Chroniques d'Arda
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 Le temps a passé, l'elfe a changé.

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Meinor
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MessageSujet: Le temps a passé, l'elfe a changé.   Le temps a passé, l'elfe a changé. EmptyDim 24 Aoû 2014 - 22:03

dessin d'Elliandril Finduel:



   Les vagues attaquaient la côte avec une régularité affligeante. Fëascalen clapotait tant bien que mal pour atteindre la terre ferme. Seulement la fatigue engourdissait ses membres et la côte semblait prendre plaisir à fuir le marin. Enfin ses pieds frôlèrent quelques choses, redonnant des forces et de l’espoir à notre malheureux ! Ce dernier se faisait une joie d’enlever leur repas aux goélands qui le lorgnaient en criant depuis bien trop longtemps. Hélas l’elfe se fomentait : ce n’était pas le sol qu’il avait touché mais un simple rocher solitaire. Heureusement il n’en savait rien et lança ses dernières forces dans la bataille contre les éléments. Et rien, ne semblait-il, ne pouvait altérer ce fol espoir. Ni les eaux salées de l’océan qui brûlaient ses yeux, ni le soleil qui frappait son pauvre crâne et encore moins le courant qui le faisait tremper dans des flots glacés. Une chose peut être permit au doute de s’insinuer, le temps. Il avait perdu la notion du temps depuis longtemps et croyait flotter depuis des siècles. Le naufragé craignait donc, et de façon très légitime, que ses forces l’abandonnassent. Surtout qu’il avalait de plus en plus l’eau salée et elle n’était pas du tout à son gout ! Une quinte de toux le prit alors qu’une vague plus forte que les autres tentait d’envahir ses poumons. Après cet arrêt, où sa gorge s’enflamma, il s’aperçu que du sable s’étendait sous ses pieds. Un sourire, ou du moins le rictus que ses lèvres enflées lui permettaient, apparut sur son visage. Sa progression fut de plus en plus rapide jusqu’à ce que l’eau atteigne ses genoux. A partir de ce moment là, son corps commençait à refuser les ordres qu’envoyait son cerveau. Ses jambes tremblaient, et ses yeux hagards cherchaient le courage de continuer dans l’or de la plage. Finalement des larmes coulèrent sur ses joues brûlées par le soleil. C’était vraiment trop bête ! Le salut était si près ! Il lui semblait pourtant inaccessible… Grâce à l’énergie du désespoir il parcourut une partie de la distance debout avant de finir le reste en se trainant lamentablement sur le sol. Comme il se croyait hors de danger il se laissa reprendre haleine dans un cri, laissant son visage s’écraser dans le sable et ramener sa joue vers son nez dans une position peu confortable et particulièrement élégante. Puis bercer par les clapotis des vagues, il se laissa sombrer dans les bras de Morphée sous le regard curieux d’une mouette.
*
*      *
   De l’eau coula sur son visage. Une immense terreur le saisit : la marée montait et l’océan semblait vouloir réclamer son dut. La mort planait au dessus de lui, lui qui avait échappé à cette funeste camarade un nombre incalculable de fois ne devait pas survivre à cette énième rencontre. Son destin devait se réaliser dans cette fin solitaire, englouti par les eaux. Il avait tout fait pour contrer cette macabre destinée mais il devait mourir aujourd’hui, qu’il le veuille ou non. Ceux qui avaient frôlé la mort racontaient que toute sa vie se rejouait devant leurs yeux ou que ses êtres chers décédés apparaissaient, de quoi atténuer la solitude dans ses derniers moments. Mais pour Fëascalen rien de tout ça, juste la peur ! Dans toute son horreur, inéducable et tragique… Les désillusions se mêlaient aux souffrances que son corps lui infligeait pour garder quelques instants de plus de la vie dans ce cadavre. Son estomac noué, ses sueurs froides et une fièvre maladive le faisait trembler alors que son esprit regrettait de n’avoir jamais connu l’Amou… Mais alors qu’il y pensait quelque chose l’interpella (Evitant ainsi un pathétique discours à l’eau de rose sur le sujet millénaire… On l’a échappé belle !). En effet, il ne sentait plus le sable qui déformait son visage. Certes il avait pu se tourner pendant son évanouissement, mais ça n’expliquait pas l’eau qui s’écoulait de son front vers sa bouche. Et sa bouche asséchée le poussa à gouter ce liquide inconnu. L’eau claire lui écorcha la langue et brûla sa gorge mais lui rendit le sourire. Sa soif quelque peu assouvie et sa peur évanouie, il tenta de voir ce qu’il se passait. Profitant que la cascade s’arrêta, il ouvrit un œil. D’abord il ne vit rien, si ce n’est des milliers de cercles multicolores tournant sans discontinuer. Mais quelques gouttes tombèrent dans ses yeux, lui ravageant la rétine. Il étouffa un cri et une voix interrompit le bourdonnement constant de ses oreilles :
« - Ah ! Enfin on se réveille ! Comment-vous sentez vous ? »
  Cette fois il découvrit son environnement : une vieille cabane de pêcheur avec des murs de torchis. Du plafond s’infiltrait la lumière de la Lune et des étoiles. Peu à peu les détails se firent plus nets et il découvrit un filet de pêche qui pendait des poutres. Au dessus de son visage vint se poster une tête difforme l’empêchant de regarder plus. Il tenta de s’asseoir mais dut se résoudre à rester coucher. En désespoir de cause le blessé s’intéressa à la chose qui se penchait sur lui. C’était une vieille dame, avec un menton volontaire plus poilu que son crâne. Ses yeux semblaient chercher une lumière disparut depuis longtemps et sa bouche des dents toutes aussi absente. Des rides et une verrue complétaient le tableau. Encouragé par un « sourire » de son hôtesse, il répondit enfin :
« - Euh… A première vue je crois… Mais où suis-je ?
- Dans le royaume du Gondor. Sur la côte de Belegear. A mon tour de posé des questions : pourquoi vous amusez vous à tendre des pièges aux vieilles dames ? »
   Des pièges ? Damned je suis chez une sénile ! Ceci dit c’est une bonne question… Qu’est ce que je faisais au milieu de l’eau ?
« - Bon déjà j’étais loin de m’amuser, et ensuite je n’ai plus beaucoup de souvenir avant d’être en vue de la plage… »
   L’humaine avait peu de distraction et elle ne comptait pas le laisser s’en tirer comme ça ! Malgré son début de cécité, elle inspecta les traits de son invité. Grand et squelettique, il avait des traits durs et le teint halé par un long séjour en mer. Des cheveux blancs coupés courts à la mode des marins et un nez gaulois. Elle ne vit pas la couleur émeraude de ses yeux, ni sa peau plissé à cause de son long séjour dans l’eau. Et encore moins sa nature elfique, bien qu’elle commençait à avoir des doutes… Elle décida donc de l’aider à retrouver sa mémoire.
«- Racontez moi votre vie d’aussi loin que vous vous souvenez. »
   L’interpellé réfléchit et commença son récit. Pour avoir le plus de temps de réflexion, il fit un discours long et précis. De son enfance heureuse, de ses vagabondages en Terre du Milieu, de ses services auprès d’Elrond et enfin de l’acquisition du Raegil… Oui, ça lui revenait :
« - La jeune fille, Ewalann, disparut en Umbar. Nous sommes donc en Lindon un peu dépité par la perte de la manne financière qu’elle représentait. Finalement nous trouvâmes quelqu’un pour nous soutenir financièrement. »
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MessageSujet: Re: Le temps a passé, l'elfe a changé.   Le temps a passé, l'elfe a changé. EmptyMar 26 Aoû 2014 - 12:03

