Rencontre inattendue

La Terre du Milieu avait… très profondément changé… bien plus qu’il ne l’avait cru, en se contentant dans un premier temps de simples missives et des nouvelles rapportées par les Elfes Sylvains. Même en parlant assez régulièrement avec des derniers, on ne pouvait guère se faire un aperçu fidèle de ce qui se déroulait dans le vaste monde, ils voyageaient peu et se mêlaient tout aussi peu aux affaires des Hommes et des Nains, voire à celles de leur propre peuple. C’était bien pour cela que Maedhros avait toujours apprécié leur compagnie, la solitude était un parfois un bon remède, mais aussi la compagnie de personnes peu avides de grands conseils ou d’envie de bouleverser les choses. Beaucoup de troubles, pourtant, avaient secoué ces contrées, à travers les âges, certains tenaient encore. Les Hommes étaient partout… Beaucoup plus qu’autrefois. Même si ça ne devrait pas l’étonner, pourtant, ils avaient plus d’enfants en moyenne que les siens, et plus vite surtout, leurs vies étaient si courtes. Leur capacité à s’adapter à n’importe quel endroit pour vivre puis résister à tout et n’importe quoi par la suite avait toujours assez fasciné Maedhros. Les Humains étaient tellement solides, même s’ils étaient moins forts physiquement que les autres races, et résistants. Ils n’abandonnaient pas facilement, un trait de caractère qu’il avait toujours apprécié. Quoi qu’il fallût apprendre, parfois, à le faire…

Voilà déjà assez longtemps qu’il voyageait, seul, et ses pas avaient fini par le mener vers l’Ithilien. Un voyage passé sans trop d’encombres, il s’était fait discret, plus particulièrement encore en traversant les contrées Humaines. Non pas qu’il ait quoi que ce soit à se reprocher – pas vis-à-vis des Hommes en tout cas – mais il n’avait pas souhaité avoir la compagnie de qui que ce soit. Lors de son passage sur les terres du Rohan, il avait surpris quelques rumeurs un peu sombres, sans s’attarder, puis s’était rendu ensuite vers le Gondor. Dorénavant, assis sur un petit rocher près d’un feu de camp, il observait l’horizon, vers le Mordor… Une part de lui, raisonnable, lui soufflait de ne pas s’approcher de ces frontières, et une autre part, celle brûlant son esprit depuis bien des siècles, l’incitait à plus s’approcher. Depuis déjà de longues années, le Mordor était discret, bien trop discret pour la tranquillité d’esprit de l’Elfe. Il connaissait leur noir ennemi et Sauron… Cette tranquillité d’apparence ne pouvait que cacher la plus noire et terrible de toutes des horreurs ! Ils ne demeuraient jamais inactifs et bien tranquilles, jamais, même si leurs préparatifs devaient durer plusieurs siècles, ils étaient toujours en quête de noirs desseins. Alors que fabriquaient-ils, cette fois-ci ? A quel moment le Mordor allait-il vomir une armée considérable sur les terres encore libres et en paix ?

Néanmoins, et peu importe tous les doutes qui l’assaillaient, il n’était pas encore suffisamment cinglé pour aller s’aventurer seul là-dedans. Ce n’était pourtant pas l’envie qui lui en manquait… Las, le peu d’instinct de survie qui lui restait encore lui recommandait de ne pas faire de conneries. Il avait déjà donné, un séjour auprès de Sauron ou de son cher patron n’était pas très recommandable pour la santé physique et mentale. Un rictus lui pinça les lèvres, en y repensant, et il passa un peu la main dans ses cheveux coupés très courts, glissant le doigt sur une ville cicatrice y partant et coulant ensuite dans la nuque, puis le dos. S’il n’avait eu les oreilles pointues, il passerait facilement pour un homme. Un peu grand, certes, mais un homme tout de même. Laissant retomber la main, il soupira longuement, et se força à détourner les yeux du Mordor. Si Morgoth attaquait à nouveau, il ne sera bien sûr plus question d’exil ni de retrait. Ils devront tous résister, même s’il n’y avait… plus guère chance de vaincre. Ils pouvaient repousser ses armées mais pas purger pour de bon leur monde du noir Valar. Sentant que la haine commençait à reprendre le dessus, il se leva d’un bond, éteignit avec soin le feu de camp, puis récupéra ses quelques affaires de voyage, avant de se remettre en route. De tourner le dos au Mordor et à tout ce qui pouvait s’y dissimuler.

De retour sur les routes, il rabattit sur sa tête son capuchon, pour cacher au moins ses oreilles pointures aux regards, et ne pas trop attirer l’attention. Même si le Gondor n’était pas en guerre contre les siens, il n’avait pour autant pas croisé foule d’Elfes, inutile d’attirer la curiosité des Hommes en se venant chez eux. Quant aux Elfes, il les évitait, très clairement. Pour ne pas s’entendre hurler Fratricide d’un ton haineux. Ils auraient raison de le faire, mais Maedhros ne voulait plus se battre avec eux et n’avait, de toute manière, rien à dire pour sa défense. Il ne se pouvait se pardonner lui-même de ses actes, impensable d’oser demander aux autres leur pardon. Une bile amère lui remonta en bouche, tandis qu’il marchait, en songeant à ces paroles de Sauron, restées gravées au fer rouge dans sa mémoire. « Tu es juste comme nous, en réalité. Un fratricide. Un assassin. ». Si seulement il s’était débarrassé de lui aussitôt ! Il n’y aurait pas eu… Nouveau soupir. Il dévia un peu de son trajet, pour emprunter cette fois une nouvelle route, un peu plus fréquentée par quelques caravanes de marchandises ou des convois, parfois des voyageurs à pied, comme lui. Voir un peu de monde pourrait l’aider à ne plus s’enfermer dans ses pensées… Peut-être. Le soleil s’élevait peu à peu dans le ciel, la chaleur également. Une chaleur forte, d’ailleurs, pour cette saison, c’était curieux.

Midi approchait, lorsqu’il arriva en vue d’un village, assez imposant, dont il entendait d’ici l’activité perçante. Pour une fois, autant chercher un peu de compagnie. Il aimait bien les Hommes. Et, quelque part, les enviait. Les Mortels n’avaient pas à porter si longuement le poids de leurs erreurs et de leurs choix, ils n’avaient pas à vivre en portant avec eux des siècles de souvenirs ou de douleurs. Beaucoup d’entre eux, selon leur rang social, n’avaient pas non plus à prendre des décisions qui impacteront durablement leurs terres pendant les siècles à venir. Impossible, cependant, d’imaginer dans quel état d’esprit ils menaient leurs vies. Il n’avait pas côtoyé assez d’Humains pour s’en faire une idée, et de toute manière, les Humains qu’il avait connus autrefois ne vivaient pas de la même façon que ceux d’aujourd’hui. Dans le village, il se glissa en faisant attention de ne bousculer personne, on aurait dit une immense fourmilière, et beaucoup des Hommes ici se sentaient visiblement obligés de courir, ou marcher bien vite, dans les rues. Il avait raté quelque chose ou était-ce simplement une habitude… ? Il finit par arriver sur une place plus calme, puis prit un peu de temps pour manger un peu, en observant les passants. Voir du monde l'aida à se calmer un peu, dans un premier temps, et plus encore, écouter les conversations de passage. Pas mal d'Humains parlaient d'une sécheresse et de manque d'eau. De problèmes avec les récoltes...

Une bonne heure plus tard, il quitta finalement le village, empruntant à nouveau une route plus déserte, filant vers la forêt et des marécages, à quelques lieues de là. Assez vite, il fut de nouveau seul, marchant vite, bien que n'ayant pas une idée précise de destination en tête. Peut-être bifurquer ensuite vers la capitale, curieux de voir ce qui avait changé. Tout valait mieux que céder à l'impulsion de repartir vers le Mordor. En parvenant proche d'un fleuve, dont le niveau était effectivement tombé bien bas, il ralentit un peu l'allure en apercevant plus loin une silhouette qui lui semblait vaguement familière... La démarche n'était en tout cas pas celle d'un homme. il s'approcha encore un peu plus, sur ses gardes par réflexe, puis vit vraiment la personne bien en face. Un visage familier, semblant surgir brutalement des ombres d’un passé lointain.

– Rog ?!

