Quand on porte son regard vers l'est, depuis les frontières occidentales du Rhûn, on n'aperçoit de l'Empire qu'une vaste étendue de plaines désolées, de collines arides, des terres incultes et sans vie; quand on pose son regard sur ce pays, on ne voit que des landes désertes et des prairies rêches, une terre sauvage que la main de l'homme ou des elfes n'a point domestiquée. Ce qui est vrai, car le peuple du Rhûn est enfant de ce pays, et pour rien au monde il ne voudrait le plier à sa volonté. Ils ont en effet une étrange façon de penser qui peut paraître incongrue aux gens de l'ouest, accoutumés à de vertes vallées et à de belles demeures de pierre, à des pays qui sont leurs, comme leurs femmes et leurs enfants, comme leurs champs et leurs maisons. Le Rhûn est un pays sauvage, et les hommes qui y vivent vont de paire avec cette terre, qui semble les avoir enfantés tant ils y sont accordés.
Pour comprendre, il convient donc de décrire en premier lieu la terre qui a enfanté les nombreuses tribus de l'Empire; car en fait de terre arides et désolées, il y a une infinité de lieux et de paysages, que l'étranger ne peut qu'entrevoir.
En descendent la Celduin depuis Dale et Esgaroth, les premières régions que l'on traverse sont les frontières orientales de l'Empire; ici, le paysage est celui du Rhovanion, terre ô combien convoitée par les peuples orientaux au cours des âges. La végétation y est plus vivace qu’ailleurs dans l’empire, et ce sont de vastes terres à pâturages idéales pour l’élevage. Là, vivent plusieurs tribus, dont les Balchots qui ont fait leurs les terres bordant la Celduin, et ce depuis leur chevauchée sanglante venue de l’orient. Ils vivent en campements éparpillés le long des rives, élevant de vastes troupeaux de chevaux qui sont les meilleurs de tout l’empire, et qui, dit-on, pourraient concurrencer les races des rohirrim ; leurs maîtres vivent entre la Celduin et les plaines agricoles qui bordent les rives de la mer de l’est, et forment une vaste population qui a longtemps représenté une menace constante pour le Gondor. En effet, les régions du Rhovanion ont été des années durant la tête de pont des invasions orientales sur les rives de l’Anduin, et cette région connaît un afflux constant de nouvelles peuplades, désireuses de s’installer à nouveau sur les terres que leurs pères avaient gagnées sur les hommes du nord ; en majorité des Balchots, mais aussi des Dorwen, affectés à la construction de forts et à la rénovation des anciens systèmes de défense édifiés durant leur règne.
Quant aux terres nouvellement conquises, en particulier autour de Dol Guldur et près des frontières occidentales, elles sont pour l’heure plus souvent sillonnées par les esclaves et les troupes assignées à la surveillance et à la construction du mur, que par les tribus et leurs troupeaux ; d’une part car les hommes qui y vivaient ont été tués par les guerres ou réduits en esclavage, d’autre part parce que les environs de Dol Guldur ne sont que peu vivables, et nul ne désire vivre dans son ombre ou dans celle de la forêt Noire hormis peut être les Gardes Pourpres, et tous ceux qui ont été familiers, d’une façon ou d’une autre, de l’ombre de Sauron.
En suivant le cours de la Celduin, l’ont parvient sans tarder aux provinces les plus fertiles du Rhûn, qui entourent la capitale. Ces régions se trouvent aux pieds des montagnes dominant la mer, l’ancien refuge des Dorwen durant l’invasion par les orientaux ; ceux-ci ont fait de cette terre un vaste jardin où ils cultivent la vigne et le blé, ainsi que font les occidentaux. Le vin de Dorwinion a été, de tout temps, un des plus précieux et des meilleurs, goûtés même par les seigneurs elfes de la Forêt Noire ; bien que nombre de cultures aient été détruites par l’invasion, elles ont de nouveau prospéré depuis et font partie des nombreuses marchandises que transportent les caravanes en temps de paix.