~*~ ~*~ ~*~ ~*~ ~*~ ~*~
Analepse
~*~ ~*~ ~*~ ~*~ ~*~ ~*~
   Le Raegil patientait dans la rade depuis une longue semaine. Personne ne semblait intéresser par ce navire géant. Son capitaine arpentait les Havres désespérément pour trouver de quoi payer un nouveau voyage vers l’orient. Cette fois ci, Fëa et ses seconds sirotait l’air morose une bière dont la mousse avait disparu depuis longtemps. Ils inspectaient la taverne pour trouver un pige… Un armateur potentiel. Il y avait une petite dizaine de personnes qui parlait ici, mais trois seulement était suffisamment sobre et, à première vue, suffisamment riche pour être intéressant. Ils prirent chacun une des personnes présentes. Fëascalen se retrouva avec un vieux loup de mer fumant la pipe et arborant un cache-œil factice. L’ancien officier poussa sans ménagement la chose informe qui avait abusé d’alcool et commença la conversation. Après quelques répliques sur le temps, la conversation prit le tournant voulue. S'en suivit une âpre discussion, l’armateur déclina finalement l’offre et laissa notre ami pantois. L’autre s’en alla, permettant à Murëe de prendre sa place. Le second n’ayant pas, lui aussi, réussit la négociation avec un grand dadais à l’air sombre. L’air penaud ils attendirent le retour du troisième larron. Ce dernier mettait beaucoup de temps et Fëa lança un coup d’œil qui se voulait discret dans sa direction. La conversation semblait animer mais en bonne voie ! Le jeune marchand aux origines suderones semblait un habile négociateur ! Heureusement Orsil revint vers eux un sourire aux lèvres. Le contrat était signé, départ le lendemain avec une cargaison de fûts de bière. Ils reçurent une somme conséquente avec le reste payé au retour. Mais malgré leur nouvelle fortune, les marins ne firent pas de fête, de peur de rater le départ tant attendu. Finalement la nuit s’étira sans apporter son lot de problème et quand le soleil perça la brume planant au dessus de l’eau, le navire commença son long périple.

   L
a molle brise poussait la lourde nef par à coup, laissant la majorité du travail au courant et à la marée. L’équipage patientait tranquillement, se laissant porter à la douce oisiveté qui précédait l’harassant travail de marin. Le capitaine respirait avec délice l’air frais qui descendait des montagnes, transportant un doux parfum de plantes. Et devant lui s’étendait sans limite un océan calme mais l’immense disque de feu rendait cette eau tranquille une âme joyeuse et sympathique. Pour terminer ce tableau, le ciel était peuplé de nuages rouge ou rosé surmonté de tour d’un blanc immaculé. Ces habitants du ciel semblaient si légers dans cet environnement amical, pourtant on devinait la puissance qu’ils refermaient. Mais on ne fit pas attention à ça, les nuages filaient dans le ciel dans la direction opposé. Au sud, il n’y avait que du bleu, entre la mer et le ciel si bien qu’à l’horizon on ne savait les dissocier. Un léger sourire se peint sur le visage de l’elfe. Tout allait bien se passer, il en était sur ! Le vent se fit plus présent maintenant qu’ils s’éloignaient de l’estuaire. Un doux zéphyr venant du nord soufflait gaiement et l’officier ordonna que l’on descende les voiles. Pendant que ses hommes grimpaient le long des cordages pour les libérer, Fëa poussa sur son gouvernail. Son navire commença docilement à tourner vers le sud. Puis les voiles délivrées de leurs entraves se remplirent de la brise et le navire accéléra, traçant un profond sillon d’écume. Mais alors que tous s’occupait à diverses taches, un événement imprévu mis le doute dans les esprits des plus superstitieux. Une mouette s’effondra sur le pont et, après une courte agonie, rendit son dernier soupir. Un silence oppressant prit possession du navire, tous les regards fixés sur cet étrange spectacle. Soudain un des marins cria :

« - L’oiseau des tempêtes est mort ! Nous allons tous périr ! »

   D
’un geste son capitaine lui intima le silence. Il n’était pas superstitieux, il avait d’ailleurs pas eu de scrupules à engager des dames qui auraient du lui porter malheurs, mais il fallait éviter que la solitude ne provoque la recrudescence de tel propos. Il invita donc Murëe à prendre la barre et descendit sur le pont redevenu silencieux. Calmement il entra dans le cercle qui s’était formé autour du cadavre. Toujours sans mot dire, il tira sa lame.

« - Ecoutez-moi ! De quoi avez-vous peur ? D’une vulgaire mouette ? Si cet idiot de volatile est mort sur notre pont, ça ne veut pas dire qu’il voulait nous entrainer dans les profondeurs de l’océan. Alors reprenez vos esprits, quand à ce fichu oiseau, voici ce que j’en fais ! »

   I
l planta sa lame dans le ventre de l’animal et l’envoyer bastinguer par-dessus bord. Le corps valsa dans l’air matinal comme si il dansait une dernière fois, puis disparut du champ de vision des elfes, happé par une vague. Un cri d’angoisse s’échappa de l’homme crédule, il s’attendait que tout le navire soit foudroyé sur place. Devinant sa pensée son supérieur, avec un sourire, lui montra qu’à priori il n’était pas mort et que ses craintes étaient infondées.