Maedhros n’était pas certain que ce soit bien lui, mais en s’approchant d’un pas, il en eut bien la confirmation. Tomber sur un proche du roi de Gondolin, en plein cœur du Gondor, n’était pas du tout ce à quoi il s‘était attendu. Et il regrettait déjà d’avoir lâché son nom à haute voix. Sa réputation, et évidemment celle de ses frères, n’était pas plus glorieuse à Gondolin qu’ailleurs. Enfin, maintenant, c’était un peu trop tard pour les regrets… Il baissa quand même son capuchon, les cheveux très légèrement ébouriffés par le mouvement.

– Voilà… très longtemps que je ne t’avais plus revu. Qu’est-ce qui peut attirer l’un des forgerons émérites de Gondolin au Gondor ?

Après son entrevue avec l'une des filles d'Arachne et la mystérieuse rencontre d'un Oriental pas comme les autres. Rog avançait vers le Mordor. Transmettant quelques consignes à ses soldats avant son départ. Il pouvait enfin quitter la soie, les huit pattes et les ténèbres du réseau de galeries.

Avec son nouveau compagnon de route, Rog descendait lentement les marches depuis lesquels on pouvait observer les hauts remparts noirs et la tour de sorcellerie. La forteresse tout entière était recouverte de sombres maléfices, mais elle n’avait pas encore son aura fantomatique qui se reflétait sur chacune des pierres taillées par les Numénoréens d’antan.

Si l’exercice des marches n’était pas compliqué pour l’agilité elfique dont pouvait faire preuve Rog, la tâche s’avérait longue toutefois, du moins si l’on voulait descendre avec un pas sûr et mesuré. S’arrêtant un bref instant pour se changer les idées de cette ennuyeuse descente. Le seigneur de Minas Morgul percevait de ses yeux les cieux aussi noirs que le cœur de Sauron. La masse nuageuse était parfois orageuse, mais souvent elle relâchait des cendres qui venaient se poser un peu partout. Ce n’était pas des cendres si nombreuses qu’elles recouvraient l’entièreté de la région. Car, au vu de la distance avec l’Orodruin, ici la forteresse et ses alentours n’étaient que peu touchés. Mais le décor ravivait de très anciens souvenirs à la mémoire de l’elfe. Ses souvenirs venaient de l’époque durant laquelle le sorcier se trouvait en Gondolin. Là-bas ce n’était pas de la cendre, mais bien de la neige provenant des montagnes tout autour. Seul durant un seul jour, la cendre venait régner en maître sur la cité, c’était ce même jour que la maison de Rog venait à tomber en déclin.


Puis une pierre tombant au pied de la falaise venait à le sortir de ses songes. La pierre provenait d’un bloc qui s’était détaché sous la force de la poigne de Krell. Le mystérieux empereur d’orient dont l’origine de sa force restait encore un mystère. Peut-être Sauron avait-il une explication sur la force de ce zombi, mais nul doute qu’évoquer le nom de Krell au seigneur du Mordor n’était pas sans conséquence. Et Rog bien qu’il dût au noir seigneur ses connaissances en magie noire, ne souhaitait pas vraiment avoir affaire avec lui. D’une part car son nouvel ami ne le verrait pas d’un bon œil et d’autres part car l’elfe n’avait pas vraiment pardonné à Melkor l’emprisonnement de sa femme. Peut-être était-elle toujours en vie et Rog voulait croire en ça. Et cela même si le poison de Tintallë commençait à agir sur son cœur.

Un fait pour le moins des plus étranges qui entourait Rog. Si nombreux étaient les elfes à voir leur aura basculer de la lumière aux ténèbres lorsqu'ils entraient au service de Morgoth. Le seigneur elfe lui avait toujours son aura de lumière. C’était comme-ci malgré ses actes il n’avait pas encore franchi le stade de non-retour. Toujours radiant, c’était peut-être même pour cela que Sauron n’aimait guère le voir. Cependant, au cœur de cette lumière chaleureuse, le poison convertissait peu à peu son être en noirceur. Ainsi serait-il prêt à sombrer le jour où il viendrait à tuer les siens. Peut-être qu’à son arrivée dans le palais de Mandos, Rog aurait droit à un pardon pour ses actes commis durant son voyage.


Enfin le duo se trouvait en bas des marches, sans tarder Rog enfilait une capuche. Et bien qu’il se demandât si Krell hésitait encore à faire demi-tour. Il espérait en même temps ne pas le voir faire cela. Marcher dans l’ombre des falaises, le duo parvenait à se faufiler jusqu’à l’entrée du col. Là ce n’était plus les orques qu’il faille esquiver, mais les hommes. Si l’humain de base était quelque peu lent et peu attentif à ses sens. Il écoutait toujours son instinct et seuls les rangers dérogeaient à cette règle. En effet, les soldats des bois avaient la fâcheuse manie à suivre des entraînements se trouvant à la limite de la capacité de leur race. Patrouillant dans les bois du Gondor, il faisait régner la loi de l’impératrice et cela d’une manière implacable. Mais aussi forts et rusés que pouvait l’être un ranger, jamais ô grand jamais il ne saurait atteindre le niveau des éclaireurs et des assassins elfes.

Dès l’entrée du col, ce n’était plus Rog en tête, mais bien Krell. Ce dernier semblait connaitre les alentours et notamment un passage peu surveillé par le Gondor. Peu surveillé voulant surtout dire pas surveillé. Il parlait toutefois d’une patrouille qu’il avait croisé à quelques lieux du sentier. Patrouille, qui à présent n’était plus.
La forêt bien dense permettait des déplacements furtifs pour le duo. La raison de leur présence en ces lieux étant le recrutement de compagnons pour Krell, dû moins cela était sûrement ceci et c’était ainsi que l’avait entendu Rog. Pour le seigneur de Minas Morgul l’objectif était tout autre, il avait notamment entendu parler d’une rumeur à propos d’un objet qu’il avait aidé à créer. La rumeur si grande était-elle, n’était connu que des aventuriers et de ceux qui venaient à les tuer, tel que des orcs ou des trolls en cette région. L’objet non pas sans valeur demandait toutefois de se rendre en Gondor, chose qui n’était pas aisée pour un habitant du Mordor. Mais une fois la frontière passée à plusieurs lieux après les patrouilles, les contrôles et guetteurs étaient beaucoup moins stricts et nombreux.


Par-dessus les arbres, le duo pouvait apercevoir des colonnes du fumées s’élever haut dans le ciel. Ces dernières ne semblaient pas être dû à un incendie ou à un grand bûcher. Aussi devait-il s’agir de cheminée. Et d’après la position de l’esprit de feu haut dans le ciel, il était l’heure chez les hommes de manger. Remettant en place sa capuche, Rog l’abaissait autant que possible, à tel point qu’on ne voyait plus que le bout de son nez et tout ce qui se trouvait en-dessous.

Marchant encore un peu plus, le village était visible. Mais avant lui se trouvait une personne en plein du passage. Krell avait eu la bonne idée de s’aventurer dans la forêt à l’arrivée du personnage, certainement pour se vidanger. Le voyageur au visage inconnu avait tout de même la silhouette d’un guerrier et bien qu’il semblât seul il ne fallait pas le sous-estimer.

Puis l’inconnu venait à prononcer quelques mots. Et cela juste après qu’un grand coup de vent venait ôter la capuche du seigneur elfe. Ces mots furent une étrange surprise pour Rog, car à priori le voyageur connaissait l’identité de Rog. Mais à ses mots, l’inconnu ne connaissait pas le noir seigneur elfe de Minas Morgul, mais le talentueux forgeron de Gondolin.


-Euh … Nous nous connaissons ? Je ne parviens pas à voir le visage qui se cache sous cette capuche. Aussi, il faudrait la retirer ou bien je ne risque pas de reconnaître qui que ce soit.


D’un autre côté Rog espérait qu’une fois de retour de sa pause pipi, Krell n’allait pas éventrer comme les rangers qu’il avait mentionné, le mystérieux voyageur.

– Euh … Nous nous connaissons ? Je ne parviens pas à voir le visage qui se cache sous cette capuche. Aussi il faudrait la retirer ou bien je ne risque pas de reconnaitre qui que ce soit.

