Revues de troupes (Pv Nadalian)

Il hocha la tête et fit signe de suivre. Nadalian glissa les mains par réflexe pour attraper sa jupe et la relever doucement, pour ne pas la laisser traîner dans la boue ci et là, avant de se souvenir qu’elle était en pantalon et se sentir un peu ridicule. Un peu plus, disons, elle avait l’impression que tout le monde regardait et la jugeait à cause de cela, alors même que personne ne devait en avoir quoi que ce soit à faire, dans un lei pareil. Le Roi se montra tout d’abord rassurant, confirmant que les précautions avaient été pensées et prises avant le lancement de ce projet. Il avait véritablement une très haute estime du peuple Nain… Et il était également le premier qu’elle entendait parler d’eux d’une telle manière, avec respect. Les blagues de mauvais goût circulant habituellement sur eux ne faisaient que très rarement mention de leur agriculture ou leurs techniques de construction, bien loin de là. Pour sa part, elle imaginait mal ce qui était possible de cultiver sous terre, en dehors des champignons et d’autres plantes raffolant de l’humidité. Les mousses, les fougères, certaines algues… Il lui semblait peu concevable d’allier agriculture et absence de soleil.

Ils étaient entrés, finalement, dans un grand hall de pierre, parsemés de nombreuses portes sur les deux côtés, menant à d’autres ailes et recoins de la bâtisse. L’obscurité était tempérée par une longue suite de torches, à mesure qu’ils s’éloignaient de l’entrée et donc de la lumière du jour. Elle ne put s’empêcher de ressentir un petit frisson lui parcourir le dos. Les grottes, mêmes creusées et aménagées comme ici, possédaient une ambiance particulière. Elle s’y sentait à la fois protégée et plus vulnérable. On ne savait jamais vraiment ce qui pouvait surgir par surprise des profondeurs, même si ces craintes étaient souvent issues de vieux contes pour enfant. Ne plus voir le ciel, cette sensation d’enfermement, l’obscurité latente, le silence souvent, tout ça formait un ensemble inquiétant, pour qui n’était pas habitué. Pourtant, elle ne pouvait qu’être admirative des prouesses techniques, ayant permis de creuser des salles, colonnes et passage au sein même de la roche. Depuis combien de temps cet endroit était-il travaillé ? Elle n’avait aucune idée du temps nécessaire pour ne serait-ce que creuser un tunnel de quelques mètres dans le creux d’une montagne.

"Nous voilà à présent à l'intérieur de la montagne. Comme vous le constatez, une part non négligeable de la forteresse est en réalité souterraine. Tout l'intérêt de nous être établis ici, c'est notamment que nos installations bénéficient d'immenses espaces intérieurs. Nous pourrions probablement y loger les deux tiers de la population de la région sans être trop à l'étroit. J'espère cependant que nous n'aurons jamais besoin d'en arriver là, car cela signifierait probablement que le pays fait face à un fléau duquel il ne se relèverait probablement jamais."

Oui… Une perspective à laquelle elle aimerait mieux ne pas penser. Ou plutôt, prier pour que ça ne se produise jamais. Il poussa une porte de bois, l’invitant à s’engager dans un escalier en colimaçon. A son bout, l’agréable surprise de retrouver si vite l’air libre. Une large cour, comme une place de marché, menant elle aussi vers d’autres passages. Ce qui attira le plus vite son attention, cependant, fut les serres. Grandes et étincelantes au soleil, dont l’architecture lui rappela instantanément les serres de Migdal, un vaste champ tenu par une confrérie de cultivateurs, au Gondor, aux pieds des montagnes, non loin de la capitale. On y cultivait des plantes rares, valant cher, elle avait eu une fois l’occasion de s’y rendre et l’agencement des lieux avait su l’impressionner. La conception de ces serres-ci était légèrement différentes, plus arrondies. Ses inquiétudes avaient disparu en un rien de temps, rassurée de constater que tous les soucis auquel elle avait songé pouvaient être comblés grâce à cela. Risquer de tomber à court de traitements, surtout durant un siège, serait une véritable catastrophe sanitaire.