« - Aller, retournez à votre poste ! Et le premier qui fera allusion à ça aura à faire à moi ! »

   P
our appuyer ses dires Fëascalen prit son air le plus sérieux, une main posé sur le pommeau de sa lame, et fit le tour de l’assistance. Ils semblaient avoir reçu le message et quand il remonta pour reprendre la barre, chacun reprit sa place. Le froussard marmonna des phrases inintelligibles mais dont on comprenait à peu près le sens avec son intonation : je vous aurais prévenu. L’accident serait vite oublié pour la plupart d’entre eux, mais pas pour tous. Et l’officier craignait qu’à chaque incident ses derniers rappelleraient à leurs bons souvenirs cet événement. Risquant de provoquer la panique chez les plus faible et à tout l’équipage ensuite, la terreur étant contagieuse. Il ne restait plus qu’à espérer que rien n’arriverait pendant leur périple pour que les superstitieux se rassurent enfin mais Fëa prit conscience que ceux là allaient lui rendre la vie difficile. Il soupira en reprenant la barre sous le regard approbatif de son second, conscient que son ami avait fait la meilleure chose à faire.

   Le reste de la journée se passa sans encombre, chacun s’affairant à sa tâche ou se reposait dans leurs cabines.  Le moteur n’avait pas été mis en marche car la côte était encore proche, mais la brise ne faiblissait pas et il aurait été idiot de fatigué l’équipage pour rien. Le soleil continuait à grimper dans le ciel maintenant immaculé et quand il fut au zénith, le clapotement des vagues fut interrompu par une cloche. Seulement un coup, sec et métallique, mais toute une musique pour les pauvres hères affamés. Armés de leur gamelle, ils se mirent en file indienne pour recevoir leur repas. Et comme à chaque fois une lueur de déception quand le déjeuner atterrissait dans leurs mains, un bout de lard se perdait au milieu de fruits secs et d’une tranche de pain dur, le tout baignant dans une sauce froide aux épices. Seul éclaircie dans ce morne plat, un biscuit. Un simple biscuit qu’il ne fallait pas oublier de mettre à part avant qu’il ne prenne le peu de gout qu’offrait le plat. Après ce moment d’excitation, le calme revint sur le navire qui continuait tranquillement sa route vers l’orient. Les heures passèrent, laissant les jours se ressemblés invariablement. Et rien ne semblait pouvoir détruire la tranquille routine du navire. Pourtant une fois qu’ils atteignirent les eaux suderones, une tension palpable s’insinua dans le cœur des marins. Des pirates infestaient ses eaux, et le capitaine décida donc de doubler les sentinelles. Ces moments solitaires et ennuyants s’inscrivirent rapidement dans la routine du navire. Et sans que l’on ne s’en aperçoive, la vigilance s’émoussait doucement. En effet maintenant que l’on avait veillé des heures durant à se fatiguer les yeux sur l’immensité vide de l’océan, le danger semblait écarter définitivement. Surtout que la lune leur permettait de voir comme en plein jour, les forbans n’avaient donc plus rien d’inquiétant.

   Le voyage se passait donc sans anicroche, un vent propice, une mer calme et un temps superbe. Seulement le ciel d’un bleu immaculé ne devait pas les accompagner pendant tout le voyage. Au début on n’aperçut qu’un nuage solitaire, blanc et petit, il n’avait rien de bien méchant. Mais ce n’était que l’avant-garde d’une vague grise. Derrière lui vint s’ajouter des centaines d’autres pèlerins de plus en plus sombre et de plus en plus haut. De la nef, les marins admiraient les structures cotonneuses qu’arboraient les cumulus. Perdant leur temps à essayer de déterminer ce qu’elles représentaient. Hélas, les nuages qui passaient d’abord au loin, reçurent des renforts et à la nuit tombée le soleil était caché par cette couverture menaçante. Les sentinelles se mirent en place, cherchant désespérément un moyen de discerner quelques choses dans les ténèbres avoisinant. Mais les ténèbres ne voulaient pas dévoiler l’intimité de leurs flancs et, le froid aidant, la surveillance se fit moins sévère à mesure que s’engourdissait leurs paupières. Par quel miracle les pirates ont-ils vu le navire ? Un furtif rayon de lune ? Une lumière oubliée qui brillait comme une étoile dans cette nuit sombre ? On ne le saura sans doute jamais, ce qui est sûr c’est que le garde du pont avait perçut des légers clapotements. D’abord lointain et indistinct, la rumeur enfla et les ténèbres vomirent un navire toute rame dehors qui ne semblait pas amical. Il cria et fit sonner l’alarme pour que ses compagnons se réveillent. Mais pendant ce temps, les rames de l’ennemi plongèrent dans l’eau glaciale et il accéléra comme pour éperonner le Raegil. Et c’est ce qu’il fit, dans un fracas de fin du monde, le bout de métal qui dépassait de la proue sous la ligne de flottaison entra avec toute la puissance de la nef dans le ventre du grand vaisseau. Les planches craquèrent et l’eau pénétra avec forces dans la brèche pendant que les suderons s’extirpaient des entrailles de leur victime. Et sans attendre la réaction des autres, les flibustiers pivotèrent pour que l’éperon soit en oblique à une partie encore saine du navire. Quelques secondes plus tard un nouveau choc ébranla le crapaud alors qu’une nouvelle fissure apparaissait dans son flanc et que le bateau adverse se mettait parallèle, près à l’amarrer. Du côté des elfes, la surprise était totale. Déjà les niveaux sous la ligne de flottaison avait été condamné pour que l’eau ne s’infiltre pas plus haut. Quand aux marins ils s’étaient massés pour faire leur fête aux attaquants, les archers au milieu du pont, protégés par les fantassins. Fëascalen était fou de rage sur le château du navire, entouré de ses lieutenants. Soudain les elfes qui attendaient en silence, qui était seulement interrompu par les tourbillons d’eau qui coulaient leur navire, sursautèrent à la dizaine de gémissements du bois : un pour chaque grappin. Deux se fixèrent là où patientait le capitaine. Sans réfléchir, bouillant de colère, ce dernier sauta vers le plus proche et abattit sa lourde épée sur la corde. Son visage se décomposa sous le choc alors que sa lame et ses bras vibraient de douleur. Quand à la ficelle, elle avait une entaille mais tenait bon ! Le goudron qui l’entourait faisait bien son travail. Le visage blême, les mains crispées sur le pommeau de son épée, il reprit en criant son travail. Dans le flot d’injures qui le soulageait de sa douleur, les archers entendirent le signal qu’il avait convenu et plusieurs dizaines de flèches s’envolèrent pour moissonner les rangs ennemis. Quelques cris percèrent dans la nuit avant de se perdre, mais la plupart des flèches avaient seulement abimé la peinture des boucliers. En réponse, des traits s’abattirent sur le pont sans causer de perte, les fantassins interceptant de leur écu le peu de projectiles dangereux. Puis les premiers haradrim apparurent en haut des cordes. Sans hésiter, les défenseurs les abattirent.  Le bruit des corps tombant avec fracas dans l’océan fut suivit par un cri de joie : Fëa venait de couper la corde du grappin ! Ses bras lui faisaient mal et sa tête lui tournait, il avait tellement levé sa lame, encore et encore, tapant parfois dans le bois de son propre navire. Il se laissa quelques secondes de répit pour récupérer, les yeux dans le vague.