Le climat y est ici bien plus tempéré que dans les parties orientales de l’empire, sujettes à des changements de températures brutaux, et à des phénomènes climatiques extrêmes ; peu d’autres tribus, exceptés les Dorwen, vivent ici, malgré la proximité de la capitale. La végétation y est luxuriante, et le paysage ressemble aux terres du Gondor, avec des cultures ordonnées, des vergers et d’immenses vignes ; c’est là le cœur de l’ancienne puissance du Dorwinion, qui avait su résister aux multiples invasions des orientaux. On y trouve de nombreux villages, le plus souvent perchés sur des buttes ou des collines de façon à prévenir les attaques de pillards, et dotés de systèmes de défenses dont l’usage a cent fois éprouvé l’efficacité.
Krell Kain, la capitale, est une ancienne forteresse Dorwen qui se dresse à l'embouchure du Celduin, sur les rives de la mer, là où les pêcheurs étendent leurs filets; c'est également là que certaines tribus viennent passer l'hiver, en raison du climat plus doux. Bâtie sur les ruines de la forteresse, la cité de Krell Kain est un étrange exemple des brassages ethniques et culturels qui caractérisent l’Empire, puisqu’elle mélange l’architecture Dorwen, et celle, traditionnelle, des tribus orientales. En effet, les Dorwen ont coutume, comme les Edain dont ils sont issus, de bâtir des demeures de pierre, au contraire des orientaux qui utilisent plus volontiers la toile et le bois ; l’ensemble allie la robustesse des murailles, et la légèreté des tentes, plus adaptées au climat venteux de ces régions.
La seconde ville de l’empire est Mistran, située au sud de la rive méridionale ; il s’agit du dernier bastion avant les vastes plaines orientales, un point de passage obligé pour quiconque tente de s’aventurer plus à l’est ; c’est également ici que s’arrêtent les caravanes marchandes venues d’orient, ce qui a fait la richesse commerciale de la cité.
Au sud de la ville et long de la côte, se dresse une courte chaîne de montagnes qui est le second fief des Dorwen; cette tribu dispose ici d’une certaine autonomie, en vertu d’un accord passé avec les empereurs successifs depuis la fondation du pays. On y trouve, comme sur les bords de la mer, de nombreux villages, et des fortifications datant de la conquête. C’est ici que réside le cœur de l’ancienne puissance Dorwen ; et cet endroit a longtemps été un foyer de résistance à l’autorité impériale. Depuis, l’aristocratie Dorwen a su récupérer une large partie de son influence politique, et ils ont le privilège d’administrer leurs domaines à leur convenance. Ces montagnes sont la deuxième région agricole de l’empire, les paysans dorwens ayant rivalisé d’ingéniosité pour cultiver jusqu’aux pentes les plus escarpées. Ainsi, il n’est pas rare de voir des champs en terrasses, ou des jardins suspendus alimentés par des systèmes d’irrigation très complexes.
En progressant vers le sud, on parvient aux terres désolées qui précèdent les Monts Cendrés et le Mordor; c'est là la terre des exilés et des parias, et nul n'y vit plus depuis que la flétrissure de Sauron s'y est abattue. Les anciennes plaines verdoyantes se sont transformées, à mesure que l’on approche des montagnes, en désert de cendres hanté par d’étranges ombres. Beaucoup de chamans y font leur voyage initiatique, et traverser cette région relève d’un véritable défi, tant elle a été souillée par l’ombre du Mordor.
Le nord de l'empire est quand à lui constitué de collines abruptes, les premiers contreforts des Monts de Fer, très riches en filons de pierres précieuses et de métaux divers qui font la renommée des forgerons et des orfèvres rhûniens. Bien qu’ils ne concurrencent pas les nains dans le travail des joyaux et des métaux, le riche sous-sol de l’empire permet son autosuffisance en matière d’arts de la forge, et les rhûniens produisent un acier excellent qui sert à la fabrication d’armes, et des fameuses armures de la garde impériale, si célèbres pour leur robustesse.