Shimrod poursuivait ses explications, sur la façon dont il comptait procéder, le futur envisagé. Nadalian se demandait toujours, cela dit, comment les Nains pouvaient bien compenser l’absence de soleil, pour une agriculture souterraine… Quelle sorte de magie ou de techniques inconnues utilisaient-ils, dont n’auraient jamais entendu parler les hommes. Sans lumière ni chaleur, que pouvait-il bien pousser ? Hormis les rares plantes adaptées… Peut-être disposaient-ils d’une sorte de magie propre à leur espèce, leur permettant d’apporter assez de chaleur et de soin, pour être capable de faire pousser de véritables champs de culture, dans les profondeurs. Elle se retint de poser la question, le laissant poursuivre, se disant qu’elle verra sans doute cela par elle-même, plus tard, de toute façon. Des cultures et de l’élevage dans la vallée était déjà bien plus réaliste, à ses yeux, d’autant plus avec la possibilité de voyages et convois plus rapides. Le Pays de Dun manquait de routes, de façon générale. Bien que c’était dû à son histoire et aux turbulences passées, cela devenait vite un frein, dans un pays unifié.

"J'ai bon espoir que le pied de la montagne se développe à terme en une ville indépendante de cette structure. Comme vous le savez, nous sommes un peuple rude et résistant, aussi je n'ai aucun doute quant au fait que nous pourrons tenir un siège d'environ six mois une fois bien installés. Les réserves de la forteresse sont conçues pour permettre la conservation à longue durée des aliments de base, et une source au cœur des installations nous permettra de disposer d'eau fraîche et pure en cas de besoin."

C’était un travail titanesque… Assez loin de ce qu’elle s’était imaginée lors du trajet et les fois où il avait discuté de cette forteresse. Elle se demandait si un long temps d’adaptation était nécessaire, ou non, pour vivre dans les profondeurs… Afin de s’accoutumer à l’humidité bien plus importante, jour après jour, ainsi qu’au manque de soleil. Enfin, pour ce second point, il suffisait de sortir chaque jour à l’air libre, si la situation globale le permettait, ce n’était pas tant un souci. Les peuples troglodytes se reconnaissaient facilement, avec la pâleur de leur teint, acquise au fil des générations. Nadalian ne vivra sûrement pas assez longtemps pour l’observer mais elle se demandait à quoi pourraient ressembler, parmi les générations futures, ceux et celles ne vivant pratiquement que sous ces montagnes, depuis des dizaines d’années. On risquait d’être bien loin du teint hâlé et tanné par le soleil, habituel chez ce peuple pour le moment.

"C’est un endroit impressionnant," répondit-elle en continuant d’observer les serres, pour tenter de juger mentalement combien de plantes médicinales pourraient y pousser. "Ce système va en plus permettre de faire pousser les plantes à toute saison, c’est un atout précieux. Je sais quel est leur prix, oui, c’est bien cela qui freine une installation plus généralisée, dans tous les pays. Quoi que les Elfes sont réputés pour être capables de tout faire pousser sans aucun moyen de ce genre."

Malheureusement, on ne pouvait lutter contre. Le prix, la technicité requise, les matériaux, autant de contraintes empêchant les installations, mis à part celles faites par les confédérations. Ou celles faites dans les palais royaux, là aussi, c’était répandu. Elle rêvait toujours du moment où tout cela deviendra accessible à n’importe quelle personne, que tout le monde puisse, simplement et rapidement, installer ceci dans son coin de jardin. La magie était encore un autre sujet.

"Vous savez, cette esplanade pourrait également faire le bonheur de nombreux curieux," sourit-elle en levant le regard vers le ciel. "De tous ceux qui observent les étoiles et les étudient, ceux qui observent le ciel et étudient les oiseaux. Le Gondor aime encourager ce genre de pratiques, que ça soit l’astronomie ou d’autres domaines. Il doit aussi il y avoir des passionnés à Dun."

Elle ne croyait pas ceux racontant parfois en rigolant qu’il n’existait aucun « petit rigolo » passant sa vie la tête levée vers les étoiles. Beaucoup de personnes curieuses s’intéressaient à tous ces domaines, il suffisait d’en discuter autour de soi pour en trouver.

"Avez-vous déjà observé les étoiles ou entendu des légendes sur elles ?"