   Un cri le sortit de sa torpeur, profitant de la diversion offerte par l’autre navire, d’autres charognards venaient participer à la curée. Déjà une dizaine avait pris pied attaquant les archers par derrière. Ces derniers abandonnèrent leurs arcs pour tirer leurs épées. Les elfes venaient de perdre un avantage non négligeable et maintenant que les traits ne maintenaient plus à distance les premiers pirates, ils avaient eux aussi jeté leur force dans la bataille. Sur le pont la mêlé ne permettait pas de savoir qui allait l’emporter. Mais la nuit s’illumina soudainement, les attaquants avaient mis le feu aux cordages et tentaient d’en faire de même avec le mat d’artimon. Le commandant eldar reprit ses esprits et lança ses ordres. Ses seconds le protégeant et détruisant les grappins qui avaient osé s’agripper au château. Il s’arma de son arc et couvrit du mieux qu’il put la retraite des archers, prenant un malin plaisir à tuer ceux qui voulait détruire son mat. La discipline des elfes permit que cette prudente retraite ne se transforme pas en déroute. Pour les flibustiers la partie semblait gagnée, mais les fantassins acculés aux escaliers tenaient bon et bientôt des sifflements percèrent l’air. Des assaillants s’effondrèrent, puis d’autres et les survivants commencèrent à reculer. Fëascalen avait repris sa fidèle lame, et descendait avec d’autres fantassins laissant les archers continuer leur massacre. Puis le sabre au clair, il chargea suivit de ses hommes. La peur se lisait dans les yeux des pirates qui voyaient ses fous furieux chargés contre eux. Le cri de haine des elfes s’éteignit dans le fracas des armes, et une minute plus tard la défense ennemie s’effondrait. Les épéistes achevèrent ceux qui n’avaient pas eu la chance de fuir ou de mourir avant pendant que les archers tiraient sur les bateaux fuyards, butant le feu à l’un d’eux. Les flammes léchèrent les cordes et embrasèrent la voile qui tomba sur le pont, permettant au petit incendie de devenir un immense brasier. Des hurlements de douleur précédèrent de peu le bruit des éclaboussures. Mais dans l’eau or et rouge, les survivants ne tiendraient pas longtemps. Entre le mat qui passait par-dessus bord, assommant les moins rapides, et le tourbillon que créera le navire quand il s’enfonçera dans les profondeurs de l’océan. Quand à l’autre navire pirate, des dizaines de flèches ne réussirent pas à le faire rejoindre l’autre nef. Il s’en sortit donc, laissant les elfes voir les dégâts de leur nef. Finalement, Murëe vint faire sont rapport. Son visage rarement gai semblait encore plus désespéré maintenant :

« - Capitaine ! »

   Une expression d’horreur se lit sur les traits du commandant, ce triste sire ne l’appelait jamais comme ça sauf si il y avait un problème. Un frisson le prit et il soupira : il s’attendait au pire.

« - Capitaine, les deux derniers ponts sont inondés et celui du milieu a plus d’un mètre d’eau. Nous gitons donc à bâbord mais la situation semble s’être stabilisée. Les haradrims ont provoqué plusieurs débuts d’incendie, une dizaine en tout. Le cordage est en piètre état et le mat d’artimon ne tiendra pas une tempête. Nous avons perdu quinze hommes et autant de blessés dont six graves. »

   Q
ui de mieux que lui pour annoncer d’aussi mauvaises nouvelles de façon aussi impersonnelle ? En attendant la situation était critique, et il chercha une solution accoudé au bastingage, les yeux perdus dans les flammes qui finissaient de consumer le navire adverse. Machinalement il suivit une étincelle qui partait à la conquête du firmament mais alors qu’elle s’éteignait il s’aperçut qu’au dessus d’eux patientait tranquillement des nuages menaçants. Alors pour la première fois, le capitaine craignit pour leurs vies à tous. Le moteur n’était pas utilisable car sous l’eau et la voile risquait d’emporter le mat si les cordages ne se rompaient pas avant. Et il ne pouvait attendre car les cieux se faisait plus menaçant et le vent porteur de mort et de souffrance. Son navire ne survivra pas à cette tempête qui se préparait, il fallait rejoindre la côte… En désespoir de causes il se dit que ses voiles pourraient l’éloigner de la zone de turbulence. Si elles devaient être hors d’état de servir, autant que se soit en les sauvant plutôt qu’en les accompagnants dans les abysses.

« - Sortez les voiles, les autres vont vider le pont de la machine. » Les petits seaux ne suffiront pas à changer quelque chose, mais le capitaine voulait avant tout empêché ses hommes de se décourager. Ce travail les aiderait parfaitement à faire abstraction du danger. «  Aller tous au travail notre survie en dépend !

