Angband -> Barad-Dûr
36 cases à cheval soit 72h
Le départ se fit rapidement après le dernier entretien avec Melkor. Chaak partait pour le Mordor où le pouvoir de Sauron s’était réveillé et l’activité de la région avait repris à une cadence infernale. Il était accompagné de trois nùménoréens noirs ralliés à la cause du Mal et qui étaient habitués à faire le chemin du Mordor à Angband et vice versa. Car il était possible de franchir le Mur, bien sûr pour éviter d’être repéré, il fallait un petit groupe. Les éclaireurs avaient depuis longtemps crées des voies qui permettaient d’escalader le Mur depuis le coté de l’Angband et qui étaient parcourues à l’occasion par des éclaireurs bien entrainés. Le chemin retour était plus difficile car les forces libres patrouillaient le long du Mur et installer des voies devenait compliqué, il fallait donc improviser et tenter une ascension sans protection. Mais cela ne concernait pas le chaman qui comptait bien rester en Mordor, pas très loin de son pays natal.
Chaak n’était plus celui qu’il était en arrivant à la Tour Noire. Ses yeux n’exprimaient plus aucune émotion, le brun sombre caractéristique des orientaux avait laissé place à un voile blanc laissant à peine visible ses pupilles. Sa peau brune était parsemée de grandes taches noires où se trouvaient auparavant les tatouages traditionnels des Khitans, il se servait d’une parure en peau de warg pour cacher ces blessures. Quant à sa voix, elle n’avait plus rien de naturel et ressemblait à un murmure rauque en partie provoqué par les longs cris d’agonie dans les geôles d’Angband. Le plus impressionnant restait sa stature, déjà à l’origine très maigre, le chaman était devenu squelettique et ceux qui l’ont vu n’ont de cesse de dire avoir croisé un cadavre animé par la seule volonté de Melkor. Au final au point de vu physique, le seul avantage qu’il tirait de son passage à Angband était la guérison de sa jambe avant paralysée et qui permettait désormais une avancée significative lors des voyages.
Le voyage de l’autre côté du Mur fut rapide. En effet, ils n’avaient pas besoin d’être discret dans ces steppes désertes qui n’abritaient plus personne. Après plusieurs journées à chevaucher deux des rares chevaux de Melkor, le chaman et ses trois gardes du corps étaient finalement arrivés au pied du Mur. Là ils s’équipèrent de crampons possédant à leur extrémité trois griffes horizontales en métal tranchant permettant littéralement de creuser dans la roche. De ce côté-ci de l’édifice, le luxe leur permettait même de trouver tous les dix mètres environ un anneau de fer planté dans la paroi où l’on accroché les cordes, assurant ainsi une sécurité un peu moins précaire. L’ascension dura quand même la journée entière, Chaak n’étant pas un athlète reconnu, il soufra particulièrement de l’effort intense à produire.
Une fois le Mur franchit, le plus dur était fait, il ne restait plus qu’à ne pas attirer l’attention durant le long voyage qui les attendaient. Grâce aux compétences et aux connaissances des nùménoréens, ils esquivèrent les grandes routes et les villes. Ils vivaient de la chasse et de la cueillette ou quand le destin leur souriait, ils croisaient la route d’une charrette ou d’une petite ferme isolée, alors ils en profitaient pour s’offrir un vrai repas. Plus d’un mois s’écoula avant que la petite compagnie puisse observer les nuages noirs au-dessus du Mordor. Alors qu’il prenait la direction de la Porte Noire, Chaak les arrêta.
« Dirigeons-nous vers le Nord, j’ai une affaire à régler dans le désert à la frontière du Rhûn. »
« Ça fait près de deux mois qu’on est sur les routes, ils nous faut du repos. Le Grand Maître nous à demander de vous escorter jusqu’à Barad-Dûr et seulement ça. »
Le chaman jeta un regard furieux vers l’homme qui venait de répondre et ses yeux blancs vinrent percer à nue l’âme du nùménoréen.