En outre, le fait que de nombreuses rivières, dont la Carnen, prennent leur source dans ces montagnes, garantit un afflux régulier en minerais, que l’on peut extraire du lit même de ces cours d’eau. Si l’or est rare en ces régions, l’argent, le fer, les rubis sont en revanche très abondants, et faciles à extraire.
C’est plus à l'est que s’étend la plus grande partie de l’empire, constitué de vastes praires au climat aride, glacé l’hiver et brûlant l’été ; là vivent de nombreuses tribus de chasseurs, Taarva, Khitan, et d’autre ethnies très minoritaires. Ce sont des terres sauvages, peuplées de nombreux animaux étranges ; et plus l’on progresse vers l’est, plus le pays se fait inconnu et effrayant, pour celui accoutumé aux vertes prairies du Val d’Anduin. Les gens qui y vivent sont très familiers de ces terres, et ils savent chasser et se défendre contre toutes les créatures qui y vivent. Certaines sont visiblement les vestiges des monstres de Morgoth, lorsqu’il avait étendu son empire sur la Terre du Milieu, alors plongée dans les ténèbres.
Ceux qui vivent là ne craignent pas de se confronter aux monstres de Melkor, et font même commerce de certains : oiseaux, insectes, félins, sont ainsi des marchandises très prisées à la cour, ou dans l’entourage des nobles. De même, ils font également commerce des fourrures, griffes, dents, carapaces, qui entrent dans la compositions de nombreux rituels chamaniques, ou sont utilisés aussi bien pour des armes, que des vêtements ou même pour l’ornement des maisons.
Ces terres incultes –non pas dans un sens péjoratif, mais bel et bien non cultivées- forment une vaste région encore très peu explorée, qui recèle des secrets insoupçonnés. La population y est très diverse, et regroupe à elle seule plus du quart des tribus vivant dans l’Empire, malgré les conditions climatiques extrêmes. Car bien que les régions orientales proches de la mer bénéficient encore d’un climat tempéré, lorsque l’on s’éloigne vers l’est, les températures grimpent et les terres se font de plus en plus arides, passant des prairies aux steppes, puis au désert. Là, les populations vivent entre les innombrables pièges tendus par les prédateurs, mais sont aussi à la merci des tempêtes extrêmement nombreuses, et, l’hiver, doivent faire face à des températures très basses. En outre, la sécheresse est ici un véritable problème, puisque aucun fleuve n’arrose ces terres désolées. L’eau doit être puisée à grandes profondeurs, et les oasis, rares, sont souvent peuplées d’animaux dangereux.
Bien que très arides, les régions orientales recèlent néanmoins une flore étonnante de vivacité et d’ingéniosité. Cactus, plantes grasses, herbes des dunes, elles sont un véritable trésor pour les populations locales, qui peuvent en tirer l’eau nécessaire à leur survie, mais également des remèdes très prisés, et une partie de leur subsistance. Nombre de tribus sont des chasseurs, mais certaines, comme les Oron et les Subhataar, élèvent de vastes troupeaux d’aurochs rouges, ces étranges bovidés qui ont la particularité d’être omnivores. De taille massive, extrêmement robuste, cette race leur sert à la fois de monture, de moyen de subsistance et constitue la majorité des caravanes marchandes.
Le Rhûn donc est un empire vaste, aux paysages divers et aux richesses innombrables. L’immensité du territoire est un atout, car cela leur permet de disposer d’un grand nombre de ressources, sans avoir à faire appel à l’extérieur pour subsister ; cela aurait pu être un désavantage, car il peut être malaisé de maintenir une autorité centralisée sur un si grand nombre de peuples et sur un pays si immense. Mais la société et la population rhûnienne est organisée de façon à pouvoir maintenir une cohésion parfaite au sein de l’empire, entre l’autorité impériale, et les chefs de clans.