- Nous allons tous mourir de toute façon, l’oiseau des tempêtes nous avais prévenu »

   C
elui qui avait dit ça se dirigeait vers les ponts immergés. D’un coup d’œil, on l’amena devant son chef. Ce dernier hésitait sur la façon de réagir… Il avait dit qu’il punirait ceux qui y ferait allusion, seulement il ne pensait pas qu’il aurait à le faire. Et dans cette situation critique il fallait montrer qu’il maitrisait toujours la situation sinon ce serait la mort assuré ! Bon oublions de le tuer, il y a déjà eu assez de mort aujourd’hui. Le mettre au fer ? Quel fer… Et puis on a besoin de tout les bras disponible. Le mettre au pain dur et à l’eau ? Encore faudrait il qu’il soit là pour le prochain repas… Restait les coups de fouet et autres mutilations dont Fëa n’était pas friand. Pourtant il fallait agir, tout le monde l’avait entendu et il ne pouvait faire la sourde d’oreille. Son esprit cherchant vainement une porte de sortie tout en maudissant ces hommes qui venaient vers lui beaucoup trop vite à son gout… Et impossible de demander au deux autres leurs opinions sinon on le trouvera sadique à discutailler sur son sort en présence du malheureux.

« - Surtael ? J’avais prévenu que ceux qui remettraient cette affaire sur le tapis auraient à faire à moi… Tu l’as fais, tu vas donc en subir les conséquences en toute connaissance de cause. Quelques choses pour expliquer ton acte ? »

   E
t hop ! Quelques secondes de gagnées ! Mais cet idiot n’était pas bavard et ne desserrant même pas ses lèvres, il attendait le verdict. L’indécision du capitaine commençait à se faire sentir quand il se décida. Ne voyant rien d’autres à faire il lui assaini un puissant crochet du droit dans le visage. Le superstitieux recula en se tenant la mâchoire, un fin filet de sang coulait de sa bouche entrouverte. Cette solution lui permettait de garder son autorité sans ternir le respect des marins.

« - Ainsi à chaque fois que tu mangeras, tu te rappelleras que l’oiseau des tempêtes était un vieux sénile qui c’est trompé de navire. Et maintenant au travail !»

   L
es voiles s’abaissèrent, et le vent poussa le navire avec force. Un craquement fit craindre le pire à l’équipage mais le mat semblait tenir. Les seaux reprirent leurs danses, envoyant bastingué l’eau pour atteindre le pont à demi submergé. Seulement le vent n’était pas encore fort, et une rafale plus puissante que les autres mit fin à la vie du mat. Un cri déchirant retentit alors que le bois s’écrasait sur le pont. Un elfe avait été écrasé par la lourde voilure. Plusieurs marins se précipitèrent pour le dégager pendant que d’autres tentaient de le basculer,  à l’aide de haches, dans la mer. Finalement, ils se mirent à quinze pour que le mat daigne quitter le navire. Fëascalen regardait avec tristesse cette partie du navire s’éloigner et disparaitre dans les flots. Le pont semblait vide sans lui, et la vitesse du navire fut considérablement réduite. Et comme si ça ne suffisait pas, la pluie et la houle décidèrent de s’inviter : la tempête arrivait. Il était trop tard pour atteindre une anse ou un port, seulement la chance pourrait les sauver. Orsil et Murëe prirent la barre et se placèrent de façon à être face au vague. Ainsi ils ne risquaient pas de chavirer. Le capitaine alla voir le blessé et s’aperçut rapidement qu’il n’y avait plus rien à faire. Touché à la tête il mourut dans les bras de son ami. Il l’installa dans la salle des cartes avec les autres cadavres. Les autres s’accrochèrent du mieux qu’ils le purent, et où ils purent, pour que l’eau ne les emporte pas. Fëa porta son choix sur le mat avant, après avoir fermé l’accès au pont inférieur pour que l’eau n’y pénètre pas. De son poste d’observation, le capitaine assistait à un spectacle terrifiant. D’abord voir la proue s’élever vers les cieux, sans qu’elle ne veuille redescendre vers les abysses. Finalement elle se décidait à glisser sur la crête et se précipitait dans le creux, comme pour s’enfoncer dans l’océan. Quand une vague traîtresse suivait de près la précédente, des trombes d’eau déferlaient sur les marins qui priaient pour que les boots tiennent. Hélas pour notre héro, ses filins lâchèrent et ce sera donc à la force de ses bras que Fëa survivrait… Ou non ! L’eau de mer rendant ses prises glissantes. Ainsi, une vague plus abrupte que les autres le décolla du sol, flottant au vent. Le navire redescendit et le capitaine embrassa donc, plus de force que de gré, le mat. Mais une lame passa au dessus du bastingage et l’arracha de son support. Tel un fétu de paille, il rebondit sur le pont de sa nef pour finalement s’accrocher à la porte branlante de la salle des cartes. Mais une nouvelle secousse la fit sortir de ses gonds et l’envoya bastingué sur l’océan déchainé. Le malheureux s’accrocha désespérément à ce radeau de fortune en espérant que la tempête se calme. Et il vit avec horreur le navire, son navire, s’éloigner vers une destination inconnue de tous. Quand à lui, seul au milieu des eaux déchainées, il tremblait de froid, ses vêtements trempés. Et peu à peu, sans qu’il ne s’en rende compte, les vagues se firent moins fortes. Il put ainsi survivre à ce grain particulièrement désagréable. Le soleil apparut à l’est, déjà haut quand les derniers nuages disparurent. Les nerfs à fleur de peau, il s’effondra sur son canot rudimentaire, sombrant dans un sommeil sans rêve.


