Visite de courtoisie (pv elrohir)

Ma quête ayant trouvé un heureux dénouement lorsque j'avais eu la chance de retrouver mon aîné, j'avais à présent le désir de voyager pour moi même et de visiter le pays. Il n'y avait que peu d'occasions pour une personne de mon âge de découvrir de nouvelles choses, qu'il s'agisse de paysages, de personnes ou de connaissances. Cette possibilité m'emplissait donc de joie et d'une sorte d'impatience dont je ne me souvenais pas avoir fait l'expérience depuis bien des siècles. Pour première destination, j'avais choisi de me rendre à Minas Tirtih afin de rendre visite à Lalwende. Celle ci m'avait en effet avertie de sa présence la bas dans sa dernière missive et j'avais songé que cela me permettrait de rencontrer la famille impériale. Après tout, nous étions liés par le sang, même si cela remontait à quelques générations.

La campagne gondorienne me sembla tout d'abord verdoyante et fertile, quoi que dans un registre quelque peu différent de ce que j'avais vu jusqu'ici sur le continent. Cette impression fut malheureusement de courte durée, car mon trajet m'emmena finalement dans une partie du pays durement touchée par quelque chose que j'identifiai immédiatement comme anormal. Ce n'était pas naturel. Je n'avais aucun doute à ce sujet. Cependant, ignorant tout de la nature de ce mal qui rongeait la terre, je n'avais aucune possibilité d'y remédier dans l'immédiat. Les quelques bourgades que je croisai étaient vides de vie et je me félicitai d'avoir songé à emporter des vivres. Cette ambiance malsaine me pesa jusqu'à ce qu'enfin la nature semble reprendre ses droits. Le cœur empreint de doutes et d'inquiétudes, j'atteignis la capitale. Je m'annonçai en arrivant au palais, incertaine de la réception qui me serait faite, ayant ommis d'envoyer une lettre pour prévenir de mon arrivée.

Dans ses quartiers, la dame d’imladris était plongée dans ses pensées. Elle se tenait prêt de son fils eäron qui jouait enfin calmement après une bonne séance de quatre pattes qui avait eu pour but d’explorer chaque recoin des quartiers mis à leur disposition. Maintenant que le calme était revenu, Lalwendë se replongea dans ses songes mêlant inquiétudes et interrogations. L’elfe pensait à son mari et au reste de la famille partis quelques heures plus tôt pour enquêter sur un fléau qui touchait durement le pays. Les heures s’écoulaient maintenant plus lentement et l’anxiété de l’elfe irait grandissante au fil du temps.

Soudainement, on frappa deux coups à la porte en bois qui scellait les quartiers. Un garde de la citadelle entra une fois que la dame d’imladris l’y invita. Après avoir salué la dame d’Imladris d’un signe de tête respectueux, l’homme prononca : “ Dame Lalwendë, une personne du nom d’Astriel Nirokini s’est présentée aux portes de la cité et dit vous connaître. Est-ce vrai ? “
Le sourire ne tarda pas à s’afficher sur les lèvres de l’elfe brune. Son amie, avec qui elle avait gardé un contact épistolaire depuis leur séparation, était donc venue lui rendre visite ici à minas Tirith ! Voilà une nouvelle qui venait égayer son cœur et la noldo ne tarda pas à confirmer au garde :

" Oh oui bien sûr ! Pourriez vous la conduire jusqu'ici ? Que je puisse la recevoir dans mes quartiers."

L'homme acquiesça et prit congé en adressa une dernière inclination à Lalwendë. Après être sorti, il repartit donc en personne accueillir cette nouvelle invitée.

J'avais été accueillie avec tous les honneurs dus à une amie de la famille impériale, bien que n'ayant guère eu à évoquer ma propre lignée avant d'être introduite dans les appartements de Lalwendë. J'avais connu des demeures moins hospitalières et je notai dans un coin de mon esprit l'amabilité dont chacun faisait preuve envers moi. Bien que je sois vêtue de façon bien sommaire par rapport à mon rang, ma tenue de voyage laissait supposer une certaine richesse. Mon arrivée dans un tel palais avait allumé dans mon cœur le secret espoir d'avoir accès à tout le confort auquel j'aspirais désespérément depuis des mois. Un bain chaud, un matelas confortable aux draps assortis et plus encore la possibilité de porter l'une de mes robes favorites plutôt que des guenilles pratiques. De tels délices me laissaient rêveuse et c'est d'un pas dansant et aérien que je suivis mon guide jusqu'à la porte de mon amie.

Il y avait finalement fort peu de temps que nous ne nous étions vues, mais j'avais la sensation qu'il y avait déjà des années. Elle m'avait manqué, pleine d'espoir, de douceur et de gaieté. Fort peu de femmes trouvaient grâce à mes yeux, mais elle figurait indéniablement parmi mes favorites. Ah, comme j'aurais aimé que mon frère s'éprenne d'une personne aussi bien sous tout rapports ! Décidément, il avait des goûts discutables en matière de femmes. Enfin, l'heure n'était pas à ces pensées décevantes. Lorsqu'enfin la lourde porte s'ouvrit sur elle, un très large sourire éclaira mon visage.

"Quel plaisir de vous revoir !" m'exclamai-je avec une joie manifeste.

En attendant que le garde guide Astriel jusqu'à Lalwendë, celle-ci se vit revivre les souvenirs de son voyage de retour en cette terre du milieu. Leur amitié était née de ce long voyage et leurs chemins s’étaient séparés aux alentours de la comté, là où l’elfe de valinor était partie en quête de retrouver son frère, tandis que Lalwendë poursuivit sa route vers imladris. S’il était bien un lieu dans lequel la femme d’Elrohir aurait aimé accueillir son amie, c’était bien au coeur de la splendide vallée de Fondcombe. Peut-être une prochaine fois, songea-t-elle. Après tout, la cité blanche du gondor offrait également un cadre fort accueillant pour de telles retrouvailles.

La porte se rouvrit et le visage lumineux d’astriel afficha un grand sourire.
“Quel plaisir de vous revoir “ lui lança l’elfe au cheveux d’or. Lalwendë avait également le visage égayé et un sourire radieux sur les lèvres

“ C’est un plaisir grandement partagé dame Astriel ! Comment allez vous ?” demanda-t-elle avec grand intérêt car, dans leur correspondance, l’elfe d’ost-in-edhil avait pu relever un certain mal être de son amie qui semblait chercher un but et un moyen de se sentir chez elle.

Le garde à nouveau partit, ce fut un autre être qui s’approcha de l’invitée surprise. Arrivé à quatre pattes, un petit elfe au cheveux bruns s’approcha d’Astriel et vint tirailler le bas de sa robe, chose qu’il faisait en général pour être prit dans les bras. Eäron avait croisé le chemin de cette elfe en même temps que sa mère, et bien qu’il n’en gardait certainement aucun souvenirs, il semblait que sa présence lui fut agréable et ainsi vint-il la saluer.

Un coup d'oeil me suffit pour comprendre l'aisance dans laquelle évoluaient les membres de cette famille à Minas Tirith. Après tout, la belle soeur de Lalwendë elle-même ne portait pas-elle pas le titre d'impératrice ? Rien de plus naturel, par conséquent, que de loger ses parents dans de confortable appartements. Cela n'avait évidemment rien en commun avec la conception rustique du confort à laquelle j'avais été confrontée chez les hobbits, ou avec le grandiose clinquant des appartements où j'avais séjourné à Khazad Dûm. Je soupçonnai l'impératrice d'avoir ajouté une touche elfique au mobilier et à la décoration, car je m'y sentis aussitôt à l'aise. Assurément, ce n'était point un humain qui pourrait apporter une telle touche de distinction discrète et naturelle à la décoration... Pour la simple et bonne raison qu'ils manquaient cruellement de raffinement.

“ C’est un plaisir grandement partagé dame Astriel ! Comment allez vous ?”

J'attendis le départ du garde pour répondre, car mes affaires privées ne regardaient certainement pas la domesticité. Si j'étais toute prête à engager une conversation à coeur ouvert avec mon amie, il n'était pas question que s'y glisse quelque oreille indiscrète. Je n'eus cependant pas le temps de m'étendre sur mon désappointement quant à mon voyage : l'adorable Ëaron semblait désireux de me saluer lui aussi. Un très large sourire éclaira mon visage et je m'adressai aussitôt à sa mère afin de quérir l'autorisation de le prendre dans mes bras :

"Puis-je ?"

A peine l'expression de Lalwendë eut-elle répondu à ma question que je me baissai pour le prendre précautionneusement contre moi. La différence avec notre première rencontre me frappait : comme les enfants grandissaient vite ! A mon grand regret je n'en avais côtoyé que très peu au cours de ma longue vie, mais rien ne me réchauffait tant le cœur qu'un petit être si plein d'innocence, à l'aube de sa vie.

"Bien le bonjour mon jeune ami. Je vois que vous semblez vous porter à merveille."

Bien que dans les traits de l'enfançon l'on ne puisse encore déterminer précisément le physique qu'il aurait à l'âge adulte, je distinguais indubitablement quelque chose qui lui venait de sa mère. Je me demandai un instant à quoi pouvait bien ressembler son père, mais songeai qu'il y avait toutes les chances que je fasse sa rencontre ici même. J'interrogeai donc Lalwendë à ce sujet :

"Je n'ai guère eu la chance de rencontrer votre époux jusqu'alors. Je serais ravie de faire sa connaissance, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Une fois que j'aurai eu l'occasion de vous raconter mon voyage, bien entendu. Vous n'imaginez pas à quel point ces derniers mois ont été éprouvants."

La question de mes aventures mise à part, j'avais réellement besoin de rencontrer du monde. Du beau monde, s'entend. D'une part, j'aurais aimé me rapprocher d'autres elfes de haute lignée, dans un but purement social. Non pas que je méprise réellement la compagnie des autres races que j'avais pu côtoyer jusqu'ici depuis mon arrivée, mais tout de même... Rien ne valait une bonne soirée avec mes semblables, pourquoi pas en musique. J'étais d'ailleurs toute prête à honorer l'assistance de mes talents de musicienne si l'on m'en donnait l'occasion.

Lalwendë avait acquiescé d'un simple signe de tête à la demande d'astriel concernant le fait de porter le petit elfe qui refusait de la lâcher. Cette vision amusa la dame d'imladris qui regardait d'un œil attendri son fils offrir quelques beaux sourire à son amie. Eäron n'était pas timide et offrait son sourire assez aisément, même avec les gens qu'il ne connaissait pas. Un véritable petit bout de joie à l'état le plus pur.

En entendant Astriel évoquer le fait de rencontrer elrohir, Lalwendë se mit à repenser à lui et à éprouver à nouveau ce sentiment d'inquiétude qu'elle pouvait ressentir dès l'instant où il partait en mission.