Nadalian semblait apprécier l'installation dont elle aurait la charge à terme. Je n'étais pas peu fier du chantier et bien que ces serres nous aient coûté un bras, j'étais certain qu'elles seraient essentielles à la bonne marche du projet. Nous avions beaucoup de chance de disposer de carrières dont nous ne souhaitions pas faire usage, car cela avait probablement penché en notre faveur lors des négociations avec nos voisins nains. Je soupçonnais également que le roi Durin ne nous envisage comme une œuvre de bienfaisance destinée à dorer son image et mettre en valeur la générosité et le talent de ses gens. Cela ne me dérangeait guère en soi, bien que la plupart de mes subordonnés se seraient surement offusqués d'être considérés comme des mendiants à qui l'on fait l'aumône. Pour ma part j'étais prêt à sacrifier ma fierté pour le bien et l'avancée technique de mon peuple. Je n'aurais pas été jusqu'à brader notre liberté en jurant allégeance aux nains, mais une alliance telle que la nôtre était tout à fait acceptable.

"C’est un endroit impressionnant," "Ce système va en plus permettre de faire pousser les plantes à toute saison, c’est un atout précieux. Je sais quel est leur prix, oui, c’est bien cela qui freine une installation plus généralisée, dans tous les pays. Quoi que les Elfes sont réputés pour être capables de tout faire pousser sans aucun moyen de ce genre."

Je hochai lentement du chef, ayant également eu vent de cela. Cependant les elfes étaient moins aisément convaincus de notre bonne volonté et il m'avait semblé trop difficile d'essayer d'obtenir leur aide. La plupart ne voyait en nous que des rustres, à peine civilisés et qui peinaient à distinguer leur droite de leur gauche. Peut-être n'avaient ils pas tout à fait tort, cependant Nous avions davantage de points communs avec les nains, sans parler de notre proximité géographique avec certains d'entre eux.

"Je n'ai connu que peu d'elfes dans ma vie et la plupart étaient des guerriers. Si d'aventure le seigneur Maedhros revient nous voir, peut être pourrez vous parler de cela avec lui. J'admets que l'idée ne m'a même pas effleuré."

Nous avions à l'époque bien d'autres choses plus urgentes à faire que de s'intéresser aux techniques de culture elfique. J'ignorais cependant si notre ami aux oreilles pointues reviendrait bientôt nous voir : le temps passe pour ceux de son peuple d'une façon bien différente du nôtre, et je craignais qu'il ne laisse passer des décennies voir davantage avant de revenir dans la région.

"Vous savez, cette esplanade pourrait également faire le bonheur de nombreux curieux," sourit-elle en levant le regard vers le ciel. "De tous ceux qui observent les étoiles et les étudient, ceux qui observent le ciel et étudient les oiseaux. Le Gondor aime encourager ce genre de pratiques, que ça soit l’astronomie ou d’autres domaines. Il doit aussi il y avoir des passionnés à Dun."

Je levai les yeux au ciel, surpris. Je n'y avais même pas songé jusque là. Je m'étais interrogé sur bien des aspects de la construction de notre nouvelle capitale, mais une telle chose m'étais passée littéralement au dessus de la tête. Cependant... L'idée n'était pas mauvaise, au contraire.

"Avez-vous déjà observé les étoiles ou entendu des légendes sur elles ?
-Lorsque j'étais jeune, nous nous réunissions souvent sur des collines ou des a pics pour les observer, avec les autres gamins du clan. Je n'avais pourtant même pas envisagé cette possibilité Cependant, l'emplacement serait idéal pour cela. Il faudrait y dédier une esplanade, peut être... Voir... Un observatoire, comme on en parle dans les livres. Avec un télescope et des outils de mesure."

L'idée me paraissait à présent brillante. Il me démangeait d'en faire part au maître d'œuvre. Le budget ne le permettrait pas dans l'immédiat, bien sûr, mais à long terme... Un tel équipement pourrait attirer bien des curieux et des hommes de sciences et il nous serait peut être même possible de louer l'endroit afin d'en tirer un revenu supplémentaire en temps de paix...

"Il faut que j'en parle à maître Narvi. Ne serait-ce qu'installer une estrade, pour commencer. Si vous voulez bien ?"