*
*   *

   Un cri perçant le sortit de son songe. Un volatile le surveillait, sans doute pour savoir s’il pouvait lui manger un œil sans risque. La mouette déçue repartie en braillant pour lui montrer son désarroi. Encore mal réveillé, Fëascalen tenta de se mettre debout sur sa frêle esquif avant d’abandonner. Il avait froid, ces vêtements humides se collant à sa peau, et un bain ne l’inspiraient guère. Il avait faim lui aussi, et sa gorge seiche lui faisait mal. Mais ne pouvant assouvir ni sa soif ni son estomac, il se fit une raison et fit un tour de l’horizon, une main sur son front pour protéger ses yeux du soleil. L’océan semblait sans fin, le ciel avait recouvert son bleu vierge de tout nuage. Mais si un oiseau l’avait embêté, ça voulait dire qu’il y avait de la terre ferme assez près de là où il dérivait. Il se mit en quête de la moindre information pouvant lui indiquer une direction. Finalement il crut apercevoir à travers la brume des falaises, ou une côte. L’elfe se mit à pagayer du mieux qu’il put mais le courant l’emportait vers le large. Sentant que c’était sa seule chance il quitta sa rassurante embarcation pour barboter dans l’eau gelée. Se battant pour rester à la surface et vaincre cette peur irraisonnable qui le tiraillait, celle de se faire dévorer par un de ses monstres marins qui peuplent les légendes. Aucun squale ne devait patrouiller dans ces eaux car il sentit un rocher sous ses pieds, puis quelques minutes plus tard le sable. Et le voici devant elle !
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Fin de l’Analepse
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Meinor
Gourou Noonoob / Recrut'Noob

Meinor
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MessageSujet: Re: Le temps a passé, l'elfe a changé.   Le temps a passé, l'elfe a changé. EmptyVen 29 Aoû 2014 - 22:26

   Il raconta donc son aventure, omettant les moments où la peur le tiraillait car un capitaine elfe n’avait pas peur ! Quand il eut finit elle hocha la tête, satisfaite du récit qu’il venait de lui offrir. Puis sans mot dire elle partit au dehors pour revenir quelques secondes plus tard, un poisson dans une poêle. Son estomac accueillit ce repas avec de grands bruits et si ses muscles le lui avait permit, il se serait jeté dessus. Mais il était encore trop faible pour s’asseoir et la vieille l’aida à manger. Elle eut la sagesse de d’abord le faire boire de l’eau, l’empêchant de boire trop goulument puis enfonça la cuillère dans sa bouche comme pour le gaver. Le poisson avait quelques arrêtes mais petites et elles passèrent sans mal. Sa chère n’était pas particulièrement raffiné et sa cuisson encore moins mais il ne fit pas son difficile. Une fois qu’il eut finit son repas il s’effondra. La femme le laissa dormir et sortit, le laissant seul avec ses rêves. L’elfe se voyait bercé par les vagues, réchauffé par la douce lumière du soleil. Mais le songe se transforma vite en cauchemar. Des eaux surgit un vieux navire, en si mauvaise état qu’il mit plusieurs seconde avant de s’apercevoir que c’était le Raegil. La nef fonçait droit sur lui, sa voilure pleine de trou bombé par un vent fantôme. Le choc l’envoya valsé dans les airs et l’eau froide le happa. Fëa frissonna quand il sentit quelques choses lui entourer la cheville. Etouffant un cri, il se rassura en s’apercevant que ce n’était qu’une algue.  Mais il fut reprit par la terreur quand sous l’algue apparut un monstre démonique. Ce dernier l’attrapa par la jambe et le tira vers le fond. Malgré tout ces efforts il ne pouvait rivaliser de force avec l’être marin. C’est donc plein de désespoir qu’il vit la surface s’éloigner malgré tous ses efforts. Il se réveilla en sursaut, trempé de sueur et la respiration haletante. Il comprit qu’il ne serait jamais guérit de son aventure et il resta le reste de la nuit éveillé, à réfléchir sur ce qu’il allait faire. 


*
*  *

   Le soleil s’éleva au dessus de la Terre du Milieu. Il s’assit avec peine et chercha du regard son hôtesse. Elle avait disparut mais l’elfe aperçu un plat remplie de pain et de fruits secs qui patientait en bas de son lit. Il mangea sans grand appétit et remit le plat en place. But un verre d’une liqueur étrange et au bout de quelques secondes il dormait paisiblement. Pendant une semaine il ne fit que manger, boire et dormir. Il récupérait ainsi assez de force pour se lever et il se mit à aider la vieille dame. S’occupant du bois, de la réparation du toit, des murs… Et il profitait de son temps libre pour s’entrainer un peu pour recouvrir sa forme d’avant. Tout en réfléchissant sur son avenir. Que ferait-il une fois qu’il aurait retrouvé sa force ? Il n’avait pas d’armes, impossible donc de chasser ou de se protéger. Et puis une fois qu’il aurait tout ça où irait-il ? Fëa voulait retrouver son équipage et si possible son navire. Mais comment le retrouver ? L’elfe avait donc décidé de se mettre en quête d’arme et d’aviser ensuite. Il fouilla la cabane et il ne trouva rien sauf des casseroles et une pique pour le poisson. Le naufragé demanda donc à la vieille où se trouvait la ville la plus proche. Et coup du sort, un marché important se tenait le surlendemain dans une bourgade des environs. L’humaine l’informa donc qu’elle partirait à l’aube et qu’il pouvait venir si il le souhaitait. Fëascalen aurait accepté juste pour voir la sénile faire ses emplettes, un spectacle rare et sans doute éprouvant pour le commerçant. A l’aube, ils se mirent donc en route. Il fut étonné par la vitesse de son hôtesse qui marchait aussi vite que lui malgré sa petite taille. Les dunes défilaient de chaque côté du chemin, cachant, au grand soulagement de l’elfe, l’océan. Ils atteignirent leur objectif deux heures après le déjeuner. La bourgade était de petite taille du point de vue de Fëa mais suffisamment grande pour dénicher de quoi se battre. Les maisons en bois s’étendaient autour de la grand-rue et formait au milieu de la ville une vaste place où des marchands commençaient déjà à installer leurs étals. Le guerrier sourit à la vue d’un stand d’armurerie et s’y dirigea d’un pas assuré. L’homme qui astiquait une courte épée resta bouche bée devant l’étrange énergumène qui inspectait sa marchandise. Il était rare de voir un elfe dans les parages mais en voir un habillé d’une braie qui lui arrivait à la cheville et d’une chemise de chanvre en piteuse état était plus incroyable encore. Sans faire attention aux yeux ahuris de l’autre, Fëascalen porta son choix sur une longue lame droite à double tranchant. Une garde recourbée vers la main, un pommeau en pierre semi-précieuse permettait à l’épée d’être bien équilibrée. Il la rentra dans le fourreau et demanda son prix. L’interpellé bégaya quelques choses et il comprit que son prix ne serait pas le sien… Le naufragé n’avait d’ailleurs pas d’argent, il pourrait emprunter à la vieille dame mais accepterait’ elle ? Songeur, il reposa le tout sur l’étal et repartit vers l’humaine. Cette dernière regardait avec intérêt des poissons plus très frais et marmonnait en hochant la tête. Elle s’arrêta soudain quand une voix puissante perça dans le brouhaha :