" Elrohir est parti avec sa fratrie pour enquêter sur d'étranges phénomènes affectant les eaux de ce royaume… ainsi je crains qu'il en ai pour un certain moment avant d'être de retour."

Piquée au vif par la curiosité, Lalwendë voulait découvrir à tout prix le récit du voyage de son amie qui s'annonçait visiblement mouvementé. Bienvenue en terre du milieu se mit elle à penser, là où la vie n'est pas la paisible routine qu'offrent les terres immortelles.
Désignant une méridienne en tapotant sur la confortable assise en tissus gris, la dame d'imladris ajouta sur le ton de l'excitation, avec un large sourire aux lèvres pour trahir son empressement :

" Venez donc vous asseoir je vous prie ! J'ai hâte d'entendre votre récit !

Quelle ne fut pas ma surprise lorsque Lalwendë m'annonça que son époux avait quitté le palais pour étudier un événement mystérieux ! Voilà qui ressemblait à s'y méprendre à un roman d'aventure, sans nul doute. Ou peut être une tragédie sentimentale, au cours de laquelle un homme quitte femme et enfant dans le seul but de sauver une innocente population d'un terrible fléau... Indubitablement, cela soulignait l'esprit chevaleresque des nôtres, nous qui étions prêts à mettre nos vies si précieuses en péril pour le bien d'autrui ! Je n'en fus que plus impatiente encore de rencontrer la moitié de Lalwendë, mais je comprenais fort bien que cela doive attendre.

En y songeant, l'étrange sécheresse qui sévissait m'avait effectivement frappée. Je comprenais à présent que l'étrange mal qui rongeait ce pays avait de multiples facettes, dont certaines m'inquiétaient plus que d'autres... Le bien des populations humains si fragiles m'importait, évidemment. Pourtant, c'était pour la nature que je m'inquiétais le plus : le paysage désolé que j'avais traversé pour venir avait bien plus de valeur qu'une poignée de paysans, fussent-ils citoyens des peuples libres. Si les hommes pouvaient aisément être remplacés, la terre, elle, serait bien plus longue à guérir et les conséquences pourraient se révéler particulièrement dramatiques pour la faune et la flore...

"Je comprends, bien entendu, répondis-je avec un sourire aimable, posant une main délicate sur l'épaule de mon amie dans l'espoir de l'apaiser. Nous aurons tout le temps de nous rencontrer ultérieurement. Je suis certaine que sa quête se déroulera sans anicroche et que tous ses compagnons, ainsi que lui même, nous reviendront sains et saufs."

Je ne sus si cette affirmation réconfortait réellement Lalwendë, mais son intérêt pour mon voyage était palpable. Aussi m'empressai-je de m'installer confortablement sur l'une des causeuses dont disposait la pièce, prête à relater par le menu les aventures auxquelles j'avais été confrontée depuis mon arrivée. JE pris bien sûr le plus grand soin à installer le jeune elfe le plus confortablement possible sur mes genoux, avant de commencer mon récit :

"Comme je vous l'ai déjà raconté dans l'une de mes missives, j'ai eu la chance de retrouver mon frère sans trop de difficulté. Il était précisément là où l'on m'avait dit qu'il serait, aussi cette partie du voyage fut-elle peu surprenante. Je vous ai déjà relaté les conditions épouvantables dans lesquelles il vit, dans cet espèce de trou sombre et exigu. Mais plus encore que son logis, son caractère qui me causa un vif déplaisir. Il a tant changé, depuis son départ, que c'est à peine si je puis l'appeler mon frère. J'ai réellement la sensation d'avoir vécu et cheminer avec un quasi inconnu. J'en suis fort peinée, et je ne saurais vous conter à quel point mon coeur se serre à l'idée que ce frère que j'aimais tant n'est plus qu'un souvenir. Non pas qu'il me soit à présent insupportable de discuter avec lui, mais je me sens... Comment dirai-je... Désappointée."

C'était le moins que l'on pouvait dire. J'aimais toujours tendrement mon frère, bien entendu, mais j'avais la sensation qu'il m'avait en quelque sorte été volé. J'étais déçue, finalement, d'avoir fait tout ce chemin pour tomber sur un quasi inconnu qui n'avait plus de mon frère que le nom. J'ajoutai d'ailleurs d'un air presque horrifié :

"Imaginez-vous donc qu'il semble à présent évoluer dans son troisième cycle... Lors de nos retrouvailles, il arborait même une fine barbe ! Cela me semble tellement improbable, tellement... Je ne sais comment l'exprimer. Mais dites vous qu'il y a pire encore ! J'ai la certitude absolue qu'il entretient une sorte de relation avec une créature particulièrement étrange, mi naine mi hobbite. J'ignorais jusqu'alors qu'une telle hybridation fût possible !"

Mon ahurissement n'avait point décru depuis que je m'étais aperçue de leur petit manège. Non seulement le fait en lui même était inouï, tant les mœurs de ces gens pouvaient être éloignées des nôtres, mais pire encore, cela ne pouvait se finir que d'une façon tragique : les nains comme les semi hommes n'ont qu'une vie éphémère, à peine un battement de cils au terme duquel mon frère s'exposait à une douleur infinie. Il ne pourrait même pas trouver de consolation dans l'idée de la retrouver après sa mort, car il était fort probable qu'elle soit dotée du cadeau des hommes... Alors, quel bonheur cela pourrait-il apporter au final ? Pire, quelle progéniture, si progéniture il y avait ? Quant à elle, supporterait-elle de voir son époux, glorieux et inchangé, alors que l'âge ternirait son regard et flétrirait ses traits ? Lorsqu'elle serait vieille et peut être impotente, ne souffriraient-ils pas tous les deux d'une telle infamie ? A mes yeux, tout cela ne pourrait que très mal finir, pour le plus grand malheur des uns comme des autres. Je poussai un profond soupir et ajoutai , les sourcils froncés dans une expression soucieuse :

"Cela me tourmente nuit et jour. Que d'inconvénients à s'apparier avec une personne si éloignée de nous, en toutes choses... Non pas qu'elle ait mauvais caractère ou qu'elle ait une influence néfaste sur lui, mais le futur qu'ils pourraient partager me semble bien incertain, et très certainement tragique. Enfin... On ne peut rien y faire et je suppose qu'il peut déjà s'estimer heureux d'avoir trouvé quelqu'un avec qui partager quelques brèves années..."

Je savais d'expérience combien la vie peut être triste, lorsque l'on est seul depuis tant d'années. Souhaitais-je pour autant tomber sous le charme d'un quelconque humain, ou pire, d'un nain ? Certainement non. Je préférais rester seule et mélancolique que veuve et misérable. Mon récit était à peine commencé, mais j'avais tellement besoin d'un avis éclairé sur la question que je l'interrompis là, curieuse de savoir ce que Lalwendë aurait à en dire : contrairement à moi, elle était accoutumée à cette terre et peut être trouverait-elle un quelconque avantage à tout cela auquel je n'aurais pas pensé moi même.

A mesure qu’elle écoutait son amie conter son aventure parmi les hobbits de la comté où vivait son frère, lalwendë ne pouvait s'empêcher de compatir au désarroi que celle-ci avait pu ressentir à la vue du mode de vie des semi-hommes. D’une manière générale, il fallait reconnaître que les elfes n’étaient pas le peuple le plus ouvert sur les autres. Avant de connaître elrohir et donc Imladris, l’orfèvre d’ost-in-edhil ayant aussi vécu en lorien, n’avait pratiquement jamais rencontré d’individu d’aucune autre race. Alors pour une elfe de valinor n’ayant jamais côtoyé que d’autres elfes, cela pouvait s'avérer choquant d’autant plus lorsqu’elle avait constaté de ses propres yeux que son frère se complaisait parfaitement à vivre ainsi.

L’elfe au cheveux bruns était désolée de prendre la mesure du mal être de son amie, bien qu’elle en avait déjà été informée lors de leur correspondance. Pourtant, elle restait convaincue qu’une elfe comme Astriel pouvait trouver son bonheur en terre du milieu. Alors, plongeant son regard sombre dans les yeux clairs de cette dernière, la dame d’imladris lui répondit :

“ Bien que j’ai toujours vécu en terre du milieu, je ne connais guère les autres peuplades qui la composent. A Imladris, j’ai pu lire quelques récits et contempler certains dessins qui concernaient entre autre les habitations des hobbits ou encore les grandes halles des nains qui s’étendent sous la montagne. Mais je ne les ai jamais vu de mes propres yeux au point de pouvoir en juger. La terre du milieu est composée d’une multitude de peuples très différents les uns les autres. Nous ne pouvons pas toujours comprendre leur mode de vie, Cela peut sembler parfois déroutant mais c’est ce qui la rend si atypique et spéciale “

Le malaise d’Astriel semblait plus profond qu’un simple choc des cultures. Elle semblait frustrée de ne pas comprendre que son frère puisse s’être épris d’une personne mortelle, qui plus est issue d’un métissage entre nain et hobbit. Une fois encore, une interminable vie prospère à Valinor avec la certitude qu’aucune menace ne viendra écourter une vie immortelle, rendait certainement cette relation avec une mortelle impossible à comprendre pour cette elfe. C’était le genre de choses auxquelles Lalwendë n’avait jamais songé lorsqu’elle tentait d’apporter du réconfort et du soutien à son amie en répondant à ses lettres. La vie en terre du milieu force quiconque y vit à accepter que le danger et la mort peuvent-être partout et surgir de nulle part. Quelque chose de presque impossible à accepter lorsque l’on à vécu des millénaires sur les paisibles terres immortelles.

“ Je ne voudrais pas faire de la romance à l’excès, mais pour ma part je pense que si Elrohir venait à disparaître au cours de l’une de ses aventures,  la tristesse m'accompagnait alors éternellement, attisée par le terrible vide qu’il laisserait dans ma vie. Mais je sais également que cela n’occulterait pas complètement les joies et tous les sentiments positifs que notre amour à fait naître. Ce sentiment de plénitude et de bonheur que je vis à chaque instant passés à ses côtés, ne serait pas entièrement effacé et les souvenirs de notre amour seraient là aussi pour penser les plaies de ma solitude. Préfèrerais-je à cet instant ne jamais l’avoir connu pour me préserver de la douleur de son trépas ? Je suis absolument convaincue que non, je ne laisserai aucun regret derrière moi “ Répondit ensuite Lalwendë en laissant son coeur parler librement.