« Remettrais-tu en doute ma parole, vermine. Melkor m’a donné toute sa confiance pour cette mission, souhaiterais-tu que je l’informe de ta volonté de désobéir ? »
Le garde avait baissé la tête sans répondre et le petit groupe avait pris la direction du Nord. Après quelques heures de marche supplémentaire, ils arrivèrent dans le désert de cendre au-delà des montagnes qui marquaient la frontière entre Mordor et Rhûn. Le paysage n’était que désolation. Le désert s’étendait à perte de vue et seul quelques rares arbres venaient rompre la monotonie des lieux.
« Que peut-on bien chercher ici ? »
« Une légende rhùnienne raconte qu’une chamane ayant échouée au rite initiatique khitan s’était retrouvée à devoir vivre en ces lieux. Cette jeune fille avait alors embrassée sa destinée et voué toute son âme au désert, développant des capacités de survie hors du commun. Elle répond au nom de Khaal, et c’est elle que nous sommes venus chercher. »
Les trois gardes ne répondirent rien et s’ils étaient sceptiques, alors ils ne le montraient pas. Les quatre hommes arpentèrent le désert pendant de longues heures. La chaleur était insupportable et le lieu sinistre. Les gardes commençaient à désespérer.
«Je crois bien que cette fille n’existe pas plus que notre maître à de clémence, nous devrions nous diriger vers Barad-Dûr. »
« Silence ! Elle est bien là et elle nous a déjà repérés. Je peux sentir sa présence, elle attend juste le bon moment pour se dévoiler. »
Elle était une chamane et son esprit était entré en résonnance avec celui du désert, comme une araignée sent quand une mouche se prend dans sa toile, elle devait être capable de ressentir les ondes de ceux qui s’approchaient trop près de sa tanière. Chaak avait senti sa présence depuis un moment déjà. Son esprit était différent des autres, en harmonie totale avec la nature qui l’entoure. Une voix féminine s’éleva alors dans son esprit.
« Méfie-toi étranger qui entre sur le territoire de la fille du désert. Ton esprit est fort mais ces lieux sont différents et ses occupants aussi. »
« Incline-toi devant la puissance du Dieu-Noir car il est seul à gouverner ces terres et le destin de ses habitants. Admire la force de celui qui est son envoyé, soumet toi à son pouvoir et embrasse sa destinée. »
La chamane était alors apparue au sommet d’une dune. Elle était nue, seulement habillée de lambeaux de vêtements en laine. Tout son corps était couvert de cendre et sa peau était noire comme le sol du désert, seul ses yeux d’un bleu profond perçaient au travers de cette obscurité. Les trois gardes, intimidés, avaient dégainés leurs épées et en réponse à ça, Khaal s’était mis en position défensive, montrant les crocs comme un animal acculé.
« Rangez vos armes ! Elle ne nous fera aucun mal. Il s’adressa alors à la jeune chamane. Nous ne te voulons aucun mal, bien au contraire, je veux t’aider à te venger de ceux à cause de qui tu te retrouves à survivre dans ces conditions. »
Chaak était allé droit au but de peur de perdre son attention. Son plan était de rallier la jeune chamane à l’esprit si fort afin qu’ils luttent ensemble contre un de leur ennemi commun : les Khitans. Elle, Ils l’avaient envoyée dans ce lieu sordide pour le rite initiatique alors qu’elle n’était pas encore prête, elle avait alors dû avoir recours à toutes ses ressources pour survivre. Lui, ils lui avaient caché le véritable pouvoir de la magie du culte de Melkor, ils avaient embrouillé son esprit, le guidant dans la mauvaise voie. Après une courte discussion, les deux chamans étaient tombés d’accord, Chaak avait rallié Khaal au culte de Melkor et le plus important, il l’avait convaincu de se rendre dans leur tribu d’origine afin d’y répandre la parole du Dieu-Noir et de convertir le plus possible de chaman à leur cause. Une fois les derniers détails du plan de Chaak en place, ce dernier accompagné de ses gardes laissa Khaal aux préparatifs du départ et se remit en route pour le Mordor.