Histoire d'un départ (Past, Solo)[Fini]

Fièrement montée sur mon bouquetin blanc, Flocon, je jetai un dernier regard en arrière en direction du village. J'étais consciente que ma décision de visiter un peu le monde m'éloignerait probablement longtemps de chez nous. Je caressai les douces collines des yeux, appréciant la délicate courbure des portes qui abritaient mes frères... Mon peuple, un de ces jours. Nous nous étions installée sur le bord de la rivière aux Iris, dans un renfoncement où la terre était riche et tendre, accueillante. D'ailleurs, nous y avions construit nombre de trous à notre manière.

Quelques maisons d'architecture principalement naine poussaient de-ci de-là, tels de charmants champignons de pierre. Certes démesurés, mais aux formes harmonieuses et agréables à l'œil. Je soupirai en me détournant, croisant au passage le regard de ma mère. Bien que je l'avais priée de n'en rien faire lors de mon dîner d'adieu, la veille, elle n'avait pu s'empêcher de venir me regarder partir. Je lui dédiai un ultime sourire, puis rivai résolument mes yeux sur le petit chemin de terre qui menait vers les montagnes.

Flocon s'élança d'un pas régulier, le doux "clop clop clop" de ses sabots sur le sol me rappelant le son réconfortant de la grande horloge, dans le salon du Terrier. Le trou de ma famille. Je fermai les yeux un instant, occultant les herbes hautes et les iris environnants. J'imaginai notre maison, les discussions enjouées près du feu et le bruit de la forge paternelle, dans le lointain. Le rire contagieux de ma mère qui nous répétait avec bienveillance qu'une famille était le trésor le plus précieux du monde. Et père qui répondait en riant qu'elle ne dirait pas cela si elle voyait les merveilles cachées sous les montagnes.

Les montagnes... Le but de mon périple. Les histoires du peuple de mon père résonnaient toujours dans mon cœur, me confortant dans mon idée : je devais voir cela de mes propres yeux. Avant de devenir Thain et de devoir rester ici pour veiller sur le village... Avant d'avoir cette responsabilité, je devais renouer avec mes racines naines. Ma destination était donc la cité de Khazad Dûm, merveille des nains. J'espérais que cela me permettrait de découvrir des choses sur le monde. D'apprendre quelque chose qui me permette de devenir la parfaite Thain en mon temps. Du moins... Aussi parfaite que possible ! Cette pensée me tira un sourire et j'eus soudain hâte de voir ce que ce voyage me réserverait.

"Allez, Flocon, mon grand. Nous avons une longue route devant nous, alors il va falloir y mettre du tiens." murmurai-je à l'oreille de ma monture en lui caressant l'encolure.

Je claquai de la langue pour lui demander d'accélérer et il se mit à trotter un peu plus vite, docile et obéissant comme à son habitude. J'expirai profondément, resserrant ma prise sur les rênes de cuir qui me permettaient de diriger mon bouquetin. Ma sacoche de travail battait mon côté à chaque mouvement, instaurant un rythme à notre progression. Je relâchai les guides de la main gauche que je posai sur le pommeau de ma selle.

Une selle spécialement faite pour Flocon et moi par le plus jeune de mes frères. D'ailleurs, chacun m'avait offert un petit cadeau pour mon départ. Mère m'avait fait don d'une robe qu'elle avait tissé avec la toile confectionnée par l'une de mes sœurs (un cadeau commun, donc). Père m'avait offert un harnachement qui me permettait de maintenir mon marteau à mon côté sans gêner la marche. L'un de mes frères m'avait forgé une dague d'excellente facture, l'autre un bouclier gravé au blason de notre famille : un iris croisé avec un marteau. Ma dernière sœur m'avait offert un flacon de verre ouvragé contenant mon parfum préféré, de l'essence d'iris et de nénuphars. J'appréciais d'autant plus le cadeau que je savais que le flacon avait été soufflé par son mari, qui lui avait donné une forme d'iris tout simplement magnifique. Elle avait commenté en riant que cela m'aiderait peut être à séduire un éventuel parti. Et j'avais ri, convaincue comme je l'étais que l'amour n'était pas une chose faite pour moi. Même les gens du village avaient participé en m'offrant un balluchon -actuellement pendu sur le côté de ma selle- rempli de vivres pour plusieurs semaines.

Somme toute... J'étais prête à toute éventualité. Il n'y avait plus qu'à suivre ma route !