Se connaître restait un bien grand mot, ils s’étaient peut-être adressés la parole… moins d’une dizaine de fois ? Peut-être plus, mais en se contentant de rapides saluts de passage, par pure politesse, comme lorsqu’on est invité chez une personne ou qu’on doit s’y rendre pour affaires, puis qu’on croise des habitants des lieux sans pour autant avoir affaire à eux. Maedhros se souvenait néanmoins des noms et visages de ceux et celles qu’il avait vu dans l’entourage de Turgon, lors de leurs rares rencontres, et de ceux vus lors de son passage, un peu plus long, lorsque Fingon l’avait sauvé. Rog était l’un d’eux, mais s’il l’avait oublié, de son côté, ça ne sera pas plus mal, très honnêtement. Ça fera peut-être une personne qui acceptera de lui parler normalement, sans vouloir lui cracher à la figure ?

Il eut un tout cas un bref moment d’hésitation, par pur réflexe, avant de lever la main et tirer son capuchon, pour dévoiler son visage au grand jour. Il préférait encore que Rog ne le reconnaisse pas, oui… Ou au mieux, comme un très vague souvenir, une personne dont on savait qu’on l’avait croisé quelque part, sans savoir où, et qu’on oubliait sitôt après. Las, il savait aussi qu’agir ainsi ne faisait qu’attirer les soupçons et la méfiance. Au moins était-il heureux de ne pas tomber sur certains, plus… Bref… Rog restait un de ceux que croiser n’était pas si désagréable, car il n’y avait aucun affrontement entre eux, aucun problème direct, et aucun des deux n’avait déjà pourchassé l’autre. Cela dit, Maedhros ignorait complètement ce que le forgeron était devenu, depuis tous ces siècles, comme il ignorait le sort de nombreuses de ses anciennes connaissances. Les voyages qu’il avait entrepris récemment étaient en partie faits pour répondre à ces questions.

– Nous avons dû nous croiser plusieurs fois à Gondolin. Si tu ne te rappelles pas, je m’appelle Maedhros, fils de Fëanor. Tu nous avais été décrit comme un forgeron talentueux, à cette époque.

S’il était là, peut-être avait-il quitté Gondolin depuis bien longtemps… Ou peut-être était-il juste en voyage ou en affaires avec le Gondor. Quoi qu’il en soit, Maedhros veillait à ne montrer aucun signe agressif, du moins, pas tant qu’on ne lui en manifestait pas. Il restait tout de même sur ses gardes, par habitude, et parce qu’il était parfois difficile de prévoir à quel moment leurs interlocuteurs allaient brutalement décider d’engager un combat, par envie de vengeance, par haine ou par simple dégoût. Néanmoins, Maitimo espérait fortement ne pas à nouveau en arriver là. D’une part car ils risquaient de se mettre à dos tous les gardes du coin, d’autre part parce qu’il ne voulait pas affronter les siens. Encore moins les tuer encore.

– Qu’es-tu devenu ? Tu avais disparu de la circulation, toi aussi, semble-t-il… Les nôtres ont-ils donc décidé d’abandonner leur lutte ?

Seules de brèves rumeurs leur étaient parvenus, sur leurs anciens compagnons, du fond des forêts où il avait élu domicile avec Maglor. Et ils n’avaient bien sûr pas pu déterminer lesquelles étaient fausses et lesquelles étaient vraies. C’était l’occasion d’en apprendre un peu plus, et plus encore, si c’était possible, essayer de savoir ce qui était arrivé précisément aux leurs, durant leur exil. Maedhros voudrait comprendre pourquoi tant d’entre eux avaient décidé de partir pour Valinor, ce qui pouvait bien justifier cette fuite à l’envers alors que les problèmes en Terre du Milieu étaient très loin d’être réglés. Pourquoi repartir, pourquoi maintenant, pourquoi oublier Sauron et Morgoth, pourquoi abandonner si vite, finalement ! Devaient-ils tout laisser aux Hommes puis fermer les yeux ? Il n’y aurait, définitivement, rien de plus rageant et pénible. Au même instant, juste après sa question, il vit un... "homme" ... ? Un homme sortir des bois et arriver vers eux, plus grand qu'aucun autre humain, dont l'aura n'était pas sans rappeler quelques souvenirs désagréable à Maedhros. Il se prépara à porter la main à son épée, dans le doute, passant le regard de ce type à Rog, puis inversement.

– C'est qu'on peut faire des rencontres intéressantes, ces derniers temps...

Pour le moment, il ne pouvait dire exactement ce qui clochait chez ce type, ni qui il était, mais il sentait bien qu'il avait un lourd problème. Même sans parler de son apparence, son aura seule le démontrait. Comme s'il était sorti tout droit de la bouche infernale du Thangorodrim.

Tandis que mon nouvel ami elfe se débrouillait fort bien pour descendre cet escalier, ce n'était pas mon cas, faire près d'un quart de tonne, sur des falaises glissantes, tranchantes et déjà craquelées par les millénaires n'était pas facile.

Bon, soyons franc, je n'avais pas si peur de me briser la nuque en tombant, sachant très bien que je finirais inéluctablement par la remettre en place et continuer comme si de rien n'était, mais tout de même, du charisme, du panache !

Ainsi, tandis que les sauts et glissades de mon partenaire était gracieux et souples, les miens...Étaient brutaux, assez peu discret et faisaient parfois résonner le sol et mon armure dans les vastes corniches rocailleuses autours de nous et dans la vallée sous nos pieds.

"Voyez, Rog, voyez ces terres pourtant dédié a la destruction, ce sont vos terres et voila longtemps que j'attends de rencontrer un serviteur de Sauron qui ne s'en remettrait pas entièrement a sa parole. Je pense l'avoir trouvé avec vous.

De belles terres, vraiment, combien de légions je pourrais forger ici si j'en étais le maître...

Mon histoire avec votre seigneur est...longue, je pense que vous trouverez maints ouvrages dans les bibliothèques qui en parlerons assez. Ma version est assez simple : Sauron ne mérites pas son titre de seigneur du mal. Il nous faut un être plus actif, moins égocentrique, moins dévoué a dominé toute chose comme nouveau grand chef. Il faut que nous autres, êtres maléfiques, nous rassemblions afin de déterminer comment nous pourrons assurer notre victoire sur les peuples "libres".
Voila déjà bien des années que je combat pour assurer la grandeur de mon peuple, les Orientaux, j'ai forgé un empire, l'empire de l'Est, pour mieux le voir sombrer suite a une grande alliance.
Je ne laisserais plus jamais ces pitoyables êtres me vaincre aussi facilement. Je les broierais sous mes bottes d'aciers ou je tomberais en morceaux en ayant essayé."

Alors que je continuais de descendre brutalement, je poursuivais aussi ma conversation avec le maître de Minas-Morgul. Je finis par en avoir assez de cette monotone descente et pris un malin plaisir a sauter de plusieurs mètres de haut, avant de retomber sur mes deux pieds.

Trois os de la jambe gauche brisés, deux dans le pieds droits. Une chute pareille aurait été mortelle pour n'importe quel homme.

"Comme vous le voyez, je ne suis pas n'importe quel homme, tout comme vous n'êtes pas n'importe quel elfe."

Je sentais déjà le picotement désormais habituel de la magie de mon corps réparé ces menues blessures. Quelques secondes après, j'étais déjà a nouveau capable de marcher dignement, une fois que mes os étaient a nouveaux soudés et remis en place.
Ah, qu'il était bon d'être un guerrier parfait au corps indestructible, voué pour l'éternité entière au plus grand banquet et orgies, sans oublier au carnage et a la violence.

Nous, êtres maléfiques de toutes races, sommes voués a la domination et a la damnation, telle est la voie.
Celle que nous avons choisie voila bien des années, quand nous avons décidé d'emprunter les passages obscurs que les autres ne voulaient pas prendre. Un fait valable pour moi, comme pour, sans doute, mon partenaire, bien que je ne connaisse pas son histoire.

Alors que nous devisions tranquillement de nos plans divers quant aux terres du Gondor, je pris soin de lui parler de ma rencontre avec les rangers de l'Ithilien, prouvant par la même ma parfaite capacité a triompher d'un peu près tout ce qui n'était pas doté de pouvoirs magiques en ces terres. Repenser a eux me faisait sourire, de pauvres mortels ne pouvaient rien contre moi, j'y avaient veillé en liant a tout jamais mon âme a cette carcasse immortelle. Toutes les flèches et les épées du monde ne pourront plus jamais trancher les fil de ma vie, j'étais désormais inévitable, une force sombre sur laquelle il fallait compter ou combattre, au même titre que Sauron.