« - Mais c’est notre chère vieille chérie ?! »

   Fëa se retourna et chercha l’origine de cette interjection. Un bonhomme bien en chair se dégageait de la foule pour aller dans leur direction. Son pourpoint gardait des traces de son dernier repas et sa quarantaine lui avait offert le début d’une calvitie. Une barbe peu pourvu complétait le tableau. Le nouveau paru sympathique à l’elfe même si il ne semblait pas briller par son intelligence. Le nouveau venu serra la vieille dans ses bras flasque et l’embrassa sur le front, sous le regard amusé de l’elfe. Quand il eut finit d’étouffer son hôtesse, il daigna enfin s’intéresser au naufragé. Il eut la même impression que le marchand d’arme. Mais il reprit plus vite ses esprits :

« - Bonjour seigneur, je suis Tylor Feilas. Marchand de son état. Je parcours les côtes de la grande mer avec ma femme et mes trois charmantes filles. J’espère que vous nous ferez l’honneur d’admirer les outils d’excellentes qualités que nous proposons. Mais je parle, je parle, je ne connais même pas votre nom ? Et toi vieille sorcière, tu aurais pu nous dire comment vous vous êtes rencontrés ! »
Le bavard se retourna vers Fëascalen. « Nous l’avons rencontré il y a trois ans, elle a sauvé ma fille ainée des griffes de la mort ! Depuis nous faisons un point d’honneur à nous arrêter ici pour lui offrir quelques ustensiles. Et bien sûr nous refusons tout l’argent qu’elle souhaiterait nous donner, car bien que ce soit de la qualité, nous avons une dette envers elle. Je ne sais pas si elle vous a montré sa petite collection ? J’espère qu’elle utilise ma poêle à frire… Je l’ai hérité de ma propre grand-mère, j’ai appris à cuisiner dessus et j’y suis très attaché. Vous comprenez je suis un grand sentimental…. »

   E
t il continua son monologue sans effort apparent. Fëascalen restait sans voix devant cette performance et bientôt ne prêta plus attention au propos que l’autre débitait. Si ce qu’il vendait à première vue n’avait aucun intérêt à ses yeux, peut-être que dans le lot une arme quelconque attendait sa venue pour sortir de l’oublie ! Finalement l’homme marqua une pause, sans doute pour attendre l’approbation de son interlocuteur. Décidé à rester poli pour profiter de la générosité de l’autre, il répondit avec le ton le plus courtois qu’il put :

« - Mae Govannen Seigneur Feilas. Je suis Fëascalen Cuceleb ancien Officier de Liaison de l’Armée de l’Eregion et Capitaine du Raegil. J’ai fait naufrage et cette charmante personne m’a sauvé des eaux. Je serai ravi de regarder ce que vous avez à me proposer. »

   T
ylor prit son nouvel ami par le bras et le mena dans la foule en continuant à déverser un flot de paroles continu. Il commença à parler du mauvais temps et des pirates avant de partir sur le pouvoir incompétent. Bien sûr l’elfe acquiesçait quand il fallait ou ponctuait le discours de banalités tel que « Triste époque !» ou encore « La jeunesse c’est plus ce que c’était ! ». Ils arrivèrent enfin à l’échoppe, une femme ayant la quarantaine et les cheveux poivres et sels l’accueillit. Un sourire franc apparut sur son visage potelé, laissant apparaitre des dents jaunes. Malgré ça elle avait un côté charmant et indéniablement maternel. A coté d’elle s’affairait trois jeunes filles ayant la vingtaine. A la vue de leur père, elles se mirent en rang. Fëascalen comprit qu’elles étaient les joyaux de Tylor, lui et sa femme cherchant coute que coute un beau partie pour chacune d’entre elle. Pour la première ils n’auraient pas beaucoup de mal, de taille moyenne, son joli minois était encadré de cheveux châtain ondulé. Loin d’être fine, elle n’en avait que plus d’attrait. La seconde était moins gâtée que son ainée, elles avaient les même cheveux mais ses joues pendaient, lui donnant un air perpétuellement triste. Ses vêtements ne laissaient rien paraître de sa silhouette. La cadette était la moins timide, mais aussi celle dont le physique n’inspirait rien. Harmonieux sans être charmant, son visage n’attirait pas le regard bien que rien ne l’enlaidisse. Cette dernière avait des cheveux roux et ne faisait pas ses vingt-ans, on lui aurait volontiers donné seize ans. Satisfait de son examen des jeunes filles, il reporta son attention sur les marchandises que recelait la roulotte. Mais avant qu’il n’ait eu le temps de se faire une idée, son nouvel hôte se mit devant lui et commença un énième discours.

« - Voyez-vous Seigneur Fëascalen, ces trois anges sont mes filles. Notre plus grand souci est de leur trouver un mari qui leurs conviennent. Hélas comme nous sommes toujours en chemin, il est difficile de trouver chaussures à leurs pieds. Mais je ne désespère pas ! D’aussi belles créatures ne peuvent pas vivre dans la solitude ! Qu’en dites-vous ? »Fëa acquiesça et il reprit avec joie. « Et leur beauté n’est pas leurs seuls atouts, tenez ce sera Luthien qui vous fera admirer notre marchandise exposée sur notre modeste étale. Choisissez ce qui vous fera plaisir(en aparté à l’elfe), vous verrez, des trois c’est celle qui a la plus belle voix. »

   L
uthien sortit du rang. Vu le nom, le capitaine avait espérer que ce soit l’ainée, la plus belle des trois. Pourtant c’est la seconde qui se présenta et l’invita à le suivre. Quelques peu déçu, les deux autres auraient rendus la visite plus vivante, il la suivit. Il ne se trompait pas, la voix monotone de sa guide commença à lui expliquer qu’elle avait vingt-et-un ans, qu’elle était bonne cuisinière… Un regard derrière son épaule appris à Fëascalen que le marchand s’attendait à un véritable coup de foudre entre les deux individus. Du côté de l’elfe rien de tel, quand à la jeune fille impossible de savoir. Ses yeux regardaient le sol avec intérêt, ses joues se balançaient lourdement au rythme de la marche. Sa voix pesante et égale débitait le discours que son père lui avait sans doute concocté. Décidément ses parents avaient un humour particulièrement ironique. Porté le prénom de la plus belle femme du monde alors qu’elle n’a d’attirant que… Fëa fit de son mieux pour lui trouver quelques choses mais il s’avoua vaincu. Son visage était tout simplement repoussant, son attitude encore plus et le peu de sa silhouette qu’il avait aperçu était des mollets jaune de gras et des bras aussi épais qu’un tronc d’arbre. Il fut prit de pitié pour se laideron alors qu’elle finissait lamentablement son monologue. Laissant le silence plané quelques secondes il demanda doucement si la famille pouvait lui fournir des armes. Elle répéta armes comme pour intégrer ce mot dans son crâne, puis hocha la tête.