Songer au trépas d’Elrohir assombrit son esprit pour quelques temps, lui qui venait de partir pour une autre aventure devait certainement se confronter à un danger en cet instant. Ainsi l’inquiétude se mit à tisser de ténèbres les pensées de la Dame d’Imladris qui posa alors son regard sur Eäron pour porter son attention sur ce petit être insouciant de tout ceci. Ce dernier semblait d’ailleurs apprécier la compagnie d’Astriel et jouait avec ses mains toujours sagement assis sur ses genoux.

L'expression de Lalwendë sembla particulièrement songeuse l'espace d'un instant, puis elle me répondit simplement :

“ Bien que j’ai toujours vécu en terre du milieu, je ne connais guère les autres peuplades qui la composent. A Imladris, j’ai pu lire quelques récits et contempler certains dessins qui concernaient entre autre les habitations des hobbits ou encore les grandes halles des nains qui s’étendent sous la montagne. Mais je ne les ai jamais vu de mes propres yeux au point de pouvoir en juger. La terre du milieu est composée d’une multitude de peuples très différents les uns les autres. Nous ne pouvons pas toujours comprendre leur mode de vie, Cela peut sembler parfois déroutant mais c’est ce qui la rend si atypique et spéciale “

Pour ma part, je commençais à me demander si je n'étais tout simplement pas trop vieille pour vivre tant de changements. J'étais si profondément ancrée dans mes petites habitudes que toute modification de celles-ci, si infime soit-elle, me causait un profond déplaisir. J'avais entendu récemment en traversant un village humain que les personnes âgées sont caractérisées par leur mélancolie des temps anciens, et par la phrase "c'était mieux avant". Et de fait... Je ne pouvais nier qu'à mes yeux, tout était mieux avant. Quand le monde marchait droit, les elfes vivaient à Valinor et profitaient de la douce lumière des arbres. Voilà le bon temps. De nos jours, tout n'était que ténèbres, vilenies et sources de mécontentement. Je poussai un profond soupir, quelque peu dépitée de constater que le problème venait probablement de moi... Et bien qu'il me répugne de l'admettre, je me sentais également attristée de constater que j'étais ce que d'aucuns aurait pu considérer comme une vieille dame radoteuse. Quelle que soit son origine, aucune dame n'apprécie de constater à quel point elle avance en âge...

“ Je ne voudrais pas faire de la romance à l’excès, mais pour ma part je pense que si Elrohir venait à disparaître au cours de l’une de ses aventures,  la tristesse m'accompagnait alors éternellement, attisée par le terrible vide qu’il laisserait dans ma vie. Mais je sais également que cela n’occulterait pas complètement les joies et tous les sentiments positifs que notre amour à fait naître. Ce sentiment de plénitude et de bonheur que je vis à chaque instant passés à ses côtés, ne serait pas entièrement effacé et les souvenirs de notre amour seraient là aussi pour penser les plaies de ma solitude. Préfèrerais-je à cet instant ne jamais l’avoir connu pour me préserver de la douleur de son trépas ? Je suis absolument convaincue que non, je ne laisserai aucun regret derrière moi “

C'était malheureusement là un sentiment que je peinais à comprendre. Mon cœur n'ayant jamais été troublé par quiconque, il me semblait déraisonnable de privilégier un bonheur bref, aussi intense soit-il, s'il nous exposait ensuite à une éternité de tourments. A dire vrai, la brièveté de l'existence mortelle m'avait heurtée de plein fouet à peine quelques semaines plus tôt... Tandis que je me trouvais moi même confrontée à la possibilité de mon propre trépas, j'avais réalisé à quel point la vie des êtres les plus fragiles pouvait être précaire. Moi qui m’étais trouvée jusque là dans un monde sécurisé, immortel et immuable, j'étais fauchée par la peur de mourir. Je ne parvenais pas à comprendre comment des mortels pouvaient évoluer l'air tranquille alors que la mort était là, tout près, à peine à une battement de cils d'eux.  Je finis par répondre tout en caressant doucement les cheveux du garçonnet qui semblait se plaire sur mes genoux :

"C'est hélas un sentiment que j'ai bien peur de ne point pouvoir assimiler, pour l'heure. J'ai toujours vécu entourée des miens, aussi immortels que les nôtres peuvent l'être dans mes terres natales. Si ce n'est Araekin, bien rares sont mes connaissances à s'être un jour exposées à un réel danger, à la perspective même de la mort. J'ai seulement réalisé l'horreur que cela représente il y a fort peu de temps moi même... Et depuis, l'idée ne cesse de me hanter. La peur de la mort s'est sournoisement glissée dans mon quotidien et l'idée que je survivrai à la plupart des gens que je rencontre chaque jour me tourmente. Comment pourrais-je même envisager de lier mon cœur à l'un de ces êtres dont l'existence ne représente guère plus d'un souffle à l'échelle de la mienne ?"

Cela m'était impossible, bien évidemment. Les certitudes de toute une vie s'effondraient une à une confrontées à la réalité de ceux qui vivaient ici. Je regrettais à présent d'avoir quitté la maison, de m'être frottée à un monde si étranger et hostile. Que n'avais-je refusé l'invitation de mon frère, restant à jamais dans la bienheureuse paix de mon foyer ? A nouveau, un soupir à fendre l'âme s'éleva de mes lèvres, avant que je ne poursuive.

"J'espère néanmoins qu'il trouvera là suffisamment de bonheur pour compenser tout ce qu'il aura à affronter par la suite. Je ne peux guère comprendre mais je lui souhaite tout de même d'y trouver son compte."

Ne voyant point ce que nous pourrions ajouter à la question pour l'instant et désireuse d'y réfléchir plus avant moi même, je décidai d'aborder un autre sujet.

"Hélas, ce n'est point là l'unique sujet de désappointement de mon voyage. Figurez-vous que le pire est à venir, car j'ai vécu bien malgré moi une aventure des plus déplaisantes."

Le mot était bien faible pour décrire l'horreur de la chose, mais mon âme de conteuse se serait trouvée bien dépourvue si j'avais révélé la teneur de mon histoire avant même de la débuter.

"Voyez-vous, Araekin comme je vous l'ai dit entretient une bien étrange relation avec le peuple nain et celle-ci lui tient particulièrement à cœur. Il semblait particulièrement désireux de nous introduire, sa jeune flamme et moi, auprès du peuple sous la montagne. Celle-ci s'étant enthousiasmée pour la chose, je n'ai guère eu d'autre choix que d'accepter de les accompagner à Khazad Dûm. Or, c'est dans l'ombre tentaculaire des galeries de cette ville que j'ai eu le malheur de vivre la plus traumatisante expérience de toute mon existence. Ce n'est pas peu dire, je vous prie de me croire."

Tout en parlant, j'avais pris tour à tour un air ennuyé, puis mystérieux, à mesure que le récit le justifiait. Puis je marquai une courte pause afin de ménager mon effet, avant de poursuivre :

"Certes, la visite commença sous des auspices favorables et nous fûmes reçus avec les honneurs qui nous sont dûs, quoi que quelque peu grossiers. C'est d'ailleurs le mot que j'utiliserais pour décrire cette cité : grossière, mais surtout clinquante. Tout n'est là bas qu'étalage de joyaux et de métaux précieux. Bien que cela ne manque pas d'un charme certain, tout y est bien trop tapageur et manque de raffinement. Cela couplé à la sensation permanente d'enfermement me mit bien vite mal à l'aise et c'est pourquoi un soir je décidai de m'éloigner de tapage incessant des quartiers que l'on m'avait attribués... Sous terre, comme vous vous en doutez. A nouveau !"

Je secouai la tête avec consternation, l'air de me demander si les peuples mortels avaient un problème quelconque avec le plein air. Décidément, vivre enfermés semblait être à la mode parmi ces gens-là. Le décor étant planté, j'entrai dans le vif du sujet.

"Tandis que je chantais tranquillement sous les étoiles, perchée en hauteur sur le rebord d'un trou permettant d'accéder à la cité, je ressentis soudain une vive douleur au mollet avant d'être entraînée dans les profondeurs par une créature hideuse. Croyez-moi ou non, mais il s'agissait là d'une araignée plus massive qu'un cheval. Je vous passerai les détails en présence d'oreilles sensibles, mais cela m'occasionna une telle souffrance que je manquai de perdre conscience. Je ne dois ma survie qu'à l'arrivée fort prompte -il faut bien leur reconnaître une certaine réactivité- d'une troupe de nains menée par leur souverain en personne. J'ignore ce qu'il faisait là, pour tout vous dire, mais je me félicite d'être encore en vie pour raconter cette terrible histoire."

Je poussai à nouveau un soupir, avant d'ajouter d'un air sombre :

"Le pire dans tout cela, c'est que la créature étant dotée d'un poison maléfique, cela m'a laissé une profonde cicatrice. Imaginez-vous ? Mon corps jusqu'ici parfait et dépourvu du moindre défaut, soudainement pourvu d'affreuses marques ? J'ignore si elles disparaîtront un jour, mais la perspective de garder en permanence ce rappel de ma faiblesse me déplaît plus que je ne saurais le dire."

Car bien que je me plaise à me considérer comme telle, je n'étais pas réellement intouchable et immortelle. Je pouvais souffrir et même perdre la vie. Vivre chaque instant avec une blessure indélébile ne faisait que me rappeler à quel point la vie est une chose éphémère de ce côté de l'océan... Une cause de mortification supplémentaire dans un monde qui me semblait déjà particulièrement inhospitalier.

Écouter son amie lui expliquer tout son ressenti vis-à-vis de la mortalité mais aussi vis-à-vis des blessures que l'on pouvait subir ici-bas en terre du milieu, rappela a Lalwendë le douloureux souvenir de la perte de sa mère. Valinor était un Havre de paix, une paix que les elfes de la terre du milieu ne pouvaient pas connaître car tous avaient déjà été confrontés d'une manière ou d'une autre à la malfaisance et au mal de formes diverses et variées. Mais il était vrai aussi que pour ceux qui comme elrohir et elladan le combattaient avec férocité depuis fort longtemps, une vie sans cette dualité de mal et de bien leur paraîtrait ennuyeuse au possible.

Lorsque Astriel avoua que là n'étaient pas ses seuls tourments, la dame d'imladris leva un sourcil interpellé. Quelle mésaventure pouvait-elle avoir connue ? En si peu de temps en terre du milieu, l'elfe de valinor avait connue un séjour presque plus mouvementé que la vie entière de l'orfevre d'ost-in-edhil. Bien qu'ayant voyagé avec elrohir, Lalwendë n'avait jamais côtoyé de nains ou même de hobbits quant aux araignées, elle était heureuse de ne jamais les avoir croisées.

En revanche, elle était désolée d'apprendre que son amie avait eu le malheur d'être attaquée par l'une de ses horribles créatures et qu'elle en garderai à jamais une cicatrice qui semblait être un réel traumatisme pour elle. Néanmoins cela lui rappella une conversation qu'elle avait eu avec son époux.