J'invitai Nadalian à m'accompagner à l'intérieur à la recherche du maître d'œuvre. Il serait, selon toute vraisemblance, à proximité du chantier en cours dans le quartier résidentiel. J'entrepris ensuite de répondre à sa question initiale :

"Je suppose que tous les peuples ont des légendes sur les étoiles. Après tout, il est bien naturel d'être émerveillé par des phénomènes naturels aussi splendides. Certains prétendent même que l'on peut lire l'avenir dans les étoiles mais d'après moi il s'agit d'un monceau d'âneries. J'ai bien peur d'être un homme pragmatique et je peine à comprendre pourquoi des petits points brillants et quasi immuables dans le ciel se soucieraient de notre sort, ou en quel honneur le message qui y serait prétendument inscrit concernerait davantage telle ou telle personne. De leur point de vue nous ne sommes probablement que des fourmis, et elles ne s'intéressent probablement pas davantage à nous que je ne perdrais mon temps à examiner une à une l'existence de chacun des membres d'une fourmilière."

Je marquai une pause tout en navigant à travers les corridors. Puis je poursuivis sur le ton de la réflexion :

"D'aucuns prétendent que les étoiles n'existaient pas, au début du monde. J'ai ouï dire que d'après certains contes au début il y aurait eu deux arbres, un d'or et l'autre d'argent, qui brillaient chacun comme le soleil et la lune. Ils auraient été détruits à un moment donné, et je ne sais quelle divinité aurait mis le soleil et la lune à la place, ainsi que les étoiles. Pour ma part, je n'y crois guère. Un être aussi puissant pour créer tout ceci n'aurait assurément pas laissé tout cela être détruit, avant de simplement mettre autre chose à la place. Je ne me prétendrais pas érudit et je veux bien croire à la magie, voire à des divinités. Mais tout ceci me semble un peu gros et j'ai bien peur de ne pouvoir y croire sans en avoir la preuve devant les yeux. Je pense qu'il s'agit d'un piège à nigauds, au même titre que le dahu."

Nous arrivâmes enfin dans la zone en travaux du bâtiment. J'encourageai d'un geste Nadalian à prendre garde à ne pas trébucher. Des bruits rythmés de pioches et de pelles nous parvenaient à présent et ce n'était qu'une question de secondes avant que nous ne tombions sur les travailleurs nains venus diriger le chantier.

"Lorsque j'étais jeune, nous nous réunissions souvent sur des collines ou des a pics pour les observer, avec les autres gamins du clan. Je n'avais pourtant même pas envisagé cette possibilité. Cependant, l'emplacement serait idéal pour cela. Il faudrait y dédier une esplanade, peut être... Voir... Un observatoire, comme on en parle dans les livres. Avec un télescope et des outils de mesure. Il faut que j'en parle à maître Narvi. Ne serait-ce qu'installer une estrade, pour commencer. Si vous voulez bien ?"

"Je vous suis."

Elle avait bien faillit répondre en riant qu’elle avait toujours du mal à l’imaginer enfant, avec une petite bouille et des joues encore rondes, l’air encore innocent et loin d’être aussi marqué par les guerres et la difficulté de l’existence. Il était si dommage qu’ils ne puissent avoir aucun souvenir visuel de ces périodes, hormis pour ceux ayant le temps et l’argent nécessaires, pour faire venir un peintre chez eux, capter cette image de leur enfant. Son père avait fait ça, pour elle, d’ailleurs, alors qu’elle était encore petite… Beaucoup de notables le faisaient, à ce moment, elle supposait que c’était considéré comme un signe extérieur de richesse. Rester assise sans bouger avait été pénible, elle s’en souvenait encore, malgré les années passées. Il avait dû brûler le tableau après sa fuite, sans doute, elle ne le saura jamais. Ce n’était pas le lieu pour y songer, de toute façon. Elle baissa la tête dans l’escalier, bas de plafond, tout à coup contente de porter une tenue adaptée, pour ce genre d’endroits. Imiter les hommes avait parfois du bon, dirait-on.