Pour y avoir déjà été, je pris la tête une fois entrée en Ithilien, nous, moi et Rog, avions trouvé l'un en l'autre de bons partenaire de conversation. C'était assez nouveau pour moi que de parler poliment avec un elfe, encore plus avec un serviteur Sauron, mais nécessité est mère de nouvelles expériences.
Enfin, je crois que c'est comme cela qu'il dise, dans les bouquins. Je demanderais confirmation au prochain érudit que je torturerais.

Alors que nous avancions en ces terres, nous aperçûmes a un moment une fumée de chaumière, j'avais grande envie de massacrer quelques petites gens après avoir dut faire calme jeu dans les souterrains de Shelob. Ma nature était désormais celle d'un prédateur, ma puissance ne provenant que des meurtres de ma sinistre hache de guerre.

Un état de fait qui me correspondait grandement, faut-il le dire ?

Toujours est-il que je me sentais furieux a l'idée d'avoir dut être sympathique et gentil, voir aimable et servile, même avec des êtres comme ces si belles araignées.
Repensant a dame Zenda, je me surpris a penser qu'elle aurait une place toute trouvée dans mon harem personnel.
Krell, voyons !
Pardonnes moi auditeur ou lecteur, même immortel, un mâle reste un mâle.


"Vous buvez de l'alcool seigneur Rog ? Nous pourrions peut être vider quelques chopines dans l'auberge de ce village avant de le raser de la carte ? Je ne doute pas que vous ayez meilleurs boissons dans les caves de votre forteresse, mais j'ai toujours aimé les désagréments du voyages. C'est une chose qui renforce la volonté que de devoir boire un mauvais alcool avant de massacrer celui qui le fabrique.

Et puis, il y'aura peut être la bas quelques êtres facile a subjuguer pour constituer la première pierre de notre plan."

Mon casque de guerre sous le coude, je pris soin de tourner mon visage vers l'elfe, avec un sourire un brin moqueur sur le visage, une lueur noire et amusée dans les yeux.

Alors que j'attendais la réponse de l'elfe, je sortit du chemin juste avant que mon camarade ne fut en vue de son ancien compagnon. Pourquoi me foutre ainsi en forets ?

Simple, la vue d'un homme de deux mètres vingt, en armure rouge et noire de facture orientale et remontant tranquillement un chemin de campagne pour aller vers votre village, voila qui a tendance a exciter n'importe quel bled bien paumé comme celui que nous nous apprêtions a rejoindre.
Ainsi, je voulais au moins enlever une partie de cette armure, avoir l'air moins menaçant pour mieux les dévorer une fois rapproché.

Mais, alors que je n'avais même pas enlevé mes cuissardes, un bout de conversation me parvint du chemin d'où je venais de sortir.
Remettant mon lourd casque de guerre, je sortit a nouveau des bois pour vois que mon elfe s'était instantanément dédoublée, dans une variante plus habituelle pour les oreilles pointues comme lui. Je sortit des bois pour arriver a leur vues précisément au moment où Maedhros enlevait sa capuche

La, devant moi, un elfe a l'apparence plus sauvage et dépenaillé que ceux que j'avais jadis rencontrés en Rhovanion. Plus grand que ses comparses, aussi, bien plus petit que Rog ou que moi, certes, mais bien plus grand que la plupart des oreilles pointues que j'avais déjà croisés. Celui-ci avait l'air d'arpenter les routes depuis un moment déjà. Sa tenue avait connu des jours meilleurs, il avait une coupe de cheveux d'humain et non pas les longs cheveux longs classique des elfes. Alors que je m'approchais lentement, je pris bien le temps de détailler ce que je pouvais déjà voir de son physique. C'était un combattant, cela crevait les yeux pour le guerrier né que j'étais. Cicatrices de combats divers et variés, un regard fier, franc. Un elfe que j'aurais put apprécier avant de me dévouer a la cause des ténèbres.

Tandis que je m’avançais, plus curieux que vraiment agressif, les lourds bruits de pas de mon armure en mouvement finirent par attirer son attention. Cet être était donc vraiment un combattant, un elfe doté de pouvoirs magique comme ceux que j'avais affronté a Dol-Guldur m'aurait sentit arriver bien avant que ses yeux ne me voient.

Hache sur l'épaule, cranes humains a la ceinture, yeux de braises illuminant la visière sombre d'un casque de guerre cornue dissimulant mes traits, je ne peut pas lui en vouloir de mettre immédiatement sa main sur son épée a ma simple vue. Soyons franc, je ne faisais vraiment pas sympathique, a première vue. Toutefois, je leva ma main gauche, paume vers l'inconnu, pour lui montrer que je n'étais pas hostile, pas encore tout du moins.

– C'est qu'on peut faire des rencontres intéressantes, ces derniers temps...

"Doucement, petit elfe, doucement, si j'avais voulu te combattre, tout ceci se serait passé bien plus vite.
Je vois que nous avons une connaissance en commun, alors, plutôt de rester dissimulé dans les fourrées comme un elf...Comme un ranger le ferais, je me présente a toi franchement, directement, ainsi que tout véritable guerrier oriental se devrais de le faire.
Je suis...Kor, mercenaire oriental et...j'escorte notre connaissance commune pour un temps. Il n'en as pas vraiment le besoin, en vérité, mais ma présence suffit en général a calmer les plus furieux de mes compatriotes.
Et toi, elfe, qui es tu ?"

Je pris bien soin de m'arrêter a prés d'une dizaine de pas de Maedhros, afin qu'il voit que tout ceci n'était pas un piège.
Un voyage des plus intéressants, alors que je n'avais plus rencontré personne depuis bien des années, voila qu'en quelques semaines, je rencontrais tout plein de nouveaux visages !

Il était évident qu'il ne croirais pas une demi-seconde que j'étais un simple humain en armure, je n'en avais ni l'allure, ni l'aura, toutefois, je ne voyais pas vraiment comment me décrire sans risquer de révéler ma véritable nature et sans pour autant mettre en péril ces retrouvailles que j'avais sous les yeux.

"Faut-il que je vous laisses ici, sir Rog ?"

Allez, laisses moi allez voir les villageois, si je ne pouvais pas arracher la chair de ses os a cet elfe la devant moi, je voulais le faire avec quelques dizaines de villageois et la maigre garnison qu'il devait avoir.
Mais pas avant une bonne bière bien fraîche.

Regard de questionnement vers mon partenaire elfe, j'espérais que l'autre elfe me laisse y aller sans poser plus de question. J'avais appris a me méfier des elfes combattants, autant que des autres, car ils avaient eu toute l'éternité pour parfaire leur style de combat, alors que je n'avais eu que quelque décennies pour cela.
En matière de guerrier, cela revenait toujours a une histoire aussi saugrenue que celui qui a a la plus grosse. Toujours.

Pourquoi pensez vous que ma hache est aussi énorme ?

Qu’elle fût les chances pour que sur ce chemin et en compagnie d’un oriental, Rog puisse tomber sur un elfe du premier âge. Elfe qui par ailleurs était déjà venu en Gondolin et dont le père avait déjà œuvré aux côtés de Rog. Mais alors que Maedhros, car telle était son nom ne finisse de poser une nouvelle question. Krell venait à sortir des bois comme si de rien n’était. Certainement très surpris de la chose, le Noldor n’allait peut-être pas très bien prendre la chose et sa phrase pouvait laisser penser les choses ainsi.

Mais voici que Krell ou plutôt Le Krell venait à sortir de son casque un jeu d’’acteur. Se présentant comme un garde du corps oriental, il avait pour « mission » de protéger Rog des dangers, bien que comme il le disait. Le Seigneur elfe n’avait guère besoin d’aide pour cela. Avec un pareil rôle, tous les propos qu’il avançait semblés cohérents. Et malgré un cafouillage entre elfe et ranger, l’ensemble de son discours pouvait être crédible. Kor, le nom de son rôle, souhaitait partir dans le village en quête de boissons. Si cela était vrai, après quelques verres il était certain que le village serait à feu et à sang. Et bien qu’il évoquât le fait de laisser deux vieilles connaissances se retrouver. Rog comptait bien mettre à profit l’initiative de Krell, tout en limitant les dégâts qu’il comptait faire.