" Elrohir m'a dit un jour au sujet des cicatrices qu'il a pu subir tout au long de sa vie, que celles-ci étaient là pour lui rappeler qu'il avait surmonté de dangereuses épreuves ce qui le rendait quelque part plus fort. Mais j'imagine que c'est facile à dire et je comprends votre désarroi. Pour ma part j'aurais été totalement effrayée par de telles créatures et incapable de les affronter "

Lalwendë était une orfèvre et n'avait jamais été une guerrière. Certes elle avait eu quelques cours pour le maniement des armes mais pas de quoi affronter les sombres progénitures d'Ungoliant. Rien que cette pensée lui fit froid dans le dos et se voulant rassurante elle reprit :

" Je suis désolée d'apprendre ainsi tous vos tourments. Je ne sais quels mots employer pour soulager vos peines. Mais sachez une nouvelle fois que vous seriez la bienvenue à imladris. Cet endroit est un refuge, un Havre de paix en cette terre que vous apprécierez à n'en pas douter. Nul ne peut y accéder sans en connaître le chemin et celui ci demeure caché aux sombres âmes de ce monde. "

Les réactions de Lalwendë tandis que je dépeignais la scène correspondaient parfaitement à ce que j'attendais et je me sentis en quelque sorte rassurée de voir qu'il y avaient des choses qui ne changeaient pas. Mon talent de conteuse. La sollicitude sincère de mon amie qui se dessinait sur son visage à mesure que les mots l'atteignaient au cœur. La bonne âme de mon frère, malgré tout ce qui avait pu changer en lui... Un léger soupir franchit mes lèvres à cette idée, un instant avant que Lalwendë ne me fasse part du point de vue de son époux quant aux cicatrices. Avais je réellement le désir de garder gravée dans ma chair l'esquisse du sort funeste auquel j'avais échappé par la grâce des Valar ? Était-ce d'ailleurs de leur fait, n'étais je rien de plus qu'un fusain sur leur canevas, guidée par une main experte ? Si c'était le cas, alors je n'étais rien de plus qu'une caricature, ce jour là. Un croquis mal dégrossi et au trait incertain, une pâle copie de ce que j'aurais dû être. En tant que princesse, en tant qu'elfe et à plus forte raison native des terres immortelles, que guerrière, que femme même... Je n'étais rien de plus qu'une vaste farce. Moi qui m'étais toujours tenue en plus haute estime, voilà que je découvrais qu'au lieu d'une toile de maître, je n'étais qu'un collage hétéroclite de clichés mal dégrossis. Quelle déception...

" Elrohir m'a dit un jour au sujet des cicatrices qu'il a pu subir tout au long de sa vie, que celles-ci étaient là pour lui rappeler qu'il avait surmonté de dangereuses épreuves ce qui le rendait quelque part plus fort. Mais j'imagine que c'est facile à dire et je comprends votre désarroi. Pour ma part j'aurais été totalement effrayée par de telles créatures et incapable de les affronter "

Cela me rassurait il vraiment ? Peut être un peu, mais à vrai dire ce n'était pas la le cœur du problème. Je ne pouvais effacer d'un revers de la main la révélation que j'avais eue ce jour là. Quant à avoir affronté les affreuses arachnides... J'aurais eu honte de l'admettre, mais je n'avais pas esquissé le moindre geste, ni pour attaquer ni même pour me défendre. J'avais été littéralement paralysée. J'aurais pu faire preuve de mauvaise foi et prétexter que c'était le poison qui m'avait rendue incapable de me battre, mais c'eût été mentir. Or, bien que j'eusse grand plaisir à embellir la vérité afin de dépeindre un tableau qui me soit aussi favorable que possible, quitte à en grossir les traits de façon tout à fait disproportionnée, je ne mentais jamais. Il m'arrivait d'omettre certaines choses, mais ce sujet là était bien trop important pour que je me permette d'en atténuer la gravité pour le redessiner à mon avantage. Le poison avait indéniablement joué un rôle dans mon manque de réactivité, mais ce qui m'avait réellement pétrifiée... C'était la peur. Une peur brutale, implacable, à présent estampée dans mon cœur pour toujours. Elle colorait ma vision de rouge et de noir, et de diverses nuances de gris. Des teintes vives et violentes avaient remplacé les nuances pastel de mon univers. Je ne pouvais plus me voiler la face derrière des faux semblants : j'étais une ratée doublée d'une couarde.

" Je suis désolée d'apprendre ainsi tous vos tourments. Je ne sais quels mots employer pour soulager vos peines. Mais sachez une nouvelle fois que vous seriez la bienvenue à imladris. Cet endroit est un refuge, un Havre de paix en cette terre que vous apprécierez à n'en pas douter. Nul ne peut y accéder sans en connaître le chemin et celui ci demeure caché aux sombres âmes de ce monde. "

Bien qu'elle ait été déjà proférée, l'offre me prit de court. Il était vrai que je pouvais fuir tout cela, me fondre dans un décor plus calme, plus sûr. Comme il était étrange que l'idée de simplement abandonner la tous mes problèmes ne m'ait jamais effleurée ! Peut être pouvais je simplement déposer les armes et ravir mon entourage de ma lyre et de ma plume, traçant librement mon avenir sans craindre que quelque chose ne vienne brutalement interrompre ma ligne de vie. Effectivement, je pouvais me réfugier à imladris et y demeurer. Cette réalisation m'avait tellement surprise qu'une expression de stupeur totale flottait à présent sur mon visage. C'était là l'echappatoire parfaite.

"Je ne sais que dire." finis je par avouer après quelques longues minutes.

Je n'ajoutai rien le temps de rassembler mes pensées, puis poursuivis :

"Jusqu'ici, je me considérais comme investie d'une mission et je n'envisageais pas de me détourner avant que mon œuvre ne soit achevée. Mais... A présent, je ne sais quoi penser. Peut être ne suis je pas faite pour cette vie, peut être ne suis je qu'un être composé de chant, de danses, de paysages enchanteurs et de couleurs chatoyantes. Bien que je sois dans l'incapacité de vous répondre pour l'heure, vous m'avez permis de réfléchir aussi dois-je vous remercier pour cela. Après tout, il ne tient qu'à moi de décider si je souhaite m'illustrer par l'épée ou par les arts par exemple... "

Cela, finalement, m'était d'un grand secours. J'avais le choix. J'esquissai un léger sourire avant de choisir un sujet de conversation moins sinistre :

"Figurez vous que j'ai réalisé sur le trajet que nous sommes parentes, quoi qu'éloignées. Pour être plus précise, il s'agit là d'une parenté par alliance car si je ne m'abuse votre époux est en quelque sorte mon arrière arriere petit cousin, ou quelque chose dans ce goût là. Il pourrait être amusant dessiner un arbre qui nous permettrait de nous y retrouver dans ces liens de parenté improbables... J'ai d'ailleurs connu sa grand mère, dame Galadriel, avant qu'elle ne quitte Valinor. C'est amusant de constater que nous sommes tous liés les uns aux autres, si l'on remonte assez loin. J'ai bien peur qu'elle n'ait guère un bon souvenir de moi..."

Lorsque je l' avais le plus fréquentée, la jeune Galadriel était une enfant qui avait tendance à rapidement m'irriter. Peut être s'agissait-t'il la d'une jalousie de ma part car j'avais toujours envié ses talents magiques... Et pas seulement, car il fallait bien admettre qu'elle disposait de toute une mosaïque de capacités et ce dès son âge le plus tendre. Enfin, cela remontait à si longtemps qu'il était fort possible qu'elle n'en n'ait gardé aucun souvenir. Plus l'on vivait longtemps plus la mémoire avait tendance à s'estomper, à l'image d'un trait à la craie que l'on frotte encore et encore. Non pas que l'on oublie tout à fait les choses, mais le moins important avait tendance à devenir flou et à perdre de son éclat.

"Enfin, cela serait tout de même amusant de la revoir. Elle a bien réussi sa vie, d'après ce que j' ai compris. A-t-elle déjà rencontré son arrière petit fils ?" demandai je finalement en caressant distraitement les cheveux du petit Ëaron.

Hrp:

"Jusqu'ici, je me considérais comme investie d'une mission et je n'envisageais pas de me détourner avant que mon œuvre ne soit achevée. Mais... A présent, je ne sais quoi penser. Peut être ne suis je pas faite pour cette vie, peut être ne suis je qu'un être composé de chant, de danses, de paysages enchanteurs et de couleurs chatoyantes. Bien que je sois dans l'incapacité de vous répondre pour l'heure, vous m'avez permis de réfléchir aussi dois-je vous remercier pour cela. Après tout, il ne tient qu'à moi de décider si je souhaite m'illustrer par l'épée ou par les arts par exemple... "

Les remerciements étaient inutiles, les deux elfes n'avaient fait qu'échanger comme deux amies et à vrai dire Lalwendë n'avait pas dispensé un grand conseil pour venir en aide à Astriel mais si cela lui avait permis de réfléchir c'était déjà ça de gagné.

" Je ne puis juger vos ambitions personelles, mais il n'y a aucun mal à se ranger du coté des arts et de la création plus que la destruction. Moi même j'ai préféré l'art d'embellir les armes à celui de les manier contre les ennemis. Il faudrait d'ailleurs qu'elrohir vous montre ses deux épées à son retour. Cela reste de loin les plus belles œuvres de ma création "

L'orfevre d'ost-in-edhil avait en effet mis tout son savoir, sa créativité et son amour pour ciseler, graver et embellir les deux épées d'elrohir Limbërama et Lintaràma. Forgées à Ost in edhil par celebrimbor, celles-ci n'avaient rien de magique ou d'enchantées, mais l'ouvrage entrepri par Lalwendë sur ses lames était un véritable chef d'œuvre, et la simple vision de ces ornements étaient pour elrohir une source de courage inépuisable, lui rappelant son amour éternel pour son épouse.

Astriel évoqua ensuite le lien de parenté qu'elle avait avec Elrohir et donc par alliance avec elle. C'était amusant en effet de songer à cela et l'idée de créer un arbre généalogique pour imager la multitude de lignée qui les reliait était très intéressante.

" Je dois avouer que ce n'est pas une surprise ! Elrohir m'a déjà expliqué toute la multitude d'ascendance à laquelle il appartient. J'aime beaucoup l'idée, bien qu'en ce qui le concerne cela représente plus un forêt qu'un arbre seul"

Dit elle en esquissant un sourire, fière de son petit trait d'humour. La discussion se poursuivit avec l'évocation de Galadriel qui avait manifestement croisé le chemin d'astriel en valinor. En effet cette elda était sans doute la plus respectée et la plus puissante de la terre du milieu. Lalwendë avait pu la croiser lorsqu'elle vivait en Lorièn ainsi que lors de son mariage avec Elrohir. Ce fut d'ailleurs la dernière fois que sa route croisa celle de la dame de Lorièn. Ainsi il est vrai que la question d'astriel concernant eäron la plongea dans quelques longues secondes de songes. Ils ne l'avaient toujours pas présenté à Galadriel et Celeborn et cela sonnait comme un profond regret dans le cœur de la jeune maman.