Elle écoutait le roi parler des croyances liées à l’observation des étoiles, sceptique sur le sujet. Il est vrai que beaucoup prétendaient que les astres permettaient de déterminer l’avenir et même la personnalité qu’auront les enfants, dès leur naissance. Sans avoir d’avis là-dessus. En revanche, elle se plaisait à rêver qu’il existe, sur ces étoiles, d’autres peuples très différents y vivant, des êtres qu’il ne pouvait imaginer, ignorant leur existence comme eux ignoraient la leur. Ou encore que les étoiles abritaient les demeures de dieux anciens, dans de grands palais de cristal, si purs. Il y avait aussi des histoires narrant que chacune de ces étoiles était en réalité un esprit, chacun veillant sur une particularité de leur monde, tel un ange gardien. Un pour les forêts, un autre pour les océans, les montagnes, les fleuves… Et que cette étoile qui bougeait peu, la plus brillante de toutes, soit le chef de tous ces esprits. Pourquoi certaines étoiles brillaient-elles si puissamment et d’autres si faiblement ? Nul n’avait pu le lui expliquer.

"D'aucuns prétendent que les étoiles n'existaient pas, au début du monde. J'ai ouï dire que d'après certains contes au début il y aurait eu deux arbres, un d'or et l'autre d'argent, qui brillaient chacun comme le soleil et la lune. Ils auraient été détruits à un moment donné, et je ne sais quelle divinité aurait mis le soleil et la lune à la place, ainsi que les étoiles. Pour ma part, je n'y crois guère. Un être aussi puissant pour créer tout ceci n'aurait assurément pas laissé tout cela être détruit, avant de simplement mettre autre chose à la place. Je ne me prétendrais pas érudit et je veux bien croire à la magie, voire à des divinités. Mais tout ceci me semble un peu gros et j'ai bien peur de ne pouvoir y croire sans en avoir la preuve devant les yeux. Je pense qu'il s'agit d'un piège à nigauds, au même titre que le dahu."

"Des arbres… ? Je ne le connaissais pas, celui-ci."

Des arbres plantés comme les autres, qui auraient brillé à ce point-là, ça aurait brûlé les yeux de tous ceux les observant, non ? Et avec ça, ils n’auraient pas pu éclairer beaucoup de surface, comme le soleil. Sa mère lui avait toujours dit que c’était un seul Dieu qui avait tout créé, tout seul, de la terre au soleil, puis toutes les espèces. Juste comme ça, par son pouvoir. Y réfléchir de trop lui donnait mal à la tête, car elle n’arrivait pas à concevoir comment on pouvait créer quoi que ce soit à partir de… Eh, bien, rien. Et s’il n’y avait rien, alors comment ce Dieu lui-même avait-il été créé ? Quelles sortes de puissances primaires étaient là depuis toujours et avaient engendré tout ça, ou alors… Sentant la migraine pointer, elle chassa au plus vite ces questions de sa tête. Après quelques mètres de plus, ils entrèrent dans une zone bien plus animée, en plein chantier. Puis, une minute plus tard, sur un membre du fameux peuple Nain dont le roi parlait souvent.

"Bonjour," lui souria-t-elle avec avenance.

Ne pas trop le dévisager, surtout, ne pas trop le dévisager… C’est la première fois qu’elle voyait de si près un représentant de son espèce et s’efforçait de ne pas être trop curieuse. Même si elle mourrait déjà d’envie de lui poser des questions sur son peuple et surtout, lui demander avec quel genre de sorcellerie ils pouvaient faire pousser quoi que ce soit d’autres que des champignons et des lichens sous terre. D’autant plus que le sujet principal était avant tout la question de l’esplanade et l’observation nocturne. Le temps que le Roi aborde ce sujet, elle se demanda quels étaient les points communs, plus exacts, entre les Nains et les Hommes. Ils étaient décrits comme des guerriers et des mineurs, mais elle n’en savait pas beaucoup plus. Ne pas trop le dévisager, avait-on dit. Leurs femmes avaient-elles aussi de la barbe ? Poser la question lui semblait trop indiscret pour oser.

"Ce type de construction est-elle une habitude, pour votre peuple ?" demanda-t-elle quand elle en eut l’opportunité, au cours de la conversation. "Ou préférez-vous vous concentrer sur les profondeurs ?"

Les histoires qui se racontaient sur les créatures des mines étaient nettement moins joyeuses que celles sur les étoiles. Cela dit, leur côté particulier et l’obscurité régnant en maître n’aidaient pas à imaginer de belles choses.