-Très bien Kor, si au passage tu pouvais te renseigner sur une affaire dans le coin. C’’est en rapport avec le père de mon ami ici présent. Visiblement quelque part dans la région il y aurait une œuvre que j’ai réaliser avec Fëanor. Je ne sais pas trop comment elle est venue du Beleriand jusqu’ici, mais comme le serment qu’on avait le promettait, j’aimerait bien la récupérer. Il faudrait donc interroger les gens du village et à la taverne sur un groupe d’aventuriers venu du Gondor. Ces derniers ne seraient jamais revenus de la forêt. C’est tout ce que je sais.

Et bien que Rog confiât cette tâche à Krell, il espérait dans un premier temps attiser l’intérêt de Maedhros sur la fameuse rumeur afin de détourner son attention de tout soupçons qu’il aurait pu avoir sur Krell. Dans un deuxième temps, avec ce que Krell lui avait proposé plus tôt, il espérait satisfaire les attentes de ce dernier dans sa quête de sang.

-Pour en revenir à vous, Seigneur Maedhros ? Ou tout simplement Maedhros désormais ? J’ai eu ouïe dire de nombreuses rumeurs en ce qui concerne le Beleriand. Mais rien qui ne soit réjouissant à entendre. Pour ce qui me concerne je dois dire qu’après la chute de ma maison je n’avais d’autres choix que de partir. Après un long voyage par-delà les montagnes je suis arrivé jusqu’ici. Mais passons mon histoire sans intérêt, qu’est-ce qu’il vous a fait voyager aussi loin en Arda ?

La question était d’un grand intérêt pour Rog, car curieux de connaitre l’histoire de Maedhros. Il cherchait aussi à savoir si ce dernier pouvait lui servir d’allié ou bien d’ennemi. Peut-être que le raisonnement du « il n’y a que du noir ou du blanc et pas de gris », était une réflexion basique. Mais les habitants du Mordor avaient pour habitudes d’être aussi absolue.

Même une personne sans grande connaissances sur les Humains aurait remarqué que ce type n’en était pas un, ne serait-ce que par sa taille, pour commencer. Ce qui ne répondait pas à la question principale, qu’était-il exactement. Le rouquin préféra encore passer sur le « petit Elfe », qui faillit bien lui arracher une légère grimace, se concentrant plutôt sur le reste. Les guerriers orientaux n’avaient pas une glorieuse réputation, eux non plus… Ce n’étaient pas des endroits où Maedhros s’était aventuré, ou peut-être il y a très longtemps, et il ne savait de ces terres que de vagues rumeurs et certaines histoires que se contaient les voyageurs. Ce dont il était certain, néanmoins, était que les peuples là-bas étaient bien Humains. Mais cet homme… Au moins ne lui avait-il effectivement pas foncé directement dessus pour l’attaquer, en effet, même s’il n’était bien sûr pas à l’abri de le faire. Les Humains, ou plutôt les Mortels d’une façon générale, pouvaient être si imprévisibles, parfois, dans leurs réactions, leurs pensées sautaient en permanence d’un sentiment à l’autre, c’était infernal. Amusant et fascinant, parfois, mais aussi très fatigant à suivre lorsqu’on les côtoyait sur le long terme.

– Je suis...Kor, mercenaire oriental et...j'escorte notre connaissance commune pour un temps. Il n'en a pas vraiment le besoin, en vérité, mais ma présence suffit en général à calmer les plus furieux de mes compatriotes. Et toi, elfe, qui es-tu ?

– Maedhros, mercenaire du Beleriand.

Un léger sourire ironique avait effleuré ses lèvres, autant pour le coup du garde du corps que pour le reste. Il n’avait jamais vu un des leurs accepter la présence d’une telle escorte, que ce soit pour le jeu des apparences ou un besoin réel. D’autant plus une escorte de ce calibre, qui avait toutes les chances d’attirer l’attention de l’ensemble de la garde du Gondor. Qui leur en voudrait ? Un type si grand, dans une armure voyante, accoutré d’un attirail voyant et qui incitait aussi sec à la méfiance, le tout dans un pays qui avait déjà quelque peu les nerfs à vif, rien de tel pour s’attirer divers ennuis, même en ne faisant rien de répréhensible. A moins de voyager le plus discrètement possible, comme des voleurs pourrait-on dire, il sera impossible pour eux de n’attirer aucune question. Quel humain gouvernait ce pays, d’ailleurs, en ce moment ? Il suffisait que ce soit un homme un peu nerveux, ou paranoïaque, pour que ces deux-là se retrouvent avec toute la garde du Gondor aux fesses en un rien de temps. Enfin, tant que ça ne tournait pas dans de gros problèmes ou un imbroglio quelconque. De toute manière, les affaires que pouvaient bien trafiquer ces deux-là n’étaient pas les siennes.

– Faut-il que je vous laisses ici, sir Rog ?

– Très bien Kor, si au passage tu pouvais te renseigner sur une affaire dans le coin. C’’est en rapport avec le père de mon ami ici présent. Visiblement quelque part dans la région il y aurait une œuvre que j’ai réalisé avec Fëanor. Je ne sais pas trop comment elle est venue du Beleriand jusqu’ici, mais comme le serment qu’on avait le promettait, j’aimerais bien la récupérer. Il faudrait donc interroger les gens du village et à la taverne sur un groupe d’aventuriers venu du Gondor. Ces derniers ne seraient jamais revenus de la forêt. C’est tout ce que je sais.

Maitimo tressaillit légèrement, assez légèrement pour que ça ne se remarque pas, puis ferma les yeux une petite seconde. Ce n’était tout de même pas possible… Où qu’il aille, quoi qu’il fasse, peu importe qui il pouvait rencontrer, il fallait toujours qu’une chose ou une autre lui rappelle sa famille. Il bougea d’un pas léger, pour laisser place au « mercenaire » s’il devait aller vers le village, lui lançant simplement un regard pensif au passage. Il avait un mauvais pressentiment… C’était indéfinissable, comme si un nouveau malheur était sur le point de se produire. Bah, sans doute se faisait-il des idées, ces années de lutte l’avaient rendu paranoïaque. Il avait beau être curieux de ce que pouvait être cette affaire, il se répétait cependant de ne pas y songer, ça ne pouvait attirer que des nouveaux ennuis.

– Pour en revenir à vous, Seigneur Maedhros ? Ou tout simplement Maedhros désormais ? J’ai eu ouïe dire de nombreuses rumeurs en ce qui concerne le Beleriand. Mais rien qui ne soit réjouissant à entendre. Pour ce qui me concerne je dois dire qu’après la chute de ma maison je n’avais d’autres choix que de partir. Après un long voyage par-delà les montagnes je suis arrivé jusqu’ici. Mais passons mon histoire sans intérêt, qu’est-ce qu’il vous a fait voyager aussi loin en Arda ?

Il détacha son regard du mercenaire pour le reporter sur Rog, hochant faiblement la tête. Il aurait cru qu’après Gondolin, les Elfes se seraient dirigés vers d’autres contrées comme la Lorien ou Imladris, voire qu’ils auraient pris la mer pour partir vers Valinor, mais le Gondor… Pourquoi pas, après tout ? Au moins ne devait-il pas rester planqué dans un coin en attendant que l’orage passe.

– La même origine, si je puis dire ça. La chute de notre maison et la perte de batailles, dans le Beleriand, contre les armées de Morgoth. Toutes les rumeurs que vous avez pu entendre sont sans doute vraies, la guerre a gravement secoué la région et innombrables sont les Hommes, les Elfes et les Nains à être tombés sur ces terres. Je ne suis plus retourné dans le Beleriand depuis longtemps, il ne ressemble plus à rien de ce qu’il était. Par la suite, ma famille et moi avons causé quelques… remous. Quant à cet endroit… Morgoth est un peu trop calme en ce moment pour ma tranquillité d’esprit. Qui sait qui il est encore occupé à corrompre ou tenter de faire chuter.

La haine contre cet être dégoulinait de chacun de ses mots, tandis qu’il serrait la main contre la poigne de son épée. Les siècles ne réussiront jamais à l’atténuer, ni les millénaires, il ne sera pas en paix tant que le Valar ne sera pas emprisonné au fond des limbes. Maedhros glissa à nouveau le regard, brûlant, vers l’horizon et le Mordor, puis s’efforça de se calmer un peu, en revenant sur Rog. Il allait finir par le prendre pour un cinglé et Maedhros ne voulait pas de ça.