" Dame Galadriel demeure à Caras Galadhon en son royaume de Lothlorièn avec son époux Celeborn de Doriath. D'aucuns la considère comme l'être le plus puissant de cette terre du milieu. Il est vrai que nous n'avons pas encore eu l'occasion de leur présenter Eäron, ni de leur porter les nouvelles de leur fille Celebrian que nous avons laissé derrière nous en valinor...A vrai dire vous venez de faire naître l'idée en mon esprit de nous rendre en Lorièn avant de rentrer à Imladris. J'en parlerai à elrohir à son retour et je pense que vous seriez la bienvenue pour nous y accompagner "

La discussion entre les deux amies s’était ainsi poursuivie jusque tard dans la journée avant que l’elfe de valinor ne prenne congé de son amie. Elles avaient convenue qu’elles se verraient à nouveau le lendemain, histoire de visiter un peu la cité. La nuit passa et l'esprit de lalwendë était de plus en plus inquiété par la situation. Elrohir n’était pas revenu et un mauvais pressentiment semblait vouloir prendre place dans les pensées de la dame d’Imladris. Heureusement le petit Eäron plein d’innocence et surtout armé de ses cris stridents et quelques pleurs agaçants, était là pour changer les idées de sa mère. Puis, plus tard dans la journée Astriel revint et tous partirent en visite de la capitale du Gondor. Ce fut au moins l’occasion de s’aérer et de penser à autre chose que contempler ce chef-d’oeuvre d'architecture.


En milieu d’après midi, les deux amies se trouvaient à nouveau dans les quartiers de Lalwendë pour discuter lorsque les portes s’ouvrirent subitement. De celles-ci se dégagèrent deux silhouettes familières pour l’elfe brune : il s’agissait enfin d’Elladan et Elrohir ! Malheureusement la joie de constater le retour de son époux fut, pour Lalwendë, quelque peu ternie par l’effrayante apparence qu’il arborait. Il n’avait plus ses beaux habits elfiques, mais revêtait seulement un simple pantalon pour le bas, tandis que son torse était recouvert de bandages qu’il tentait de cacher sous une cape. Son visage était aussi très marqué avec notamment cette blessure sur une arcade sourcilière bien mise en évidence par l’hématome bleuté qui l’entourait. Enfin ses cheveux étaient très abîmés, comme brûlés à l’arrière. Cette vision désolante et tellement inattendue de son mari plongea Lalwendë dans une panique qu’elle essayait de contenir en portant ses mains à son visage, par dessus sa bouche.

“ Juste ciel ! Que t’est-il-arrivé ?! “ demanda-t-elle avec une voix tremblante.

” Disons qu’il m’a fallu jouer avec le feu… Et dans ses cas là c’est rarement lui qui s’incline. Mais rassure-toi cela devrait aller maintenant ! Akasha m’a prodigué les soins nécessaires et m’a dit qu’avec un peu de repos je serais bien vite guéri de mes brûlures “ répondit Elrohir dont le pantalon était tiraillé par son petit garçon qui semblait aussi soulager de le revoir.

” Elle t’as également ordonné de t’allonger sur le ventre et de laisser ton cataplasme découvert de cette cape ! “ rappela alors son frère qui ne connaissait que trop bien cette manie qu’ils avaient en commun de prendre les blessures à la légère.  

Il n'en fallut pas plus à Lalwendë pour agir et s'approcher de son mari pour lui attraper une main en lui disant : " Il te faut écouter les prérogatives de ta sœur. Je vais t'aider a t'installer sur notre lit ! "
Elrohir s'était alors baissé pour porter son enfant et de son autre main suivi son épouse. Cette dernière un peu abasourdie par la nouvelle avait complètement oublié la présence de son amie. Toute confuse, elle stoppa sa marche en avant pour s'adresser aux fils d'Elrond.

" Oh excusez moi. Permettez moi de vous présenter Astriel ! Une elfe de valinor m'ayant accompagné lors de mon retour en terre du milieu et aujourd'hui une véritable amie ! Astriel, voici mon époux Elrohir et son frère jumeaux Elladan, les fils du seigneur Elrond " conclut-elle en adressant à son amie un sourire un peu gêné par la situation.

" Mae Govannen ! " répondirent en même temps les deux frères avant qu'elrohir n'enchaine en adressant un sourire à cette personne qui semblait compter pour sa femme. " C'est un honneur d'enfin pouvoir vous rencontrer, bien que j'aurais aimé que cela soit en d'autres circonstances "

Peu après, et pour éviter qu’Elrohir n’échappe à la convalescence qu’on lui avait conseillé, Lalwendë tira la main de son mari en direction de leur chambre en s’excusant auprès d’Elladan et Astriel en étant très embarassée : " Excusez-nous un petit instant, je reviens dans très peu de temps... " Et c’est ainsi que la petite famille se dirigea vers la chambre, laissant quelques instants seuls Elladan et Astriel dans le séjour…

On y était pleinement. Dans l’instant gênant où le malaise s’installe rapidement et envahit chaque recoin de la pièce pour laisser l’embarras s’installer durablement entre ces deux inconnus. Elladan n’était pas le plus à l’aise pour s’adresser directement à des inconnus, il n’avait pas les mêmes aptitudes diplomatiques que son frère et ne savait pas trop comment engager une conversation avec cette elfe venue de Valinor. En revanche, il pouvait aisément reconnaître une expression de peur sur un visage et lorsque leurs regards fuyants finirent par se croiser brièvement, Elladan remarqua comme une certaine expression d’effroi et d’inquiétude dans ses yeux. Histoire de briser un peu la glace et ce silence assourdissant qui s’était installé, l’elfe d’imladris prit la parole en s’asseyant en face de l’inconnue.

“ Vous savez, ca va aller. Notre soeur est une excellente guérisseuse ayant tout appris de notre père, un maître en la matière. Le plus difficile est à venir car ...Il nous faudra le convaincre de rester quelques jours au repos et ça ne sera pas chose aisée ! Mais ensuite tout ceci ne sera qu’un souvenir parmi tant d’autre “ Oui elladan avait fait un petit trait d’humour pour détendre un peu l’atmosphère et peut-être rassurer cette elfe qui s’inquiétait sans doute de l’état de santé du mari de son amie. De son côté il était assez fatigué par cette éreintante expédition qui fut riche en émotion et en épreuves physiques. Cependant il ne voulait pas prendre congé de manière impolie, d’autant plus que lalwendë était supposée revenir très vite. Au moins était-il parvenu à ne pas laisser un trop lourd silence peser sur cet instant en compagnie de cette inconnue.

L'idée d'accompagner mon amie pour rencontrer notre parente commune me plaisait, mais hélas j'avais d'ores et déjà d'autres plans... Comme je le lui fis savoir après un léger soupir :

"Je crains de n'avoir point le temps d'effectuer ce voyage en votre compagnie... Voyez vous, j'ai laissé ma compagnie aux Havres Gris et je dois l'y retrouver d'ici deux lunes... Je crains de n'avoir point le temps de tout faire d'ici là, aussi dois-je décliner votre invitation. Mais ce n'est que partie remise et j'ai bon espoir de pouvoir vous y mener moi même ultérieurement. Après tout, il n'est pas question que je quitte le continent avant bien longtemps..."

Je profitai de la suite de la conversation pour lui confier mes peines et mes différentes aventures récentes. Il y avait bien des choses à en dire, puis la discussion dévia peu à peu sur des sujets plus légers. Ce soir là, je me couchai le cœur plus léger et plus doux, apaisé par la présence bienveillante d'une amie. Le lendemain, je passai le début de matinée en ville, à la recherche de vivres qui je pourrais consommer durant mon voyage. Bien que j'aie dû m'y résoudre en quittant la cité des nains, je préférais éviter tant que possible de me nourrir de viande. J'avais ressenti un profond dégoût à l'idée d'avoir ingurgité des lamelles de porc séché, mais il fallait bien se nourrir et je n'étais pas certaine de trouver suffisamment à manger sur le trajet... Heureusement, je pus trouver de quoi cuisiner des gâteaux aux fruits secs ainsi que nombre de fruits à coque et même de beaux pots de miel bien sucré. Un sac de farine , un pot de sel et un bocal de levain me parurent un bon investissement si je souhaitais faire du pain sur la route. Je trouverais bien une auberge de ci de là qui me laisserait utiliser son four en échange d'une chanson... Je trouvai également un sac d'avoine qui ravirait ma jument. Ainsi donc, ce fut une matinée bien employée et je me permis de flâner près des étals de bijoux et de tissus, fondant pour un rouleau de velours d'un vert d'eau splendide que j'achetai sur un coup de cœur. Je trouverais bien une couturière au palais pour me confectionner une robe d'ici une semaine...

Satisfaite de mes achats, je revins au palais de fort bonne humeur et me contentai d'un déjeuner léger avant de regagner les appartements de Lalwendë. Elle m'avait en effet proposé de visiter ensemble la capitale et l'idée m'avait séduite. Quel plus grand plaisir que de découvrir des lieux nouveaux en bonne compagnie ? De fait, cette sortie nous fit le plus grand bien et nous pûmes deviser gaiement tout en observant les merveilles architecturales qui nous entouraient. Bien que les humains soient un peuple rustre et peu au fait des plaisirs raffinés que la vie peut offrir, ils étaient manifestement capables de faire preuve d'une maestria dans certains domaines... Finalement, peut être y avait il du bon a prendre parmi la plèbe.

Une fois rentrées nous nous isolâmes dans les appartements de mon amie pour aborder divers sujets et nous devisions gaiement lorsque les portes s'ouvrirent avec fracas. Bien que j'aie revêtu une robe d'intérieur aux teintes violettes qui n'étaient pas sans rappeler mes yeux, j'avais tout de même pris la précaution de me munir d'un coutelas, commodément dissimulé dans mon corsage. Par réflexe, surprise par la brutalité de cette entrée, j'avais saisi mon arme, prête à défendre la petite famille au péril de ma vie si besoin était. Non pas que j'aie des doutes quant à la compétence des gardes du palais, mais... Ils n'étaient qu'humains, après tout. N'importe quel assassin aurait pu pénétrer sournoisement dans la bâtisse...

