sa joue, celle-ci n'avait qu'une fine entaille, qui saignait pourtant beaucoup pour une si petite blessure. Ce trait sanglant tracé sur sa joue n'était que le cadet de ses soucis. Elle se sentait terriblement vulnérable, coincée dans un arbre cernée par des arachnides. Elle y avait échapper une fois, restait à savoir si elle aurait de nouveau cette chance, mais cette fois-ci, une petite chose qu'elle n'avait pas prévue était présente, une petite chose qui pouvait peut être faire la différence. Ou pas, sauf peut être si …

Elle ne voyait plus l'humaine, était-ce à cause de sa vision brouillée par ses affreux souvenirs ? ou bien parce que la jeune fille n'était réellement plus là ? Les deux raisons était tout à fait possibles. L'elfe se rendit compte que sa voix … avait trahit son anxiété, mais comme elle détestait paraître faible, elle prononça de nouveau le nom de l'humaine mais d'une voix bien plus assurée, une voix qui lui ressemblait tellement plus.

Un soulagement envahit la jeune fille lorsqu'elle se rendit compte qu'elle n'avait pas tué Kéliwë. Elle avait eu si peur lorsque cette ombre fut passée devant la lame qu'elle n'y croyait plus, à ce que l'elfe en sorte vivante. Celle-ci lui jeta un regard un fragment de seconde puis se retourna pour continuer de vaincre la bête qui l'attaquait. Pendant ce temps-là, Nilù s'occupa des quelques araignées qui ne montaient pas mais qui aidaient les autres à monter. Elles étaient les piliers de leur attaque en quelque sorte. L'humaine réussit à leur envoyer les quatre couteaux qu'il lui restait dans sa poche aux bons endroits, les quatre araignées visées moururent sur-le-champ. Pour la suite, la fillette devait prévoir un plan. Elle remarqua qu'un autre arbre était très près de celui où elle était. Avec stratégie, elle pourrait se balancer sur une branche souple jusqu'à sauter sur l'arbre d'à côté. Nilù grimpa donc de branche en branche jusqu'au plus haut du chêne. Ici les branches étaient très souples et ça devenait compliqué de rester en équilibre. Elle attrapa une branche dans chaque main et se balança d'avant en arrière jusqu'à avoir assez d'élan pour sauter. Son appui sur l'arbre n'était pas très bon donc malheureusement son atterrissage ne fut pas très contrôlé. Elle fut propulsée en avant contre le hêtre en face. Par chance, l'humaine se rattrapa de peu en agrippant le tronc fermement. Ensuite elle redescendit de ce nouvel arbre jusqu'à arriver à terre le plus discrètement possible. Comme la jeune gondorienne l'avait prévu, les araignées n'avaient rien capté à son action. Elles restaient toutes agglutinées au tronc du chêne, persuadées que l'elfe et l'humaine y était encore. L'humaine était partie, mais l'elfe...non ! Kéliwë était toujours bloquée dans cet arbre. Nilù entendit d'ailleurs qu'elle l'appelait. Seulement elle ne pouvait répondre, sinon l'attention des bêtes se tournait directement vers elle, trop facile à attraper maintenant qu'elle était à terre. A pas de loup, la jeune fille s'approcha du troupeau, et, lorsqu'elle fut très près, elle saisit un énorme bout de bâton par terre et l’abattit sur deux créatures en même temps. Sonnées, celles-ci essayèrent de faire quelques pas bien que ceux-ci ne sont pas droits, puis s'écroulèrent. Ayant observer leurs amies mourir, les autres voulurent leur vengeance aussitôt, et Nilù en paya cher. Une araignée lui bondit sur le dos, une autre la menaça de devant et tout le reste fit un cercle autour. La jeune fille ne perdit pas espoir, elle sortit son épée de son fourreau et d'un geste rapide de la main, l'enfonça dans la chair de la créature derrière elle. Un gémissement retentit puis plus rien, une ennemie de morte en plus. La lame encore pleine de sang traversa aussi la mâchoire du monstre devant. La gondorienne était débarrassée de deux de moins. Apparemment, ces deux-là étaient les « chefs », si l'on peut dire, de leur petite troupe car une fois celles-ci mortes, les autres ne pipèrent mot ! Les araignées restantes se regroupèrent et commencèrent à s'éloigner à reculons. C'était la première fois que Nilù voyait ses ennemis abandonner le combat et la craindre.