– En savez-vous plus sur ce qui se passe ?

Se jouer de l'attention d'un elfe était quasiment impossible pour moi, je pouvais toujours faire croire a des hommes insensible aux choses cachés de ce monde que je n'étais qu'un simple humain un peu plus grand que la moyenne, mais un elfe a des perceptions que les hommes n'auront jamais.
Je le savais et il, ce dénommé Maedhros, le savait aussi très certainement. Qu'il accepte aussi simplement mon petit jeu d'acteur voulait sans doute dire que ma véritable nature ne l'intéressais pas outre mesure. Toutefois, j'aime jouer et tout risquer pour un gain considérable, mais je ne voyais pas vraiment ce que cet elfe bien né aux allures de vagabonds pouvait me donner.

Il avait vu trop de guerre, sa main d'acier, ses cicatrices, son œil attentif par moment et son calme trompeur ne pouvait pas mentir.
Bien que je sois un être humain, ma capacité a cerner les gens n'avait fait qu'augmenter, a mesure que ma vie s'étalait sur plusieurs vies d'humains.

J'avais un gros doute, un immense doute sur le fait qu'il me croit sincère dans mon jeu d'acteur. Aucun mercenaire ne se baladait en armure aussi voyante, aussi macabre. Toutefois, je n'avais pas eu le choix de distiller un mensonge et ouvrait ainsi la voix a d'autre mensonges de sa part.
La vie est un échange perpétuel et singulier, les années apportent l'expérience et la sagesse avec elle. Je n'étais pas un enfant, loin de la, j'avais commis bien des atrocités et des carnages, des trahisons folles et des meurtres abjects, tout cela le plus souvent pour ma quête de pouvoir ou par simple plaisir.
Mais si je n'aimais pas une chose, c'était bien le mensonge. Un guerrier ne ment pas, il se lève, fier, droit et puissant face au monde et tente de le soumettre a sa volonté. Qu'il réussisse ou échoue ne compte pas, il aura agi en guerrier et sera, d'une manière ou d'une autre, accueilli par ses ancêtres dans le grand palais des Esprits, la où les braves vivent a jamais.
Même si, moi, personne ne m’accueilleras jamais car j'avais conquis même la mort, cette philosophie simple et brutale continuais de battre en mon cœur.
On ne guérie jamais vraiment de son enfance, parait-il.

– Maedhros, mercenaire du Beleriand.

"Tiens, un compagnon mercenaire ? Vous avez été dans quelle guerre ? Quelle compagnie ? On s'est peut être déjà retrouvé sur les mêmes champs de bataille ? Bien que j'doute qu'on ait été dans les mêmes camps ahahahaha !"

Ce rire sonnait faux, creux, tout comme l’intérêt que je lui portais, de mercenaire a mercenaire, n'avait pas la moindre passion dans ma voix. Je n'étais pas bien dans ce rôle, je méprisais trop le mensonge que je tissais pour empêcher un combat entre nous deux, champions de force radicalement opposées.
Je le savais, je le sentais et il devrais, probablement a un moment ou a un autre, comprendre ou sentir que je n'avais plus rien d'humain, plus proche d'un monstre que d'un homme depuis déjà bien des années.

Vite, me tirer d'ici avant qu'il ne comprenne, vite. Je ne voulais pas affronter un elfe, je ne devais pas affronter un elfe comme lui, pas ici, pas maintenant. Je sentais bien qu'un combat entre nous deux ne me donnerais aucun bénéfice et pourrais durer bien trop longtemps. Je finirais sans doute par lui arracher la tête et la colonne vertébrale, mais ce serais au prix d'une relation de mon nouvel allié, allié qui, je l'espérais, saurais mieux gérer que moi cette rencontre fortuite.
A moins que Rog ne me vienne en aide, mais dans ce jeu de mensonge, je n'y voyais pas clair. J'étais trop habitué a l'honneur martial et la franche haine et rivalité entre guerrier pour cerner quoi que ce sois dans un pareil discours.

-Très bien Kor, si au passage tu pouvais te renseigner sur une affaire dans le coin (...)

"Votre verbe est mon ordre."

Il m'a pris pour son valet lui ? J'ai une tête de serviteur ? Faudrait-il que je me reconvertisse en dame de compagnie ou en bonniche ? Incroyable, ravager la moitié de ce continent pour au final devoir jouer un jeu d'acteur devant deux saloperies d'elfes et...
Calme, calme Krell, il vient de te donner l'occasion de sortir de la vue et des pensées de ce rouquin d'elfe Noldor, un terme qui pour moi rimait avec défaite, c'était déjà pas mal. Voyons le positif, rappel toi, tu es un acteur, il parle a Kor la, pas a toi...

Je détestais tout ce spectacle, j'avais envie de rugir mon nom face a grand père Ciel et d'imposer ma loi a ce monde, la, de suite.
CALME !

Allez, tires toi, avant que ce Maedhros ne sente le magma sous le basalte, le feu sous le calme, quoi.

"J'y vais alors. J'aurais plaisir a vous revoir Maedhros, on pourra continuer cette conversation !"

Non, Krell, tu ne voulais pas le revoir, tu voulais te tirer avant qu'il ne fasse le lien entre toi et les rumeurs de géant maudit, conquérant du Rhovanion, destructeur du Rohan, briseur de serment, affameur d'Erebor, braif, un peu tout les titres que ces saloperies de gens de l'Ouest t'avaient refilés a force que tu fracasse leurs jolies chaumières et prennent leur femmes et leurs enfants en esclavage.
Le problème, quand on commence a être une légende, c'est que les gens malins faisaient vite le lien, surtout quand discrétion n'était pas ton plus grand atout, ni ton second prénom.

Tandis que je baissais un brin la tête dans un salut parfaitement martial envers mes deux elfes de compagnie, je fit un demi-tour vers la droite et continua sur ma route, droit vers ce village.
La, au moins, j'allais pouvoir trouver une bonne bière, une jolie fille pour passer mes pulsions et sans doute quelques gardes pour passer ma mauvaise humeur.

*Putain de Noldor prétentieux. Je vous écraserais tous, un jour, mais pas avant d'avoir massacré Sauron, les nains, l'Empire de l'Ouest et, en fait, tous ceux qui ne choisiraient pas délibérément de se placer sous ma bannière.*

Chantonnant un air ancien que Rog avait déjà put entendre dans la caverne de Cirith Ungol, je pris la route en laissant les cliquetis de mon armure accompagnés ma sombre voix de baryton basse.


"Ma mère m'a dit un jour,
Tu auras un Empire,
Tu marqueras ton nom,
Dans les belles chansons (...)"

Et maintenant, petit village, tu va découvrir ce qu'es la volonté d'un homme qui veux graver son nom dans les cadavres.
Je me demande si ils ont de la bonne bière ou mieux, des alcools forts de chez moi.
Oh oui, ça fait longtemps que je n'ai pas massacré sans retenue, imbibé par l'alcool.
Une semaine, c'est long, même pour un mal immortel comme moi.

Alors que Krell ou plutôt Kor pour cette occasion semblait s’en aller. Rog espérait ne pas l’avoir contrarié en jouant son jeu, car on peut aimer jouer un rôle, mais ne pas aimer recevoir les phrases qui sont dû à ce rôle.
L’elfe de son côté guère peu apprécié en pareil moment par Rog. Il semblait chercher quelque chose ou plutôt apprendre des choses supplémentaires. Était-ce sur la région, la raison pour laquelle Rog était en Gondor et soupçonnait-il Rog d’appartenir au camp d’en face.
Tant de questions sans réponse, mais qu’importe Freyr n’était ici sans raison. Et que le noldo le suive ou non, il devait continuer à progresser. La présence ne serait que peu gênante, du moins pour un temps. Après quoi il faudrait se débarrasser de lui, d’une manière ou d’une autre.

Aussi Rog tâchait de rester vague dans les réponses qu’il offrait à son compère, sa oix toujours aussi sûre et presque lumineuse.

-Je dois dire que je ne comprends pas trop, me parlez-vous du Gondor et donc de la région dans laquelle nous nous trouvons ou bien du Bélériand. Dans l’un des cas je puis répondre avec seulement des rumeurs et dans l’autre et bien vous donner quelques détails.