Fort heureusement, ce n'était pas le cas et je le compris bien vite à la vue des deux elfes qui se tenaient dans l'encadrement. Des jumeaux, compris-je bien vite en les identifiant aussitôt. Une telle particuliarité dans l'ordre des naissances était fort rare, et plus encore ceux qui pourraient ainsi faire irruption dans des appartements royaux sans être inquiétés. Je me détendis imperceptiblement tout en remettant mon coutelas à sa place. Je n'aurais probablement pas à... Le fil de ma pensée s'arrêta net à la vue de l'état dans lequel se trouvait l'un des deux arrivants. Il avait manifestement connu des jours meilleurs et son apparence globale me plongea dans l'effroi. Des bandages enserraient son torse, ne laissant qu'imaginer ce qu'il pouvait y avoir en dessous et lui donnant des allures de grand blessé. Son visage était orné d'un bleu des plus impressionnants mais ce n'était rien comparé à l'état lamentable de sa chevelure. Celle-ci était comme brûlée, rebiquait en tous sens et il en manquait manifestement une partie, à moins que les coupes asymétriques ne soient à la mode en ce moment. Comment un elfe pouvait-il être amoché à ce point ? Voilà qui me dépassait. Et pas n'importe qui, qui plus est, l'un des seigneurs d'imladris ! Eusse-t'il été un roturier, un soldat de métier, ç'eût été différent. C'étaient là les risques du métier. Mais un seigneur, souffrir une telle abomination ? Cela dépassait mon entendement.

Je compris lequel des deux frères était ainsi touché au hoquet qui s'extirpa des lèvres de Lalwendë.

“ Juste ciel ! Que t’est-il-arrivé ?! “

La peur transparaissait clairement dans son ton et je ne pouvais que comprendre l'état dans lequel elle était. Bien que la situation était différente, j'aurais probablement éprouvé un trouble similaire si mon frère me revenait dans ces conditions.

” Disons qu’il m’a fallu jouer avec le feu… Et dans ses cas là c’est rarement lui qui s’incline. Mais rassure-toi cela devrait aller maintenant ! Akasha m’a prodigué les soins nécessaires et m’a dit qu’avec un peu de repos je serais bien vite guéri de mes brûlures “

EÄron quant à lui ne semblait guère impressionné par cette entrée et se contentait d'essayer d'attirer l'attention de son père. Probablement souhait-il être porté, mais je doutais que ce soit une excellente idée dans l'état actuel des choses.

” Elle t’as également ordonné de t’allonger sur le ventre et de laisser ton cataplasme découvert de cette cape ! “

De toute évidence, il n'avait pas pris très au sérieux les prescriptions qui lui avaient été faites. S'il s'agissait effectivement de brûlures, il valait mieux éviter tout frottement afin qu'elles n'empirent pas... Quoi que les elfes aient rarement à souffrir de cicatrices à moins que celles ci ne soient induites par la magie... Or, le "fléau" comme on l'appelait, n'avait rien de très naturel. Il pourrait fort bien rester défiguré à jamais... J'eus un frisson à cette idée, qui raviva douloureusement l'espèce de pulsation constante qui rappelait ma propre blessure à mon bon souvenir. Quelle époque terrible que celle où des elfes pouvait être altérés par quelque maléfice ou créature indicible ! Lalwendë, quant à elle, ne perdit guère de temps avec ce type de réflexion et réagit immédiatement :

" Il te faut écouter les prérogatives de ta sœur. Je vais t'aider a t'installer sur notre lit ! "

Son époux avait fini par prendre leur fils et je me demandai si cela n'était pas douloureux de tirer ainsi sur ses blessures. Je les regardai se diriger vers leur chambre, mon expression se teintant d'une inquiétude presque palpable : bien que je comprenais ses raisons, elle n'allait tout de même pas me laisser seule avec un parfait inconnu ?!?

" Oh excusez moi. Permettez moi de vous présenter Astriel ! Une elfe de valinor m'ayant accompagné lors de mon retour en terre du milieu et aujourd'hui une véritable amie ! Astriel, voici mon époux Elrohir et son frère jumeaux Elladan, les fils du seigneur Elrond "

Je me contentai d'ouvrir la bouche sans qu'aucun son n'en sorte, abasourdie. J4avais bien sûr compris qui ils étaient, mais... Mais ! Quelle situation embarrassante !

" Mae Govannen ! " répondrient-ils d'une même voix.

Cela me rappela douloureusement une époque où j'étais moi même plus proche de mon frère, où nous pouvions terminer les phrases de l'autre sans la moindre hésitation... Une époque révolue. Il m'aurait été bien difficile à présent de déterminer ce qu'il pensait et mon coeur se serra à cette idée. Ma propre réaction à la vue d'Elrohir me sembla à présent bien insensible et je fis un effort colossal pour prendre sur moi et me montrer compatissante. Je leur répondis aussi poliment que possible en inclinant légèrement la tête à leur adresse.

" C'est un honneur d'enfin pouvoir vous rencontrer, bien que j'aurais aimé que cela soit en d'autres circonstances .
-Je suis néanmoins ravie de vous voir... Nous pouvons toujours remettre la rencontre officielle à un peu plus tard, lorsque vous vous porterez mieux."

Je lui fis un sourire, aussi sincère que possible. Bien que toujours secouée par la vision inattendue, je ne pouvais faire preuve d'indélicatesse dans une situation aussi troublante pour tout un chacun.

" Excusez-nous un petit instant, je reviens dans très peu de temps... "

Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il ne m'arrivait pas très souvent de me retrouver seule avec un inconnu dans les appartements de quelqu'un d'autre. Bien que j'aie indéniablement un talent pour me faire des amis et être appréciée par mon entourage, les rencontres se faisaient rarement en solitaire. A bien y penser, j'étais rarement seule et aimais être entourée d'une multitude de gens... Cependant, il fallait bien m'y faire et je réfléchis à ce que je pouvais bien lui dire. Pour autant que je sache, nous n'avions pas grand chose en commun et il semblait quelque peu cavalier de lui mentionner l'incident qui avait presque estropié son jumeau. Je ne me voyais pas non plus aborder des considérations météorologiques. Une discussion réussie implique un sujet, or je n'en trouvais aucun de suffisamment innocent pour nous mettre à l'aise tous les deux. Le fait de ne pas savoir quoi dire me fit paniquer et je me demandais si j'allais passer pour une imbécile ou pour une malpolie... Difficile à dire. Peut être les deux à la fois ? C'était intolérable.... Le silence était à présent si assourdissant que je sentais le sang pulser à mes oreilles, mon coeur semblant résonner dans la pièce à présent vide, si ce n'est de nous deux. Finalement, ce fut lui qui brisa le silence et j'inspirai avec soulagement, me rendant seulement compte que j'avais cessé de respirer depuis quelques instants. Il y avait fort à parier que mes expériences récentes m'avaient rendue particulièrement sensible aux troubles quels qu'ils soient.

“ Vous savez, ca va aller. Notre soeur est une excellente guérisseuse ayant tout appris de notre père, un maître en la matière. Le plus difficile est à venir car ...Il nous faudra le convaincre de rester quelques jours au repos et ça ne sera pas chose aisée ! Mais ensuite tout ceci ne sera qu’un souvenir parmi tant d’autre “

C'était fort aimable de sa part d'essayer de me rassurer et je compris soudain qu'il n'avait pas supposé que je sois impolie ou idiote. Il avait probablement cru que j'étais choquée par la vision de son frère ainsi blessé. C'était très prévenant de sa part d'essayer de détendre l'atmosphère et je lui en fus reconnaissante, me détendant imperceptiblement. Certes, j'étais toujours aussi tendue que la corde d'un arc, mais au moins je n'avais plus une expression crispée. Je parvins même à arborer un sourire assez engageant en répondant :

"J'espère en effet qu'il pourra se remettre de ses blessures rapidement. J'ai entendu parler des talents de votre père et si votre soeur lui ressemble, il y a fort à parier que cela ne soit qu'un mauvais souvenir d'ici peu."

De fait, le seigneur Elrond était connu pour cela. Je ne l'avais croisé qu'à quelques reprises avant de venir sur le continent... Un homme charmant, par ailleurs. Ce rappel de leur parenté me détendit d'autant plus et je me permis d'en glisser mot :

"J'ai eu le plaisir de rencontrer le seigneur Elrond il y a quelques années de cela. Peut être cela vous satisfera-t'il d'apprendre qu'il semblait fort bien s'accommoder de sa vie en Valinor. Je pense qu'il vous plaira de savoir que notre famille est toujours prête à accueillir de nouveaux membres, même issus d'une parenté quelque peu lointaine."

De fait, ils étaient eux même mes... Arrière arrière petit neveux, avec quelques générations supplémentaires. Cependant, on aurait en vain cherché quelque trait de famille entre nous. J'étais du blond argenté typique de valinor, là où ils avaient une chevelure de jais. Ma peau était d'une teinte presque scintillante face à la leur, exposée aux éléments et à la réalité du continent depuis l'enfance. En un sens, j'étais bien plus proche physiquement des valars que les elfes actuels ne le seraient jamais. Cependant, j'avais récemment appris que cela ne m'empêcherait pas de le trouver fort aimable... Il suffisait de voir ma relation avec Lalwendë pour comprendre cela. Mise à part  Melusiel, mon second, je ne m'étais jamais sentie aussi proche de quiconque qui ne soit pas de ma famille. J'étais donc prête à faire pour Lalwendë des efforts que je n'aurais consentis pour personne d'autre. Puisqu'Elladan ne semblait pas trop gêné de parler de son aventure, je décidai de choisir ce sujet.

"Je suppose qu'il serait bien superflu de vous demander si vous avez fait bon voyage... Cependant, je m'interroge sur l'issue de votre quête. Êtes vous parvenus à trouver ce qui cause tant de dégâts ?"

"J'ai eu le plaisir de rencontrer le seigneur Elrond il y a quelques années de cela. Peut être cela vous satisfera-t'il d'apprendre qu'il semblait fort bien s'accommoder de sa vie en Valinor. Je pense qu'il vous plaira de savoir que notre famille est toujours prête à accueillir de nouveaux membres, même issus d'une parenté quelque peu lointaine."