La jeune fille soupira, mais n'en oublia pas pour autant l'elfe restée dans le chêne. Elle y grimpa rapidement avant de retrouver Kéliwë, l'air surpris, comme si elle s'étonnait de revoir l'humaine. Celle-ci haussa les épaules et avec un sourire :

« Quoi ? Tu ne crois quand même pas que j'allais t'abandonner seule face à ces...créatures bizarroïdes ! »

La fillette ne répondit pas à son appel, aussi Kéliwë l’estima ou morte ou bien disparue dans la nuit. L’elfe s’adossa contre le tronc, toujours en équilibre sur une branche épaisse. Elle examina les petites plaies qu’avaient laisser les branches alors que sa chute la rapprochait du sol. Rien de très grave. Elle voulu cependant en examiner une qui lui paraissait plus profonde, mais elle n’en eu pas le temps. Une araignée bondit sur la branche en faisant trembler tout l’arbre. Il ne fallut pas longtemps à Kéliwë pour dénicher un couteau sous sa veste. La lame siffla et alla se ficher dans le corps de la bête qui se débattait en vain et finit par chuter du haut chêne.

Alors qu’un sourire commençait à faire remonter les coins de la bouche de l’elfe, une autre des ces bestioles voulu se remplir le ventre de chair elfique. Mais, contrairement à la précédente, celle-ci semblait bien plus robuste, plus forte … inquiétante. L’elfe eu à peine le temps de ressortir un couteau qu’elle se retrouva plaquée contre le tronc dur du vieux chêne. Elle savait ce qui allait suivre si elle ne faisait rien. L’araignée lui injecterait de son venin et la recouvrirait de son fil, ou bien elle la mangerait directement. Ces deux situations revenant inexorablement à sa fin imminente, elle se débattit comme un diable et tenta à plusieurs reprises d’enfoncer sa lame dans le corps hideux de la bête, cela lui fit juste gagner du temps. Mais alors qu’elle sentit l’araignée prête à en finir, celle-ci relâcha brusquement la pression de ses pattes, ne bougea plus pendant un instant, et descendit de l’arbre.

Kéliwë ni comprenait rien. Elle jeta un coup d’oeil vers le sol et vit le troupeau d’araignées s’éloigner. Elle ne comprenait pas plus, mais elle préférait largement cela plutôt que que se faire dévorer vivante. Lentement, elle se laissa tomber en position assise contre le tronc et reprit son souffle un instant. Elle s’essuya maladroitement le visage avec ses mains et ôta une branche qui s’était emmêlée dans ses cheveux. L’elfe ferma les yeux un instant et quand elle les rouvrit, l’humaine était revenue. Ses yeux s’agrandirent en témoignant de sa surprise qu’elle n’avait pas réussi à cacher. Nilù lui dit avec un sourire qu’elle ne l’aurait tout de même pas laisser seule face à ces “créatures bizarroïde”. Kéliwë détailla la fillette des pieds à la tête, la conclusion lui laissa un goût amer : la fillette était bien moins amochée qu’elle. Pendant une fraction de seconde, sa bouche se tordit en une grimace, qu’elle échangea contre une expression neutre. Elle se leva assez péniblement, mais elle e laissa aucune expression de douleur passer sur son visage : elle ne dirait rien à Nilù, rien de ce que la fillette n’avait pas vu : Kéliwë entrain de se prendre une belle raclée. Non, jusqu’à preuve du contraire, cette elfe tient énormément à l’honneur qui lui reste. Il lui était donc hors de question de perdre la face devant Nilù. Jamais. Et ça n’était pas parce qu’elle ne s’entendait pas au mieux avec l’humaine, non encore une fois, c’est une question de principes.

L’elfe avait eu plus de mal qu’il n’y paraissait, à le dire ce dernier mot, si court et si significatif. Elle récupéra ses couteau, toujours fichés dans le corps des ses victimes et se prépara à reprendre la route. Ou en tout cas, à trouver un arbre bien plus loin.