Rog fixait la main du noldo sur son épée, rien qui n’était bien encourageant. Aussi il se préparait à tout moment à faire un pas de côté et à dégainer. Fin bretteur au caractère aussi téméraire que hautain, il pensait pouvoir venir à bout de l’elfe sans user de son marteau.

-En ce qui concerne le Bélériand, les batailles seraient toujours aussi nombreuses, mais des visiteurs du Valinor seraient venus en Renfort. Qui sait, peut-être s’agit-il de Tulkas et du reste des siens. Bien que j’en doute.

A dire vrai Rog espérait autant que les Valar soient de la partie, qu’il espérait l’inverse. Car s’il faisait parti des ténèbres c’était avant tout pour sa femme qui était toujours aux mains des ombres de Morgoth. En prison ou dans pire situation, Rog préférait ne pas y penser, mais quoi qu’il en soit il était prêt à tous les sacrifices pour la récupérer. Y comprit affronter les siens, bien que jusqu’à présent il n’avait nullement eu besoin de le faire.

-Pour le Gondor et encore plus pour cette région, les choses stagnent. D’un coup on retrouve un Empire de Second Nés puissant et de l’autre un sombre seigneur qui reste caché chez lui. Bien que supérieur en nombre, le Mordor ne comptent que peu des créatures suffisamment fortes pour inquiéter le Gondor. Bien que ces derniers temps il y a de l’agitation à Minas Morgul et à la Porte Noire. Mais le Gondor moitié moins nombreux que les orques disposent tout de même de nombreux forts en Ithilien d’’après la rumeur. Et ses effectifs sont encore plus nombreux avec l’éventuel enrôlement de civils. Ce qui fait qu’en nombre, ils peuvent être aussi nombreux que le Mordor. Pour résumer, la différence se fera sur la stratégie et avec les pièces maitresses.

Rog se tournait alors vers le village, en espérant que Krell n’avait pas encore commençait à massacrer tout le monde. Ou au moins qu’il avait pu obtenir quelques informations sur l’épée.

-Je dois me rendre dans ce village, mais vu que vous en venez. Vous ne voudriez pas y retourner je pense, non ?

Son mauvais pressentiment ne le quittait pas, quand bien même il continuait à se battre contre deux réactions. Une part de lui voulait s’assurer que le fameux mercenaire rouge n’allait réellement causer aucun ennui, et une autre part lui répétait en boucle de ne pas s’en soucier et partir de son côté. Son attention demeurait en partie portée sur lui, l’autre sur Rog. Désormais, Maedhros ne se demandait s’il y allait réellement avoir des ennuis mais plutôt comment ces ennuis allaient-ils se déclencher et pour quels motifs. Où la prochaine guerre d’ampleur allait-elle se dérouler, quel royaume allait se relever ou être dévasté, comment et pour quelles conséquences. En bref, quel nouveau merdier les attendait au coin de la prochaine rue ? La possibilité qu’une vie tranquille puisse exister quelque part ne lui venait plus à l’idée, c’était trop invraisemblable. Toute nouvelle que pourrait donner Rog serait la bienvenue, même infime, même si ce n’était encore quelques rumeurs, ce sera toujours ça de pris.

En revanche, lorsque le forgeron émit l’hypothèse que Tulkas puisse faire parti des renforts envoyés par Valinor, si renforts il y avait bien, le doute fut sa seule réaction. Accompagné, peut-être, par une petite touche de mépris. Il ne croyait pas une seule seconde qu’un seul des Valar se soit enfin décidé à venir sur ces terres pour enfin combattre Morgoth… Ils n’avaient rien fait durant des siècles, des millénaires mêmes ! Rien depuis les toutes premières batailles du Beleriand. Et comme ça, d’un coup, ils accepteraient enfin de bouger ? La tentation d’aller vérifier par lui-même l’envahit brusquement, cependant, elle n’était pas assez forte pour lui faire oublier qu’il ferait mieux de ne pas croiser la route d’un seul des Valar, désormais. Du moins, pas jusqu’au jour où il se retrouvera à son tour dans les halles de Mandos. D’autres avaient-ils plus de détails sur cette affaire… Peut-être ira-t-il lui-même voir ça, cela dit, tant qu’il prenait garde à ne pas rencontrer Tulkas, si vraiment il se trouvait là-bas.

– Pour le Gondor et encore plus pour cette région, les choses stagnent. D’un coup on retrouve un Empire de Second Nés puissant et de l’autre un sombre seigneur qui reste caché chez lui. Bien que supérieur en nombre, le Mordor ne comptent que peu des créatures suffisamment fortes pour inquiéter le Gondor. Bien que ces derniers temps il y a de l’agitation à Minas Morgul et à la Porte Noire. Mais le Gondor moitié moins nombreux que les orques disposent tout de même de nombreux forts en Ithilien d’’après la rumeur. Et ses effectifs sont encore plus nombreux avec l’éventuel enrôlement de civils. Ce qui fait qu’en nombre, ils peuvent être aussi nombreux que le Mordor. Pour résumer, la différence se fera sur la stratégie et avec les pièces maitresses.

– Je vois. Merci déjà pour ces informations.

C’était une situation familière, moins abrupte que ce qu’il avait pu imaginer. Il préférait encore ça. Combattre les armées monstrueuses de Morgoth, c’était ça, une situation normale, classique, parfaitement naturelle. C’était logique de se donner à fond dans cela, y laisser sa vie s’il le fallait, et risquer tout ce qui était possible pour être certain qu’il ne pourra avancer plus encore sa domination sur ce monde. Bien plus normal que d’affronter et massacrer les leurs. Se retrouver, peut-être bientôt, dans une nouvelle bataille avait le don de le rassurer, bien plus qu’aspirer à une vie plus paisible, entouré d’autres Elfes. Déjà parce que ça serait impossible, ensuite parce qu’il n’arriverait plus à rester tranquille bien longtemps. Il ne comprenait pas plus ceux et celles, parmi les leurs, qui se complaisaient dans ce genre de vie, que ce soit ici ou ailleurs, ceux et celles qui préféraient s’écarter de tout danger ou tout ce qui pouvait perturber le train habituel de leur existence, leurs habitudes, pour se fondre dans une existence sans vagues, morne au possible.

– Je dois me rendre dans ce village, mais vu que vous en venez. Vous ne voudriez pas y retourner je pense, non ?

– Pour un bref passage, si. Il y reste un détail que je souhaiterai observer. Après vous.

Il s’effaça de son chemin, sans vraiment lâcher sa posture défensive mais sans paraître agressif pour autant. Après tout, il n’avait rien contre Rog, ce n’est pas comme s’ils avaient déjà dû s’affronter par le passé. Il n’avait rien non plus, pas encore en tout cas, contre Kor, même s’il se méfiait. En se remettant en marche, il finit quand même par lâcher son épée, là encore pour ne pas rendre un air agressif aux gardes du coin qu’il pourrait croiser. Il hésita aussi, à un moment, à remettre sa capuche, stoppant son mouvement à peine initié avec un très léger soupir. Aucune importance, ici, personne ne le connaissait, mis à part Rog, et personne ne risquait de le reconnaître. Il n’avait pas non plus un mercenaire ou un chasseur aux trousses. Quant aux personnes à éviter absolument, assez nombreuses d’ailleurs, elles ne se trouvaient pas dans le coin. Du moins, pas à sa connaissance. Il n’avait tout de même pas assez de malchance pour tomber dessus par hasard, de toute manière, surtout ici, en plein cœur du Gondor. Un fin sourire blasé étirer ses lèvres, l’espace d’un court instant, en imaginant une rencontre, plus particulièrement, et comment ça se terminerait. Mieux valait encore ne pas trop y songer, ça pourrait lui attirer ce malheur.

L’ambiance du village elle-même restait cependant plus agréable que celle des routes et des voyages. Il se sentait détendu, auprès des Humains… Et espérait donc qu’il ne leur arrive rien de particulier. Tous les sens en alerte, il s’efforça néanmoins de ne pas approcher la main de ses armes, ni même de prendre une posture trop tendue. On marche en se détendant, on reste parfaitement calme, tout allait très bien se passer. Parfois, il sentait des regards bizarres dans leur direction, les étrangers de leur genre ne devaient pas être légion, mais il les ignora. Les Elfes avaient le droit de se balader librement au Gondor, à ce qu’il sache, même si ça n’avait pas toujours été le cas.