Ce fut un sentiment étrange qui traversa l’esprit d’Elladan lorsqu’il entendit une elfe originaire des terres immortelles évoquer le nom de son père comme si elle le connaissait. Le temps s’était écoulé trop vite depuis qu’il avait quitté la terre du milieu accompagné de Célébrian son épouse. Tant de choses étaient survenues, tant de situations instables et dangereuses qui avaient pesé lourd sur les épaules des jumeaux et surtout sur ceux d’Elladan qui était toujours resté là, à proximité de la menace venue du nord. Valinor demeurait un endroit inconnu pour le seigneur elfe qui n’avait jamais pris de navire pour les terres immortelles. A vrai dire il se demandait bien à quoi cela pouvait ressembler et n’avait que les récits de ceux qui en étaient revenus pour en esquisser quelques images dans son esprit. Cependant et comme c’était le cas pour Elrohir et sans doute aussi pour Lalwendë, il jugeait la vie là-bas trop monotone pour s’en accommoder. Peut-être qu'il reverrait son jugement dans quelques millénaires, lorsqu’il se sentira fatigué par les nombreuses épreuves que peut apporter la vie ici en terre du milieu. Quoi qu’il en fût, le coeur du fils d’Elrond fut soulagé d’apprendre que son père, lui, ne regrettait pas le choix de sa paisible vie loin de la terre du milieu, auprès de celle qu’il avait toujours aimé.

“ C’est en effet une nouvelle qui n’est pas sans me réconforter ! Nous avons toujours été proches de nos parents malgré les événements, la distance … Et les savoirs heureux et comblés soulage mon coeur ! Je vous remercie de m’apporter de telles nouvelles “ répondit alors le seigneur d’imladris en affichant un sourire léger mais sincère à l’attention de celle qui venait de lui confirmer ce qu’Elrohir et Lalwendë avaient pu ressentir quant au bonheur des parents exilés en Valinor. Ca n’était pas qu’ils ne les croyait pas, mais juger du bonheur de sa famille peut être parfois plus difficile pour quelqu’un de cet entourage, or là il s’agissait d’un point de vue neutre ce qui excluait davantage la subjectivité.

" Je suppose qu'il serait bien superflu de vous demander si vous avez fait bon voyage... Cependant, je m'interroge sur l'issue de votre quête. Êtes vous parvenus à trouver ce qui cause tant de dégâts ?"

La question d’Astriel quant à la résolution du problème laissa Elladan songeur. Ce dernier se rappela que dans l’urgence de la situation après l’explosion provoquée par la torche d’Elrohir, personne n’avait été vérifié ce qu’il en était du cadavre d’araignée à l’origine de ce fléau. Néanmoins cela devait avoir eu l’effet escompté car quelques heures plus tard, les hommes du gondor qui les avaient accompagné leurs avaient rapporté que les affluents de l’anduin ne semblaient plus pollués par une quelconque substance. C’était le principal ! Alors Elladan reprit ses esprits en résumant leur aventure à son interlocutrice

“ Nos investigations nous ont menés jusqu’au nord est, plus en amont de l’Anduin. Aux abords des montagnes et jusqu’au coeur d’un souterrain aussi sombre que morbide nous avons fait face à des dizaines d’araignées dont certaines étaient énormes. Des maudites descendante d’Ungoliant ! Dans certaines salles, nous sommes parvenus à sauver quelques gondoriens prisonnier de ces horribles cocons poisseux et promis à une funeste sort. Je ne vais pas vous compter tous les détails de notre aventure mais pour finir il n’y eut qu’Elrohir et moi même qui finîmes par trouver la source de ce fléau. Un gigantesque et monstrueux cadavre putride et nauséabond d’Araignée gisait à proximité d’une rivière souterraine. Le poison de son énorme abdomen se déversait dans l’eau et polluait la rivière qui charriait ce produit à sa surface en contaminant ensuite les autres cours d’eau sur lesquels elle affluait. “

Elladan fit alors une petite pause pour ne pas conter son histoire d’un seul trait. D’autant que le visage d’Astriel semblait se crisper à mesure qu’il évoquait les maudites créatures. Il comprit rapidement que cela devait être difficile à imaginer pour quelqu’un venu de valinor que d’avoir à faire face à de telles araignées. En réalité il ignorait totalement que l’elfe avait eu le malheur de rencontrer ces mêmes créatures depuis son arrivée en terre du milieu. Néanmoins après quelques secondes il reprit pour conclure :

“ Elrohir avait remarqué qu’en approchant sa torche de certaines éclaboussures de cet abject liquide, celui-ci s’embrasait en de multiples étincelles. Nous étions pressés par le temps et nous devions agir vite, alors vous l’aurez compris, Elrohir se désigna pour mettre le feu à tout ça en lançant sa torche de loin. Malheureusement sa fuite fut moins rapide que la vitesse de propagation de l’explosion. La suite vous l'imaginez aisément. Nous sommes sortis avant que tout ne s’écroule et plus tard les hommes du gondor ont constaté que tout semblait rentrer dans l’ordre. “

Je ne fus pas déçue de l'accueil que le jeune elfe fit à mes nouvelles de son père. Hélas, je n'avais guère rencontré sa mère et ne pouvais rien affirmer de ce côté. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle je ne l'avais pas mentionnée. Cela dit, le sourire d'elladan me tranquilisa quant à la possibilité que nous ayons une conversation cordiale. J'étais rassurée de constater que j'avais probablement choisi la bonne entrée en la matière. Après tout, j'aurais moi même été transportée de joie si d'aventure je recevais des nouvelles positives de mes proches restés au pays. M'a demandé quant au déroulement de leur aventure, pour sa part, n'eut pas tout à fait la même réception. Il lui fallut un instant pour répondre et je me demandai brièvement si je n'avais pas commis un impair en abordant le sujet. Inquiétude qui fut bien vite oubliée lorsqu'il me répondit avec le plus grand sérieux : 

“ Nos investigations nous ont menés jusqu’au nord est, plus en amont de l’Anduin. Aux abords des montagnes et jusqu’au coeur d’un souterrain aussi sombre que morbide nous avons fait face à des dizaines d’araignées dont certaines étaient énormes. Des maudites descendante d’Ungoliant !"

À ces mots, mon sang se glaça dans mes veines. Ainsi, ces infimes créatures ne se contentaient pas d'attaquer de front, mais se plaisaient également à affamée et empoisonner l'innocente population du continent. Leur infâmie ne connaissait elle donc aucune limites ? À mesure que la suite du récit se déroulait, je me sentis trembler de frayeur. La simple idée de me trouver en présence de plus d'une seule de ces monstrueuses bêtes me figeait d'effroi et cela ne manqua évidemment pas de s'afficher très clairement sur mon visage.

" Dans certaines salles, nous sommes parvenus à sauver quelques gondoriens prisonnier de ces horribles cocons poisseux et promis à une funeste sort. Je ne vais pas vous compter tous les détails de notre aventure mais pour finir il n’y eut qu’Elrohir et moi même qui finîmes par trouver la source de ce fléau. Un gigantesque et monstrueux cadavre putride et nauséabond d’Araignée gisait à proximité d’une rivière souterraine. Le poison de son énorme abdomen se déversait dans l’eau et polluait la rivière qui charriait ce produit à sa surface en contaminant ensuite les autres cours d’eau sur lesquels elle affluait. “

Quelle abomination... Aurais-je fini dans un cocon moi aussi, si la garde d'Erebor n'était pas intervenue à temps ? Ma peau d'ordinaire d'un blanc de porcelaine prit une teinte de cendres à cette pensée. Le récit du cadavre pourrissent et de ce qu'il dégageait me donna une telle nausée que je dus me contraindre à des exercices de respiration pour ne pas me sentir mal. Quel esprit malfaisant avait pu mettre au point un tel plan maléfique dans le seul but de nuire à toute vie aux abords des cours d'eau ? Car cela n'avait pas touché que les humains, mais également la faune et la flore... Un tel crime ne pouvait rester impuni... J'espérais sincèrement qu'ils avaient trouvé le responsable et écouta la suite avec une attention toute particulière :

“ Elrohir avait remarqué qu’en approchant sa torche de certaines éclaboussures de cet abject liquide, celui-ci s’embrasait en de multiples étincelles. Nous étions pressés par le temps et nous devions agir vite, alors vous l’aurez compris, Elrohir se désigna pour mettre le feu à tout ça en lançant sa torche de loin. Malheureusement sa fuite fut moins rapide que la vitesse de propagation de l’explosion. La suite vous l'imaginez aisément. Nous sommes sortis avant que tout ne s’écroule et plus tard les hommes du gondor ont constaté que tout semblait rentrer dans l’ordre. “

Je ne fis tout d'abord aucun commentaire, me contentant de respirer lentement afin de garder mon calme. Il était bien inutile de paniquer à présent qu'ils avaient réglé le problème. Cependant, une idée me taraudait à présent et ne voulait plus sortir de mon esprit... Cette aventure signifiait elle que les creatures disposaient de tout un réseau de galeries secrètes qui parcourait l'entièreté du territoire ? Il semblait bien peu probable qu'elles n'aient agi maintenant que par hasard. Il y avait donc deux possibilités. Soit elles disposaient bel et bien d'une espèce de route dissimulée sous nos pieds, leur permettant d'aller et venir dans tout le continent comme bon leur semblait-perspective qui m'horrifiait au plus haut point-, soit elles avaient en réalité utilisé leur petite attaque un peu plus tôt-celle la même dont j'avais été victime à l'instar de bien d'autres personnes- pour dissimuler le passage d'un grand nombre des leurs d'un endroit à un autre. Après tout, il était de notoriété publique que les montagnes avaient été creusées par les nains en tout sens, mais disposaient déjà d'un important réseau de galeries plus anciennes encore... Quoi qu'il en soit, cela semblait très clairement prémédité et soigneusement planifié.

Tout au long de cette réflexion, j'avais croisé les bras tout d'abord pour me donner une contenance. Finalement, cela était devenu plus rassurant qu'autre chose, comme si j'essayais de m'enlacer moi même afin de me promettre que tout allait bien se passer. C'était tellement pathétique que je me repris aussitôt et essayai de répondre avec autant de calme que possible :

"Je vous avoue que je ne m'attendais pas à cela. J'ai eu... L'occasion... De croiser la route de l'une de ces infâmes créatures. Je suis impressionnée par le courage et l'intelligence dont vous avez tous fait preuve en cette affaire."

Aurais-je été moi même confrontée à ces bêtes... Il y avait fort à parier que je n'aurais pas été au bout de ma quête. Plus encore s'il avait été question de pénétré dans de sordides boyaux sous terrains, même si cela aurait signifié la ruine d'un royaume. J'examinai plus attentivement mon interlocuteur, cherchant... Eh bien, je ne savais pas quoi exactement. Quelque chose qui expliquerait pourquoi il avait poursuivi son chemin alors que j'aurais fui à toute jambes, peut être. En tout cas, je ne me tiendrais pas tranquillement là, à relater les faits comme ci je contais une sortie pique nique dans la campagne. Un énième frisson me parcourut et j'essayai de dissimuler mon trouble par un sourire quelque peu forcé.