« - Nous avons une vieil… »Les cours de commerce de son père firent leurs effets et elle se reprit : « une épée forgée par les anciens ainsi qu’une arbalète de chasseur.  Je vous les montrerais. »

   L
e silence reprit sa place et ils atteignirent l’échoppe après ce détour suffisamment long pour qu’elle puisse lui raconter sa vie. Elle regorgeait d’ustensiles diverses et variés, sans intérêt pour Fëascalen. Il feignit de s’intéresser à une marmite en laiton puis demanda à voir les armes. Elle disparut sous l’étal et rapporta deux paquets. Elle les lui tendit et l’elfe ouvrit le premier. L’épée était vieille, effectivement. De la rouille grignotait la lame et le lin qui entourait la garde partait en lambeau. Le pommeau avait été perdu il y a des dizaines d’années. Mais c’était mieux que rien, une fois aiguisé et la rouille retirée, elle ferait l’affaire. L’arbalète était légère, la corde en bonne état et le bois résistant. Il soupira en repensant à ses armes qui reposaient dans l’océan. Il mit les deux paquets sous son bras et la remercia d’un sourire. Il retraversa la foule et se planta devant son nouvel ami. Ce dernier fut déçu de ne pas voir sa fille avec l’étranger. Un beau parti échappait encore à la seconde… Fëa cacha un sourire en voyant la mine déconfite du père et lui demanda s’il pouvait garder les deux trouvailles. Il acquiesça et chargea sa cadette de conduire le seigneur jusqu’à l’échoppe du forgeron pour remettre d’aplomb la lame. Elle accueillit la nouvelle avec un sourire et l’emporta dans la foule. La jeune fille lui parla aussi d’elle, même si le discours était plus vivant. Le capitaine la trouva très agréable mais il eut un rictus en pensant qu’il décevrait encore son hôte. Les deux jeunes gens, du moins en apparence jeune, avaient pris le chemin le plus court et ils arrivèrent assez vite à leur objectif. L’artisan regarda d’un œil critique l’objet et travailla une demi-heure durant. Quand il la rendit, l’épée semblait neuve. Mais l’ancien officier comprit qu’elle ne vaudrait rien contre une bonne lame. Il soupira et refit le chemin avec la femme. Il remarqua qu’elle ne semblait pas porter autant d’intérêt que son père pour trouver un mari. D’ailleurs le père eut le même soupir de désespoir en les voyant parler poliment. Enfin il resta son ainé pour sauver l’honneur de la famille. D’ailleurs le soleil disparaissait à l’horizon, l’heure du repas approchait. Tylor alluma un feu autour du quel vinrent se placer la vieille, les époux, leurs trois filles et l’elfe. Ce dernier était entre la plus âgée des enfants et la mère. Le repas fut fade et frugal, la conversation quand à elle se porta vite sur la vie aventureuse du capitaine. Il raconta donc, son égo flatté par tant d’attention, divers voyages n’oubliant pas de rendre les dangers plus impressionnants. Quand il eut finit, on lui donna une couverture et il s’endormit. 

*
*   *
   Le marché c’était terminé, les ventes avaient été bonnes pour la famille Feilas. Dés l’aube ils rangèrent leurs affaires et s’apprêtèrent à partir. Fëascalen dit au revoir à son hôtesse. La remerciant et lui promettant de revenir. Au fond de lui il savait qu’il ne la reverrait jamais, mais ce n’était pas une raison pour se montrer impolis. Puis il rejoignit les autres. La famille l’avait invitée à les suivre vu qu’elle allait en Lindon. Il avait accepté, le chemin serait moins ennuyeux et le commerçant pourrait s’avérer utile pour glaner des informations sur son navire. Le chemin fut d’abord en terre avant que le sable ne devienne omniprésent. L’elfe se demandait pourquoi ils allaient dans cette direction. Soudain la mer apparut dans un tournant. Immense et ses vagues enneigées d’écume, son bleu profond attaquait la plage avec régularité. Il resta là, au milieu du chemin, à fixer l’océan. Il tremblait de peur. Ses yeux se posèrent sur une vieille caravelle et il comprit. Ces marchands allaient de ville en ville par bateau et non par caravane ! Une barque vint à leur rencontre, suffisamment grande pour contenir la marchandise. Elle revint à vide pour prendre la caravane en morceau et les passagers. Ils invitèrent Fëa à venir mais ce dernier ne pouvait pas. L’eau semblait le réclamer, lui proférer des menaces. Chaque oiseau marin n’était qu’un nouvel ennemi qui le pourfendait d’insultes. Titubant il recula, s’abritant les yeux de la réverbération du soleil sur le miroir informe. Puis il s’enfuit à toutes jambes, trébuchant sur les bosses ou les trous que le vent s’amusait à former. Enfin, les bruits des lames disparurent, le capitaine s’effondra sur le sol, secoué de sanglots. Les veines tapaient contre son cerveau, contre ses vertèbres et sur son front. Depuis le naufrage il n’avait jamais revu la mer, il s’apercevait maintenant qu’une terreur maladive s’emparerait de lui dés qu’il la verrait devant lui. Un rictus se peignit sur son visage, le voilà capitaine d’un navire alors que Belegear le terrifiait. Il se reprit, il fallait qu’il retrouve son navire. Il regarda par-dessus son épaule et fut heureux de voir que personne ne l’avait suivit. Fëascalen se remit debout péniblement et partit, sans direction particulière.

Fin du chapitre II.
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Le temps a passé, l'elfe a changé.
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