L'île perdue [Elyo]

Bien loin de toutes côtes, le navire du capitaine Elyo faisait cap vers le sud-ouest. Une tempête faisait rage un peu plus à l’est et les avaient obligé à grandement dévier de leur trajectoire habituelle. Venus du nord plus précisément de lond Daer, Elyo faisait route vers umbar et tout s'était bien passé jusqu’au cap d’Andrast, mais une fois au large des belfalas, un énorme tempête s’était dévoilée, leur barrant la route la plus directe pour les côtes du harad. Le capitaine avait alors choisi de la contourner par le sud ouest mais cette tempête semblait se jouer de lui en prenant plus ou moins le même cap. S’en suivit alors une bataille stratégique entre l’équipage et le violent phénomène telle une course entre deux navires, hormis que la tempête ne perdait jamais à ce jeu là et pouvait changer de trajectoire à tout instant.

Elyo avait choisi de ne garder qu’une seule voile affalée ainsi que la brigantine déployée pour privilégier la mobilité du navire à la vitesse pure, dans le cas où la tempête changerait brusquement de direction pour fondre sur leur position. Le capitaine était à la barre pour tenter de conserver un cap malgré les grandes vagues et les vents violents. Un membre de l'équipage qui restait sur la vigie pour observer l’horizon tenait le capitaine informé de la trajectoire de cette tempête

“ Capitaine, la tempête garde le même cap que nous ! “ lançait-il en hurlant pour se faire entendre.

“ Sans déconner ! Ca fait juste vingt minutes que je me bats pour moi aussi garder le même cap. Je le vois bien ! “ ronchonna elyo sans parler bien fort, n’ayant même pas envie de hurler pour que sa réponse soit entendue. Il était difficile d'avoir une idée précise de son cap car le soleil était bien caché derrière le ciel voilé. Le navire prenait la direction du large pour s’éloigner, mais la tempête semblait les suivre. Sans doute auraient-ils pu tenter de faire demi-tour et de remonter au nord-est mais rien ne garantissait que la tempête ne ferait pas de même, d’autant que les vents étaient contraires à cet direction là. Non, il faudrait pour eux continuer ainsi en espérant peut-être enfin parvenir à la devancer pour la contourner.

De loin, une tempête restait un spectacle impressionnant, capable de remplir de peur le cœur d'un marin chevronné. On entend le ciel rugir autour de cette gigantesque trombe marine qui s'élève d'une mer grise et enragée jusqu'au nuages épais et noirs comme le charbon. Le tout contenu dans une enveloppe brumeuse qui ne laisse s'échapper que la lumière des éclairs dans cet horizon apocalyptique.

Et vu de l'intérieur c'est encore pire. Tout est obscur et bruyant. Le ciel est sombre à en avoir des frissons dans le dos, le fracas des vagues et de la pluie sont assourdissants en plus du tonnerre qui gronde et de la foudre qui peuvent vous frapper sans crier gare. La mer est tellement agitée au cœur du cataclysme que les vagues gigantesques malmènent tout navire pris dans ce piège. Des murs d'eau se brisent sur le pont, le tangage et le roulis sont insoutenables. Chaque vague risque à tout moment de fracasser le gréement du navire où pire de le faire complètement chavirer. La pluie, elle, tombe avec tant de force qu'il faut écoper sans relâche pour ne pas sombrer dans les profondeur de cet mer impitoyable. Oui vivre une tempête depuis l'intérieur est un enfer dont peu de marins reviennent sains et saufs.

Après une longue période à se battre contre les forces périphériques à la tempête, durant laquelle il devait essayer de conserver son cap sans trop solliciter la coque du navire, Elyo laissa la barre à l'un de ses hommes et observa la tempête à son tour depuis l'arrière du navire. Jaheira, elle, supportait mal le tangage d'une mer aussi agitée et son estomac lui jouait des tours, si bien qu'elle resta fermement agrippée à une écoute du mat de misaine en essayant de retenir une énième régurgitation. Les vents se faisaient plus forts, l'ombre avançait sur eux. Le capitaine expérimenté avait très rapidement remarqué le soudain changement de direction de la tempête. Par réflexe, il leva les yeux au ciel pour observer le pavillon qui flottait en haut du grand mât et à cet instant il remarqua que le vent soufflait de trois quart arrière avec une force certaine…

" LA TEMPÊTE VIENS SUR NOUS ! AFFALEZ TOUTES LES VOILES ET METTEZ LES AU VENT ! C'EST L'OCCASION OU JAMAIS D'ÉCHAPPER À CET ENFER ! REMUEZ VOUS LES MICHES, JE NE VEUX PAS VOIR UNE SEULE VOILE QUI NE SOIT PAS BOMBÉE ET PRÊTE À CRAQUER SOUS LA FORCE DU VENT !"

Hurlait-il a ses hommes pour se faire entendre. Il s'agissait d'agir vite et de profiter de cette occasion inespérée. Très vite il reprit la barre et manoeuvra pour s'éloigner tout en restant un maximum dans le vent. Ses doigts crispés tenaient fermement les poignées de bois tandis que ses jambes cherchaient la stabilité. Tout l'équipage s'était empressé de suivre les ordres et de mettre les voiles au vent. Même jaheira avait laissé ses haut le cœur de côté pour se mettre à la tâche. Le bateau reprit vite de la vitesse, les vagues n'étaient plus latérales mais belle et bien dans le sens de navigation ce qui accentuait l'effet de tangage lorsque l'embarcation passait du sommet d'une vague énorme à un creux. Le navire fendait les eaux à toute vitesse et après quelques longues minutes, la tempête semblait être distancée devenant peu à peu une sombre et opaque brume dans le lointain. Ils avaient évité le pire.