Mon examen attentif de sa physionomie ne révéla rien de particulier, si ce n'est une heureuse combinaison de caractéristiques physiques. Il était beau, cela va sans dire. Cependant, l'oeil averti pouvait déceler dans ses traits une très légère dureté, qui fort heureusement ne lui donnait aucun air sévère mais plutôt quelque chose d'indéniablement viril. Il devait s'agir là d'un héritage de son sang humain, mais suffisamment discret pour être agréable à regarder. Bien qu'ils aient été malmenés par le trajet, ses cheveux étaient indéniablement soignés et bien entretenus. Plus athlétique que réellement musclé, il avait une carrure que l'on attend d'un homme d'action, sans pour autant être outrageusement cultivée. C'était d'ailleurs le plus bel homme que j'aie vue depuis des lunes, à la réflexion. A moins que le fait d'évoluer auprès d'humains n'ait émoussé mon goût de la beauté, ce qui était fort possible. J'éloignai cette pensée et gratifiai mon interlocuteur d'un sourire plus doux avant de poursuivre :

"J'espère que tout ceci n'aura pas été vain et que la situation va rapidement s'améliorer. L'état de la faune et de la flore environnante est des plus préoccupant. Quel malheur que le pays ne dispose pas de quelques Ents pour le remettre en état !"

Il était bien connu que ces êtres avaient un talent pour entretenir et faire fleurir les landes les plus désolées. Leur aide eût été précieuse dans un cas pareil, mais hélas il n'en restait plus guère dans les environs, d'après ce que j'avais entendu dire.

Finalement, il était intéressant de remarquer que le silence de plomb et l’ambiance gênante qui étaient venus peser sur cette rencontre semblaient s’être évaporés pour laisser la place à quelque chose de bien moins embarrassant. Elladan était quelque part soulagé et ne pouvait également refouler une certaine fierté d’avoir su surpasser son côté légèrement taiseux qui ne faisait que prendre de l’ampleur à mesure du temps qui s’écoulait. Habitué à être entouré de guerriers la plupart du temps, où des personnes familières vivant à Imladris, le fils d’Elrond n’avait pas tant que cela l’occasion de rencontrer des gens depuis qu’Elrond leur avait laissé à lui et à Elrohir les clé de sa demeure et de toute l’eregion. Or les deux frères avaient toujours en tête cette période loin de ces grandes responsabilités, où ils avaient le loisir de pouvoir aller et venir à leur guise, notamment lorsqu’ils étaient devenus membres ô combien précieux de la compagnie grise.

Elladan comprit son erreur lorsque Astriel lui raconta avoir déjà fait la rencontre de l’une de ces créatures. Sans doute un instant difficile à vivre pour quelqu’un n’ayant jamais connu la terre du milieu, là où le mal pouvait prendre se présentait sous de bien différentes formes.

“ J'espère que tout ceci n’aura pas été vain et que la situation va rapidement s’améliorer. L’état de la faune et de la flore environnante est des plus préoccupant. Quel malheur que le pays ne dispose pas de quelques Ents pour la remettre en état ! “

Elladan resta songeur quelques instants. On pourrait croire que cela était dû à la dernière remarque d’Astriel mais ce ne fût pas la seule véritable raison. En réalité le petit sourire qu’elle lui adressa au début de sa phrase perturba notre seigneur elfe qui n’avait jusqu’alors pas vraiment remarqué à quelle point la grâce des eldar pouvait se remarquer sur ce doux visage aux traits fins. De plus, ce regard aux reflets violets restait assez intimidant tant cette coloration d’iris n’était pas chose commune. Indéniablement Valinor devait être un lieu de beauté hors du commun que cette terre du milieu ne connaîtrait sans doute jamais. Un beauté qui transparaissait sur ses habitants, sur ceux qui avaient toujours vécu dans la lumière et la grâce des valar.

Reprenant ses esprits quelques secondes plus tard, le fils d’Elrond songea en effet à la réflexion d’Astriel.Peut-être que le gondor ne disposait pas d’Ents pour se charger de rendre à la nature sa splendeur, mais en cette terre du milieu ils n’étaient pas les seuls à pouvoir agir dans ce but. Aussi une idée germa dans l’esprit d’Elladan qui ne put retenir un sourire enthousiaste avant de prendre la parole

“ Vous avez raison, la nature doit être soignée et débarrassée de ces immondices qui l’ont injustement souillée. Nous ne pouvons qu’implorer la grâce de Yavanna Kementari pour que son oeuvre perdure, mais nous disposons aussi en cette terre du milieu de personnes totalement vouées à la protection de cette nature… Je pense que nous devrons aller quérir l’aide de Radagast le brun, un puissant istari dont le dessein est de protéger avant tout la faune et la flore de ce monde. Elrohir le connaît et parviendra sans doute à le convaincre d’agir dans ce but “

En effet, peu avant que les elfes menés par les fils d’Elrond n’aient débarrassé la forêt des créatures maléfiques qui la peuplaient, Elrohir avait accompagné Radagast et Palando en Dol Guldur pour désenvouter et conjurer le mal qui perdurait au sein de cette cité emplie de malfaisance. Si quelqu’un était à même de pouvoir convaincre le mage brun d’intervenir, c’était bien son frère qui, de plus, venait de payer de sa personne pour endiguer ce fléau.

"Vous avez raison, la nature doit être soignée et débarrassée de ces immondices qui l’ont injustement souillée. Nous ne pouvons qu’implorer la grâce de Yavanna Kementari pour que son oeuvre perdure, mais nous disposons aussi en cette terre du milieu de personnes totalement vouées à la protection de cette nature… Je pense que nous devrons aller quérir l’aide de Radagast le brun, un puissant istari dont le dessein est de protéger avant tout la faune et la flore de ce monde. Elrohir le connaît et parviendra sans doute à le convaincre d’agir dans ce but “ 

Mon sourire s'élargit à la mention de cet homme dont j'avais entendu parler par mon frère. C'était l'un de ses maîtres et j'avais en effet cru comprendre qu'il avait un talent tout particulier avec la nature. Voilà qui pourrait singulièrement arranger les affaires de l'empire... 
 
"Je pense que c'est la une excellente idée. Si l'on ne fait rien pour guérir la terre je crains que les survivants du fléau lui même ne meurent de faim par la suite... Peut être mon frère pourrait il également apporter son coucous à ce niveau ? Il est vrai que n'en étant guère pourvue moi même j'ai tendance à oublier que l'on peut parfois apporter une solution magique à bien des problèmes."  

En effet, je n'étais pas une magicienne, au contraire d'Araekin. Enfin, pas au sens strict du terme, bien que l'on dise parfois que ma voix avait quelque chose de magique. Je m'en enorgueillissais d'ailleurs, bien que n'en faisant pas vraiment usage dans un but autre que récréatif. Ah, que ne donnerais je pour un bal... Danser et chanter, voilà les plaisirs les plus raffinés du monde. Dire que j'en étais privée depuis si longtemps... L'heure n'était pas à la fête, aussi n'étais je pas près de m'y remettre. Bien que j'aie eu de multiples occasions de faire preuve de mes talents de danse l'âme, comme on m'appelait, cela n'avait rien à voir avec un plaisir. Je déplorais presque de devoir m'y atteler... Je contains un soupir attristé à cette idée mais essayai de garder un extérieur aimable. C'était la moindre des choses : après l'épreuve qu'ils venaient de vivre, les membres de cette famille avaient bien droit à un peu de chaleur. 
 
"Étant données les circonstances particulières de votre retour je pense me retirer afin de vous laisser vous reposer du voyage. J'ai pour projet de demeurer encore quelques jours à Minas Tirith avant de regagner les havres gris et ma compagnie. Aurais-je le plaisir de vous y rencontrer à nouveau ? Il y a bien trop longtemps que je n'ai pu apprécier la compagnie de mes semblables. A l'exception de Lalwendë et d'Ëaron bien entendu." 

Bien qu'adorable, on ne pouvait prétendre que l'enfant eût une conversation particulièrement passionnante... D'autant que je prenais garde en sa présence d'éviter les sujets sensibles. Les tout petits étaient réputés pour être fort impressionnables et je n'avais aucune envie de lui causer un quelconque traumatisme.

  "  Étant données les circonstances particulières de votre retour je pense me retirer afin de vous laisser vous reposer du voyage. J'ai pour projet de demeurer encore quelques jours à Minas Tirith avant de regagner les havres gris et ma compagnie. Aurais-je le plaisir de vous y rencontrer à nouveau ? Il y a bien trop longtemps que je n'ai pu apprécier la compagnie de mes semblables. A l'exception de Lalwendë et d'Ëaron bien entendu."

Malgré les choses à gérer en Eregion et plus particulièrement à Imladris, il était plus qu’incertain que les deux frères ne décident de rentrer chez eux. Il y avait eu cette promesse faite à Akasha concernant la recherche d’Eldarion et qui les tiendrait certainement éloigné de leurs territoires pour quelques temps s’ils venaient à s’y atteler. De plus et suite aux derniers mots échangés avec Astriel, ils devraient également faire un large détour en direction de Mirkwood pour aller à la rencontre de Radagast, ce qui pouvait concorder avec l’idée de Lalwendë de rallier la Lothlorièn, mais cela Elladan l’ignorait encore. Dans tous les cas ils demeureraient à Minas Tirith encore quelques jours, ne serait-ce que pour imposer une petite période de convalescence à Elrohir.

“ Je pense que nous demeurerons ici pour quelques jours également. Nous avons encore bien des choses à faire dans les environs et Elrohir devra respecter les prescriptions de notre soeur afin qu’il se rétablisse. Ainsi je serais ravi de pouvoir échanger avec vous à nouveau. Ce serait une belle occasion pour vous d’en apprendre plus sur ces lieux et pour moi de vous écouter évoquer votre vie sur ces terres immortelles qui me sont inconnues. “

Elladan se leva alors en affichant un sourire sincère. Lui aussi s'apprêtait à quitter les lieux pour laisser la petite famille se retrouver et pour lui aussi prendre un repos bien mérité dans les quartiers qui lui furent affectés. Sur cet entrefait Lalwendë revint et s’excusa une nouvelle fois de s’être absentée. Astriel tout comme Elladan lui expliquèrent qu’ils étaient sur le point de regagner leurs quartiers respectifs, puis la saluèrent avant de prendre congé. Derrière la porte qu’un garde venait de refermer juste après la sortie des deux elfes, Elladan salua convenablement Astriel dans ce langage Quenya que lui et son frère aimaient tant employer.

“ Mara Mesta ! “ [Aurevoir] prononça-t-il de manière solennelle en inclinant la tête pour saluer la proche amie de Lalwendë. Puis le seigneur elfe prit la direction de ses quartiers, quelque peu épuisé par la dernière aventure à laquelle il avait prit part.