Apparemment, l'elfe ne voulait pas avouer que sans Nilù elle serait morte à cette heure-ci...Cela n'étonna pas beaucoup l'humaine, elle qui commençait à connaître le caractère spécial de Kéliwë. Elle lui répondit simplement puis fini sa phrase par un sourire :

« Ni morte, ni partie, je suis restée. »

Puis elle regarda l'elfe sautiller de branche en branche jusqu'à arriver à la hauteur de la Gondorienne. Celle-ci remarqua que Kéliwë avait du mal à la remercier...tant pis, se dit Nilù, ce n'est pas si grave, un merci n'est qu'un merci, un seul mot composé de deux syllabes. Et puis elle n'est pas quelqu'un qui demande à ce qu'on la remercie tout le temps, donc un merci pas très honnête ne la dérange pas vraiment. Pour accueillir tout de même le merci de l'elfe poliment, elle dit un peu gênée :

« De rien, c'était normal... »

De suite elle ramassa ses armes tout comme Kéliwë. Une fois le tout rassemblé, les deux habitantes d'Arda reprirent la route. Le matin n'était pas encore arrivé mais il ne tarderait certainement pas. Nilù ne fut pas très bavarde dès le début, de même que l'elfe d'ailleurs. Sauf qu'au bout d'un moment, la curiosité la démangeait. Elle ne connaissait rien de Kéliwë, absolument rien sauf qu'elle allait elle aussi vers Imladris. Venait-elle d'Imladris et revenait vers son pays natal ? L'humaine commença doucement, pour ne pas briser le silence trop brutalement :

« Dis...tu viens d'Imladris ? »

Là où elles étaient à présent, un fossé était à leur gauche, les séparant d'une aubépine. La jeune fille fit signe à l'elfe qu'elle allait faire quelque chose mais sans lui préciser quoi. Elle sauta par dessus le fossé et grimpa à l'aubépine en faisant attention de ne pas se piquer avec les nombreuses épines de cet arbre (comme l'indique son nom d'ailleurs).  Arrivée là-haut, elle arracha des feuilles, les fourra dans sa besace et redescendit. De retour à la terre ferme, Nilù expliqua à Kéliwë :

« J'ai pris des feuilles d'aubépine, cela peut être toujours utile. »

« Si une de nous deux se blesse, il n'y aurait qu'à couvrir cette blessure des feuilles d'aubépine et le sang arrêtera vite de couler. »

La jeune fille se souvint de la petite dame qui lui avait expliqué ça, alors qu'elle n'était qu'une petite marchande de Minas Tirith. Cela faisait quelques temps maintenant et Nilù s'en souvenait toujours. C'était une technique assez pratique et simple, mais la question de Kéliwë n'était pas sotte puisque c'est vrai qu'on ne soupçonne pas vraiment ces feuilles d'avoir des propriétés médicinales.

Quelques pas plus tard l'elfe s'exclama qu'elles étaient bientôt arrivées. Ce qui étonna le plus la jeune humaine, ce n'est pas que le point d'arrivée soit proche, car ça elle s'en doutait bien vu la distance qu'elle avait déjà parcouru depuis le Rohan, mais le plus surprenant était le ton de Kéliwë. Ce n'était plus ce ton méprisant qu'elle avait employé jusque là, mais une voix plus joyeuse et sympathique. Nilù sourit à cet événement miraculeux.

Le duo accéléra le pas, hâtif d'arriver à Imladris. Deux minutes passèrent avant passer dans la forêt, que l'elfe et l'humaine traversèrent sans s'y attarder, puis elles prirent le pont rejoignant la cité. Tout cela se fit en silence, comme si prononcer quelques mots les ferait ralentir. Arrivées en plein cœur de Rivendell, les deux individues s'arrêtèrent et Nilù se tourna vers l'Eldar en lui disant :

« Voilà, nous sommes arrivées. Je te remercie de m'avoir redonné mon collier et de m'avoir accompagné jusqu'ici. »

Un « c'est très gentil de ta part » s'étouffa dans la gorge de la jeune Gondorienne. Non, il ne fallait pas aller jusque là. Kéliwë n'a tout de même pas été gentille avec elle, ni même agréable. D'un petit mouvement de tête accompagné d'un sourire, Nilù salua l'elfe et lui dit au revoir. Après cela, elle tourna les talons et s'éloigna elle ne sait où, laissant son accompagnatrice seule au beau milieu de Fondcombe.