– Juste une chose, Rog, murmura-t-il assez bas pour qu’on ne puisse l’entendre, vous ne pensez plus attirer l’attention que la perdre, avec un « garde du corps » aussi voyant ?

Un garde du corps qu’il ne comptait évidemment pas aller confronter comme ça alors qu’il n’avait rien fait, mais la question méritait d’être posée. Maedhros se demandait dans quel état ce dernier s’était mis, s’il était déjà occupé à boire ou s’il discutait très posément avec d’autres…

Alors que quelques mètres plus loin Maedhros semblait poser une question assez pertinente. On entendait déjà au loin les ravages de Krell. S’il y avait eu quelques cris, il y avait surtout des gardes se comptant sur les doigts des deux mains qui s’en allaient vers la taverne. Lieu dans lequel Krell s’était rendu pour trouver des renseignements.

Et bien que la situation semblât répondre d’elle-même à la question de l’elfe. Rog se devait trouver une réponse assez adéquate à la situation s’il ne voulait pas se faire un nouvel ennemi.

-Et bien il est vrai que mon escorte peu s’avérer assez voyante.

Disait Rog alors qu’on voyait clairement les gardes pénétrer à l’intérieur de la taverne. Au plus profond de lui, le seigneur de Minas Ithil aujourd’hui Minas Morgul espérait bien que l’oriental allait trouver une solution à ce problème.

-Mais en définitive son côté voyant comme vous dîtes peut-être un plus pour périple. Cela dissuadera les moins courageux de venir m’importuner. Même s’il est vrai que les méthodes de Kor sont assez expéditives. D’ailleurs peut-être devrions-nous nous avancer vers la taverne ou l’auberge je ne sais trop ce dont il s’agit. Mais visiblement Kor a réussi à trouver une source d’information, bien que cela est dû mal tourner.

Rog se tapait légèrement le front à l’aide de la paume de sa main gauche, alors qu’il secouait de droite à gauche la tête par la suite afin d’exprimer ses sentiments.
Par la suite Rog s’avançait vers le bâtiment dans lequel pratiquement l’ensemble de la garnison du village s’était engouffrée. Mais à peine avait-il franchit l’entrée du village qui se composait d’un petit panneau et de quelques planches servant de barrières, que Krell venait à sortir de l’établissement.

Comme si de rien n’était, il avançait à présent vers les maisons du village. D’un pas sûr, il ne manquait pas de provoquer un certain raffut. Raffut qui s’ajoutait au précédent avec les cris et la mobilisation des gardes du village.
Tout ce qu’espérait Rog était que l’ultime guerrier oriental n’avait pas perpétré un ignoble massacre. Bien qu’ignoble soit certainement exagéré. De plus si Krell était un buveur de sang né, il n’était sans doute pas prompt à tuer gratuitement comme le ferai un orque.

Mais le guerrier marchant en direction des maisons avec son bardas métalique, ne manquait d’attirer le regard de tous. Autant dire que pour la discrétion on pouvait revenir dans vingt ans que l’on aurait encore le souvenir sa venue. D’une petite foulée, Rog s’empressait de rattraper le guerrier.

-Kor attends.

Rog ne pensait pas à demander ce qui c’était passé dans l’auberge. Et d’ailleurs, il s’en moquait complètement. Peu importe s’il y avait eu des tueries.

-Tu as pu en apprendre plus sur les aventuriers ?

Mais tout cela n’était qu’en fait issu de l’imagination de Rog. En effet rien de tout cela ne c’était réellement produit et il espérait que cela n’arriverait pas non plus. Aussi simplement comme dans son imaginaire Rog répondait à Maedhros de la même manière mais avec une argumentation quelque peu différente.

-Et bien il est vraiment que Kor s’avère être un individu quelque peu voyant. Néanmoins chez le grand oriental on peut voir cela comme un atout. En effet s’il est voyant il éloignera plus aisément les moins courageux susceptibles de causer des problèmes. Je propose que l’on progresse qu’en dites-vous ?

– Et bien il est vraiment que Kor s’avère être un individu quelque peu voyant. Néanmoins chez le grand oriental on peut voir cela comme un atout. En effet s’il est voyant il éloignera plus aisément les moins courageux susceptibles de causer des problèmes. Je propose que l’on progresse qu’en dites-vous ?

– Oui…

Plus il est voyant et plus il attirera très facilement l’attention des gardes locaux, voire celle des rangers. Tout en marchant, Maedhros s’était mis à plus surveiller les alentours, attentif, et sentant de plus en plus mal cette histoire… Trop de petits détails qui clochaient. Un trop gros mauvais pressentiment. L’incompréhension pour certains détails. Et par-dessus tout ça, la certitude presque absolue qu’il allait de nouveau, tôt ou tard, se fourrer tout droit dans les ennuis. Bon, ce ne sera pas la première fois, certes, mais il avait espéré y couper un peu. Sauf si… Enfin bref. Il accéléra tout de même un peu le pas vers le village, tout en se répétant intérieurement de ne pas non plus devenir complètement paranoïaque. *Il reste toujours possible que ce soit juste un oriental un peu bizarre,* songea-t-il en observant le village approcher. *Arrête de penser aussitôt au pire, surtout sans raisons. La vie peut être calme, parfois… Les Humains ont en vu d’autres, ici comme ailleurs, ça ne sert vraiment à rien de s’inquiéter trop en amont. Ils ne vont pas s’effrayer pour si peu.*

En revenant dans le village, néanmoins, Maedhros remarqua assez vite que la tension avait déjà monté d’un cran. Forcément, voir un gars de deux mètres de haut, avec des crânes à la ceinture, arriver dans un village de campagne alors que l’ambiance globale du pays était déjà morose, ça ne devait pas inciter à la joie. Voyageur isolé et relativement discret, plus tôt, lui-même n’avait pas attiré les regards, mais cacher un type comme ce Kor, c’était un autre challenge. En regardant certains des habitants, qui s’étaient réunis en petits groupes de trois ou quatre, le rouquin comprit aussi qu’il était déjà un peu tard pour faire genre « Non mais tout va bien, vous avez déjà vu pire ». Il commençait à douter que ce soit le cas, en réalité… En signe de paix, il rabattit sa cape en partie contre lui, pour ne pas montrer ni son épée ni la dague qu’il portait habituellement à la ceinture. Pas d’autres armes, visibles du moins, c’était déjà ça. Un mouvement vif lui attira l’œil, à quelques mètres d’eux, un homme était parti assez brusquement à cheval, vers la sortie du village.

Il était assez tenté de l’imiter, enfin bon, maintenant… Deux mètres plus loin, il finit par stopper complètement, s’écartant un peu de Rog, alors qu’un des marchands de rues lançait d’une voix assez forte qu’ils ne voulaient pas voir débarquer des étrangers comme ça, que ça n’amenait que des ennuis. Ça pourrait être bien pire… Maedhros essaya de se rappeler ce qui rassurait les Humains, comment ils réagissaient sous l’effet de la peur… Sourire les aidait à se sentir rassurés, non ? Il essaya, vraiment, il essaya sincèrement de paraître plus aimable et souriant en répondant à ce type qu’ils ne leur voulaient aucun mal, mais le résultat ne fut pas très concluant. Le marchand avait reculé d’autant plus, et s’énervait. Bon, très bien, ne pas essayer de sourire, soit ça ne fonctionnait pas du tout, soit c’était lui qui était vraiment mauvais dans ce jeu. Ou les deux. A la place, il préféra donc battre un peu en retraite et revenir sur son chemin initial. Le seul avantage, là-dedans, était bien que ce Kor n’était pas difficile à repérer, tant il dépassait tous les autres, on le remarquait de très loin.

– Kor.

Pas de cri, Maedhros avait attendu d’être à assez bonne hauteur avant de l’interpeller. Il ignorait à quoi jouaient exactement ces deux-là, dans cette région, mais ils devraient être un peu plus discrets, dans les villages. Au moins un minimum.

– Vous ne pouvez pas au moins cacher ça ? demanda-t-il en pointant rapidement du doigt les crânes à la ceinture. Histoire, au minimum, de ne pas attirer tous les gardes du Gondor disponibles dans le coin dans les vingt prochaines minutes.